Confinement oblige, le Tribunal de Grande Instance de Clermont-Ferrand a fermé ses portes. La majorité des audiences sont reportées. Un coup dur porté par la crise sanitaire du coronavirus COVID 19 que traverse notre pays, d’autant qu’elle fait suite au mouvement de grève des avocats.
Fermé pour cause de Coronavirus. A Clermont-Ferrand, le Tribunal de Grande Instance n’échappe pas à la règle et doit lui aussi faire face au confinement imposé par le coronavirus COVID 19. En temps normal, ce sont en moyenne 210 personnes qui y travaillent quotidiennement. Mais actuellement seule une quinzaine de magistrats et de greffiers occupent leur poste, une majorité de leurs collègues étant en télétravail. Une situation qu’Eric Maillaud, procureur de la République, espère pouvoir améliorer rapidement : « Sachant qu’une grande partie de notre travail ne peut se faire que sur place et que nous disposons d’une enceinte de 17 000 m² nous espérons pouvoir bientôt faire rentrer plus de monde, peut-être 50 ou 60 par jour ».
Conséquence directe de cette situation : de 45 audiences mensuelles, le tribunal de Clermont-Ferrand est passé à 4 par semaine en moyenne. « Par définition, les audiences impliquent des flux de population, donc la plupart doivent être reportées, poursuit Eric Maillaud. Nous ne traitons que les urgences. Le contentieux civil est à l’arrêt, tout comme les affaires familiales. Seuls les flagrants délits de violences familiales et les infractions de confinement, ou celles relevées à cette occasion comme les conduites sous emprise par exemple, sont traitées. Les dossiers où la liberté est en jeu sont également prioritaires, tout comme ceux où il y a des contrôles judiciaires, car certains ne peuvent excéder six mois ».Nous ne traitons que les urgences
Quelque 2 500 dossiers en attente
Actuellement, 2 500 dossiers se retrouvent ainsi en attente. Une situation « désastreuse », d’autant qu’elle fait suite au mouvement de grève des avocats, mobilisés contre la réforme des retraites. « Deux ou trois mois de confinement feront suire à deux mois de grève, cela correspond à un demi-année qu’on ne rattrapera pas, constate le procureur. Le plus simple serait de reporter toutes les audiences mais cela impliquerait des délais de 12 à 15 mois, ce qui ne serait pas acceptable. Ce serait véritablement de la maltraitance judiciaire ».Une situation que déplore aussi Philippe Gatignol, bâtonnier de l’ordre des avocats clermontois. « Ce qui est compliqué, c’est de ne pas pouvoir donner de date à nos clients. Car même si nous pouvons préparer nos dossiers, nous n’avons aucune visibilité sur les délais de traitement ».
Des aménagements en vue
Face à cette situation le parquet, en concertation avec le barreau, tente de s’adapter. « On va être obligé d’effectuer un tri de façon à apporter d’autres formes de réponse à certains dossiers, ceux bien sûr où il n’y a pas de victimes, explique Eric Maillaud. Dans la plupart des dossiers, toutes les parties ont un avocat. Nous envisageons, par exemple, que ces avocats déposent leurs conclusions et qu’ils soient traités sans plaidoirie ».Les avocats vigilants
Des adaptations sur lesquelles le parquet travaille en concertation avec le barreau : « Nous réfléchissons ensemble pour trouver des solutions car nous souhaitons être des facilitateurs et non des acteurs de blocage, mais c’est très compliqué, souligne le bâtonnier. Nos métiers sont des métiers fondés sur l’humain et même si nous pouvons gérer des dossiers à distance cela n’est pas satisfaisant car la confrontation d’un individu avec son juge reste fondamentale, ne serait-ce pour que la décision de justice soit comprise. Même si nous les comprenons et que nous les acceptons, les ordonnances et les mesures exceptionnelles qui sont prises actuellement nous heurtent, notamment la suppression des audiences ou le maintien sous contrainte de personnes en psychiatrie. Nous allons veiller avec une grande vigilance à ce que l’exceptionnel ne devienne pas la règle ».La délinquance aussi à l’arrêt
Effet positif du confinement : la délinquance a fortement reculé ses dernières semaines dans le Puy-de-Dôme. Sur le département, elle a chuté de 80 %, 50 % sur les agglomérations de Clermont-Ferrand et de Riom. « Les atteintes au bien notamment sont en baisse, même si quelques casse-béliers ont été constatés, précise Eric Maillaud. De même la délinquance routière a chuté de manière significative. En ce qui concerne les enquêtes de police, elles sont elles aussi à l’arrêt puisque les forces de l’ordre sont mobilisées sur les contrôles ».En matière de violences familiales, il n’y a pas d’augmentation significative, « On est sensiblement au même niveau que l’an dernier à la même période », précise le procureur.