Encore inconnu il y a quelques années, le Black Friday est devenu un moment incontournable à Clermont-Ferrand. Une large partie des commerçants y participent. Souvent sans être emballés, parfois même contraints.
« Certains commerçants n’ont pas le choix, ils doivent y participer ». Lorsqu’elle évoque le Black Friday, Danièle Quinty, vice-présidente de la Fédération Clermont Commerce, n’arrive pas à se positionner. « Pour les clients c’est génial ! », explique-t-elle. « Cela permet d’acheter des articles qu’on ne pourrait pas s’offrir habituellement. Cela correspond au début des festivités de Noël, c’est parfait pour les achats à bas prix. Mais attention à rester raisonnable. Il ne faut pas que le client se dise «Je me fais avoir» ». Mais du côté des commerçants, le Black Friday sonne plutôt comme une obligation. « Pour nous, c’est loin d’être négligeable. Beaucoup n’ont pas très envie d’y participer, mais cela crée une vraie dynamique pour les fêtes, d’autant plus qu’après l’année que nous venons de passer, nous en avons bien besoin. »À Clermont, une large partie des commerces se prépare (de gré ou de force) au #BlackFriday. Vêtements, ordinateurs, téléphones et même salon d’épilation... tout y passe. ? @F3Auvergne @F3Aura pic.twitter.com/wMqcLlkYKO
— Alexandre Malesson (@AlexMaless) November 28, 2019
Après un an de manifestation de gilets jaunes, pour beaucoup de commerces les comptes sont loin d’être verts. « C’est pour cela que certaines boutiques s’impliquent dans le Black Friday. Après tous ces samedis de mobilisation nous avons tous eu de lourdes pertes. Entre les dégâts et les clients qui ne voulaient pas se déplacer, on a vu des confrères et des consœurs être contraints de fermer leur commerce. Personne ne veut en arriver là, on ne peut pas rater ce week-end. Encore plus avec le début des fêtes... ».
Une surveillance renforcée
Marquant désormais le coup d’envoi des achats de Noël, le Black Friday est devenu si puissant que la répression des fraudes a modifié la date de départ de son dispositif lors des fêtes de fin d’année. Censée renforcer les contrôles sur les produits festifs et les pratiques promotionnelles, cette opération démarre depuis deux ans à la date du Black Friday. « Le Black Friday a pris une ampleur considérable », explique Pierre-Yves Le Loc’h, chef du service de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes au sein de la direction de la protection de la population pour le Puy-de-Dôme. « Nous sommes mobilisés sur les grosses périodes. A Noël nous effectuons 8 000 contrôles, notamment sur la sécurité des jouets et des objets. En ce qui concerne le Black Friday, nous faisons surtout attention aux pratiques commerciales trompeuses. Cela concerne par exemple un commerce qui annonce des réductions jusqu’à – 70% alors qu’en réalité cela ne concerne que quelques produits ». Une surveillance renforcée cette année, de plus en plus de secteurs participent à l’événement.
Tous concernés
Il suffit de se balader dans une rue commerçante clermontoise pour se rendre compte qu’effectivement, plus rien n’arrête le Black Friday. Si au départ ces réductions ne concernaient que quelques catégories de produits, aujourd’hui tous les secteurs s’y mettent : vêtements, high-tech, produits de beautés et même banque ou salon d’épilation. « La seule règle, c’est de ne pas vendre à perte. Normal que de très nombreuses enseignes y participent », déchiffre Stanislas Renié, vice-président de la CCI chargé du commerce. Au-delà de cette norme, tout est permis. « Pour participer au Black Friday, un commerçant n’a même pas besoin de se déclarer. Impossible pour nous d’avoir des chiffres. C’est un phénomène très particulier. Cela a explosé très rapidement via internet, je pense que cela peut aussi mourir très vite ».Vendredi morose pour les commerces indépendants
Si les grandes enseignes et les centres commerciaux surfent sur le succès du Black Friday, l’engouement est loin d’être le même pour les commerces indépendants. Alors qu’elle vient juste d’installer son affiche sur la vitrine de sa boutique de vêtements pour enfants, Virginie garde le sourire sans cacher une légère frustration. « Je sais déjà que je ne vais pas faire de marge ce week-end », explique-t-elle. « Je n’aurai quasiment pas de bénéfices. Je participe au Black Friday parce que je suis obligée. Je ne suis pas d’accord avec ce principe mais si je ne fais rien, je sais que je n’aurai personne dans ma boutique. Ce qu’il faut c’est réguler cet événement, au moins en choisissant des dates ! ».Effectivement si à la base le Black Friday ne dure qu’un week-end, certaines boutiques ont déjà commencé leurs promotions depuis une semaine, parfois même quinze jours. « Je ne devais commencer que demain (vendredi), mais finalement j’ai commencé aujourd’hui » regrette Christophe Saucet. Propriétaire d’une épicerie fine depuis 4 ans, il s’est contenté d’une feuille A4 manuscrite pour promouvoir son offre spéciale Black Friday. « Cela fait plus authentique », se justifie-t-il. « J’ai beaucoup hésité avant d’y participer. Mais les concurrents le font, eux. Il faut bien que je m’aligne. »
Christophe sait déjà que le week-end ne sera pas très fructueux, il hésite même à annuler sa promotion spéciale Black Friday.