A Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) des chercheurs étudient les mécanismes biologiques de l’ours pour découvrir de nouvelles thérapies dans le domaine de la perte musculaire. Un programme d’étude international qui les conduit deux fois par an dans les forêts de Suède.
"L’ours est un formidable modèle pour l’homme" dit Etienne Lefai, chercheur à l’Unité de Nutrition Humaine de l’INRA et de l’Université de Clermont-Auvergne. Basé à Theix dans le Puy-de-Dôme, il s’interroge sur les mécanismes biologiques développés par les ours : "lors de son hibernation, il ne bouge plus, son rythme cardiaque chute à 10 pulsations par minutes, il devrait devenir obèse et subir une forte perte musculaire, or il n’en est rien". C’est tout l’inverse chez l’homme où l’inactivité et la fonte musculaire sont des maladies très contemporaines. D’où l’idée de dépasser les modèles de recherche scientifique classique (l’observation en laboratoire sur des cobayes) en allant voir dans la nature ce qui peut être transposé.
C’est le travail lancé en 2010 en Suède, l’ours devenant le sujet d’étude d’équipes réparties dans le monde entier et qui se partagent les thématiques des maladies cardiaques, de l’obésité, de l’ostéoporose ou de la fonte musculaire.
Concrètement les chercheurs clermontois et leurs collègues de Strasbourg ont découvert que le sérum de l’ours (le sang sans les cellules) appliqué sur des cellules humaines bloquait la dégradation des protéines, limitant la fonte musculaire. Il leur faut maintenant identifier les composants qui agissent avant de pouvoir passer à la phase médicale permettant de développer des stratégies de soin.
Deux fois par an, en hiver et en été, ils passent une quinzaine de jours en Suède, à 400 kilomètres au nord de Stockholm. Une fois la bête capturée par les équipes locales, ils disposent de très peu de temps pour faire faire des prises de sang, des mesures et d’infimes prélèvements de muscles et de gras, sans jamais avoir le droit de toucher l’animal, un même individu ne pouvant être examiné que deux fois au cours de sa vie. "Une approche plus respectueuse de la condition animale, plus éthique où l’on recherche dans la nature les phénomènes qui existent déjà et fonctionnent" dit Etienne Lefai. "Les Suédois sont très stricts, on agit toujours sous le contrôle d’un comité d’éthique pas question d’attraper une femelle gestante" précise le chercheur strasbourgeois Fabrice Bertile.
Ainsi quand l’ours aura livré ses secrets de bonne santé (d’ici 5 ans peut-être), il pourra aider l’homme à lutter contre des maladies qui sont de plus en plus courantes.