Alain, 80 ans, un moniteur de ski infatigable : « Le ski, c'est la cure de jouvence »

À 80 ans, Alain enseigne le ski sur les pistes du Mont-Dore dans le Puy-de-Dôme. Ce glisseur tenace, et un brin farceur a connu les premières heures de la station. Portrait d’un infatigable passionné qui a chaussé les skis depuis plus de 70 ans.

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L’habit rouge lui colle à la peau. Cela fait plus de 60 ans qu’il le porte. Alain Brousse connaît les pistes du Sancy comme sa poche. À 80 ans, ce passionné continue de dévaler les pistes en enseignant les bases de la glisse aux plus jeunes. Il est né en 1943, le 29 janvier pour être précis. Il vient tout juste de souffler sa 80ème bougie entouré de ses collègues et amis de l’ESF, école de ski du Mont-Dore. Une médaille d’honneur lui a été remise par l’école de ski pour rendre hommage à toutes ces années au service de la transmission de sa passion : le ski.  Mais ceci n’est pas un adieu pour "Ninou" - surnom donné par son entourage. Loin de lui cette idée, il est bien déterminé à continuer à enseigner. L’essentiel pour lui : assurer la relève. 

Le ski : un héritage familial

Lorsqu’on interroge les skieurs au sujet d’un certain Alain Brousse, presque tous savent à qui l’on fait référence : « Ah ! Ninou ! Oui, c’est la légende du Mont-Dore », s’amuse un moniteur. « On a deux mascottes à l’ESF : Piou-Piou, un canard jaune qui est la mascotte nationale du ski français. Et Ninou, la mascotte du Mont-Dore », confie fièrement Alain Audigier, l’actuel directeur de l’ESF.

Alain Brousse a vu trois ou quatre générations de skieurs défiler devant lui. Plusieurs centaines de débutants ont appris à glisser sur les pistes grâce à ses précieux conseils.  Il en a vu beaucoup grandir sous ses yeux. Certains ont même connu “Ninou” depuis le berceau : « Je le connais depuis que je suis gamine, se souvient Annie. J’ai appris à skier grâce à lui. Aujourd’hui, j’ai plus de 50 ans. Il est là depuis le début, depuis la création de l’école ». Alain a une passion pour le ski dès le plus jeune âge. À l’image d’Obélix, il est tombé dedans quand il était petit. En effet, son père Robert et trois autres moniteurs sont à l’origine de la création de l’école de ski français au Mont-Dore en 1946 : « Il n’y aurait pas tout cela sans les anciens », souligne Alain.

Ses premières glisses, ce doyen des pistes du Mont-Dore s’en souvient comme si c’était hier : « C’était en 1960 », précise Alain. Contre toute attente, il n’a pas appris à skier avec son père mais avec Pierrot Gatignol, premier directeur de l’école de ski du Mont-Dore : « C’est lui qui m’a donné l’envie de me surpasser. Il a tout de suite vu qu’il y avait du potentiel en moi. Il a été un modèle et donc j’essaie de transmettre ce savoir-faire comme lui me l’a transmis », se remémore Alain. En tout, il aura connu pas moins de six directeurs différents. Mais, moniteur de ski n’était pas son seul et unique métier : Alain a travaillé aux PTT (actuellement La Poste), a été conducteur de funiculaire et a même été croupier au Casino du Mont-Dore. 

À ses 19 ans, il obtient enfin le Graal : la médaille de moniteur de ski. Elle est accrochée sur sa veste rouge écarlate, juste en dessous du badge où est inscrit son prénom. Toutes les médailles portent un numéro. Alain, lui, a le 1612. Son père avait le 612 : « Une heureuse coïncidence n’est-ce pas ? sourit Alain, tout en montrant fièrement sa médaille. C’est sûrement le destin qui me fait signe »

 « Avant, je skiais sur des planches en bois et avec des chaussures en cuir »

En près d’un-demi siècle, beaucoup de choses ont changé dans la transmission de la discipline, selon Alain. Il a vu les conditions d'enseignement évoluer au fil des années : « Avant j’enseignais à une pelletée de gamins. Il y avait 40, 50, voire même 60 enfants et il n'y avait aucun souci. Maintenant, c’est différent, il faut que les moniteurs soient près des élèves ».  La pratique aussi a pas mal évolué  : « Avant, je skiais sur des planches en bois et avec des chaussures en cuir », se souvient-il. Alain constate aussi qu’au fil des années les relations entre élèves et moniteurs ont aussi changé : « Avant, on buvait des coups avec nos élèves. On allait manger chez eux. On se rendait visite. On était quasiment amis avec certains », se rappelle-t-il, amusé. 

Le plaisir d’enseigner 

Malheureusement, au fil du temps, les sauts et autres slaloms ont eu raison d’Alain. Depuis qu’il est à la retraite, le passionné a quelques soucis au cœur. Il ne peut donc plus dévaler les pistes, à l’image d’un casse-cou, comme il aimait tant le faire. Lorsqu’on lui demande si cela ne lui manque pas trop, il réplique :

« Moi, mon bonheur c’est enseigner aux débutants. Je veux voir les gens progresser. Quand ils me disent le sourire aux lèvres : ‘Ça y est Alain, j’y arrive !’ Je ressens une immense satisfaction »

Alain

Comme Alain, d’autres seniors continuent d’enseigner dans cette station du Mont-Dore. Selon l’octogénaire, un enseignement dispensé par des aînés possède une certaine plus-value : « Les parents sont plus à l’aise à laisser leurs enfants à des gens un peu plus âgés. On a de l’expérience, un peu plus de patience. Ils pensent que l’enseignement peut être meilleur que celui d’un jeune ». Ce qui fait le plus grand bonheur des jeunes enfants ébahis lorsqu’on annonce l’âge d’Alain : « 80 ans ?! On ne dirait pas », s’exclame un jeune garçon. Alain est flatté : « Tu essaies d’amadouer ton moniteur, je crois ». Pourtant, son entourage aussi ne tarit pas d’éloges en ce qui concerne “Ninou” : « Alain c’est un fin glisseur. Une technique de ski que j’aimerais avoir à 80 balais », lance Pierre, moniteur de ski. 

Alain a un style et un phrasé qui lui est propre. Il le reconnaît lui-même : « J’ai la tchatche. J’aurais bien joué dans les Bronzés font du ski ». En tout cas, Alain en a bien l’étoffe. Entouré de jeunes enfants, cet aîné un brin farceur ne peut s’empêcher d’essayer de les faire sourire : « Celui qui tombe, il me file un euro », lance-t-il, comme pour les motiver.

Quand on demande à Alain pourquoi il ne profite pas une bonne fois pour toute de sa retraite, il répond : « Je profite déjà de ma retraite ! Je vous ai pas dit mais je suis en vacances au ski en ce moment, plaisante Alain. Comme je dis souvent, si je gagne au loto, il y a peu de chances que vous me voyez dans les parages », renchérit-il. Il précise sa pensée plus sérieusement : « Si je continue c’est par passion, il n'y a aucun doute là-dessus. Mais, c’est aussi par nécessité. C’est un complément de revenus. Quand tu es à la retraite le moindre petit sou que tu fais est bon à prendre ». Le confort de travail a aussi joué pour Alain : « Avant, on remontait toujours en grimpant les escaliers. Aujourd’hui, on a un tapis roulant. On voit mal un homme de 80 ans remonter sans cesse les escaliers pendant 3 heures »

Assurer la relève 

Au détour d’une discussion toujours animée par l’humour d’Alain, il pointe du doigt une jeune fille vêtue d’une combinaison bleu du ski club du Mont-Dore : « Vous voyez celle-là, c’est la relève ». Parmi 30 jeunes formés par l'école de ski, trois ou quatre d'entre eux en ressortiront probablement moniteur. Un échange intergénérationnel unique et précieux selon Alain: « Je leur apprends les rudiments du métier et eux nous filent un coup de main. C'est enrichissant pour tout le monde »

Alain pense de plus en plus à préparer la relève, il craint que les jeunes ne soient plus attirés par ce métier : « Il y a des jeunes parmi nous, mais pas assez », déplore-t-il. Alain a pourtant déjà suscité des vocations, notamment auprès de son beau-fils, désormais moniteur de ski à Super-Besse. « Le ski c’est la cure de jouvence, c’est comme ça qu’il faut le vendre à nos jeunes », assure l'octogénaire. 

Une chose est sûre, Alain ne compte pas s’arrêter de si tôt, déterminé à battre le record de la plus longue carrière de moniteur. 

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