Au CHU de Clermont-Ferrand, 6 patients présentant des symptômes persistants après l’infection au Covid 19 sont accueillis chaque semaine. Leur prise en charge nécessite des moyens matériels et humains très importants dans lesquels le CHU a dû investir.

Au CHU de Clermont-Ferrand, la prise en charge des patients Covid ne se limite pas aux hospitalisations et réanimation. En effet, plusieurs mois après l’infection, certains présentent encore des symptômes qui nécessitent une prise en charge, même si parler de « Covid long » n’est pas tout à fait exact selon l’infectiologue Olivier Lesens : « Dire Covid long, ça veut dire qu’on pense que c’est lié à la persistance de l’infection alors que ce n’est pas ça. Ce sont des symptômes qui persistent après avoir fait une infection Covid. Les causes ne sont pas toutes connues sur un plan physiopathologique et elles sont très hétérogènes. Il y a énormément de situations très différentes. Il vaut mieux dire symptômes persistants après Covid. Ça peut être aussi de nouveaux symptômes qui apparaissent ».

6 patients accueillis chaque semaine

Chef du service de pneumologie, le professeur Lesens évalue à environ une centaine le nombre de patients du CHU qui présentent ou ont présenté des symptômes persistants : « Combien il y en a exactement, c’est difficile à dire. On a organisé la prise en charge par les moyens qu’on a actuellement et c’est relativement lent. On n’a pas pu le faire pendant le mois d’août car on n’avait plus d’hôpital de jour mais là on va reprendre à 6 patients par semaine ». Ces patients sont soumis à un scanner, une épreuve d’efforts et une épreuve fonctionnelle respiratoire lors de leur passage à l’hôpital, des examens chronophages qui expliquent ce rythme.  

"On a des gens qui sont très malheureux"

Pour bénéficier de ce suivi, la notion de temps après lequel les symptômes persistent est importante  « Un mois, c’est trop tôt. Il y a beaucoup de symptômes qui disparaissent plus d’un mois après. Nous, on s’est fixé comme limite 3 mois après l’infection. Ce n’est pas la peine de faire des examens avant les 3 mois car la plupart des gens guérissent tout seuls dans ce délai », explique Olivier Lesens, pour qui ces symptômes ne doivent absolument pas être pris à la légère : « On a des conséquences sur la qualité de vie qui sont très importantes, on a des gens qui sont très malheureux. Ils n’arrivent pas à faire les activités quotidiennes, il y en a qui n’arrivent même pas à faire le ménage. Il y a des conséquences économiques aussi car ce sont des gens qui sont en arrêt de travail depuis des mois. »

Des symptômes variés

Les symptômes persistants sont extrêmement variés d’un patient à l’autre : « Ce qui prédomine très largement c’est la fatigue, une grande fatigue inhabituelle. Ça peut être l’essoufflement, pour des efforts minimes ou un peu plus important. C’est vraiment les 2 choses qu’on voit quasiment tout le temps. Après, ça peut être très varié, il y a la fameuse anosmie qui peut persister pendant longtemps, des maux de tête… Plus rare mais bien réel, des gens se plaignent de troubles de la mémoire, de troubles cognitifs : ils ont plus de mal à se concentrer, à réfléchir, à compter. On a des pertes de cheveux, des douleurs articulaires ou musculaires, la liste est très importante », énumère Olivier Lesens.

Des risques de fibrose

Plusieurs causes peuvent expliquer cette persistance des symptômes et doivent être très rapidement identifiées : « Premier cas, ce sont les gens dont les poumons sont en train de se détruire, ce que l’on appelle une fibrose pulmonaire. Ce n’est pas l’infection qui persiste, c’est un processus de destruction qui se développe à son propre compte », indique l’infectiologue. Cette pathologie est détectée grâce à un scanner et les conséquences sont également visibles lors des épreuves fonctionnelles respiratoires. « C’est rare, il n’y en a pas énormément et c’est surtout chez les gens qui sont passés en réanimation ou ont été hospitalisés », rassure Olivier Lesens. Dans ce cas, des corticoïdes ou des médicaments anti-fibrose sont administrés.

"Il y a des gens qui ont une désadaptation à l’effort"

« Il peut y avoir des gens qui ont des espèces de syndromes post-traumatiques, ce qui peut nécessiter d’être orienté vers un psychologue ou un psychiatre. Il y a des gens qui ont une désadaptation à l’effort, ils ont eu une période où ils étaient complètement inactifs et ils n’arrivent pas à reprendre une activité normale. A ce moment-là, on les oriente vers de la rééducation fonctionnelle », décrit Olivier Lesens. Cette rééducation peut se faire chez un kinésithérapeute, au centre de Cébazat qui propose un protocole de rééducation fonctionnelle ou bien à Durtol, qui propose un programme similaire. « On détecte également des syndromes d’hyperventilation, c’est une désadaptation à l’effort qui est déjà connue mais qu’on voit beaucoup plus fréquemment. Le traitement est aussi la rééducation ».  Le Covid peut également révéler des pathologies pulmonaires antérieures qui n’étaient pas connues, "par exemple des fumeurs qui avaient des bronchopneumopathies chroniques ou un asthme qui étaient passés inaperçus", précise Olivier Lesens.  

"Il y a vraiment de tout, y compris des gens qui n’ont jamais été hospitalisés"

Dans les rangs des patients, les profils sont divers : « Il y a vraiment de tout, y compris des gens qui n’ont jamais été hospitalisés, qui n’ont pas fait de Covid grave. Il y a des jeunes, des sportifs… Il y a malgré tout une prédominance de femmes », décrit Olivier Lesens. Pour les traiter, l’hôpital déjà en difficulté en termes de personnel et de moyens a dû investir : « On a été obligés d’embaucher un kiné supplémentaire, on a embauché une nouvelle infirmière pour faire de la programmation d’examens, là on est en train d’acquérir un nouvelle appareil pour les épreuves fonctionnelles respiratoires. On essaye de mettre des moyens pour prendre en charge ces personnes. » L’infectiologue craint néanmoins de manquer de structures de rééducation fonctionnelle.

"C’est évident qu’on ne verra pas tout le monde"

Le matériel est lui aussi insuffisant, explique Olivier Lesens : « On utilisait déjà beaucoup le plateau technique pour le Covid, pour rattraper aussi le retard pris à cause du Covid sur les autres pathologies, et c’est vrai que ça vient se rajouter. A chaque fois qu’on prend un de ces patients, ça veut dire une consultation très longue car il faut les écouter, écouter leurs symptômes, bien comprendre ce qu’il se passe… » S’ensuit un test d’efforts avec une marche de 6 minutes où on surveille la saturation en oxygène, des épreuves respiratoires, un scanner, autant d’examens qui mobilisent le plateau technique. « On arrive à en accueillir 6 par semaine mais c’est évident qu’on ne verra pas tout le monde. On se concentre sur ceux qui ont des gros symptômes sinon on ne s’en sortira pas », regrette l’infectiologue.

Une guérison lente

« C’est vraiment un travail de longue haleine, on ne s’en sortira pas en un claquement de doigts, il n’y a pas de traitement miracle. Ça peut durer des semaines voire des mois. C’est un processus très long, même si les symptômes s’amenuisent avec le temps », affirme Olivier Lesens. Pour éviter, en cas de Covid, la persistance des symptômes, il recommande la vaccination mais aussi la pratique sportive : « Pour les sportifs c’est un peu plus facile pour la rééducation. C’est un peu compliqué pour d’autres gens qui n’ont jamais fait de sport. C’est compliqué pour tout le monde, c’est un effort à faire, mais c’est d’autant plus difficile si on n’a pas l’habitude de l’effort ». Sur le plan national, on estime qu’environ 10% des patients ayant contracté l’infection connaissent une persistance des symptômes.

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