Au lendemain de l'annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron, cap sur les élections législatives du 30 juin. Le politologue Mathias Bernard analyse la percée du RN aux élections élections européennes 2024.
Seulement trois semaines avant le premier tour des législatives, le 30 juin. C'est une campagne éclair qui démarre, ce lundi 10 juin, au lendemain de l'annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron, en réaction aux résultats des élections européennes 2024. "Ce n'est pas la première fois que l'on a un délai aussi court. Lors de la dissolution en mai 68, on avait eu la même durée de campagne. De Gaulle l'avait annoncée le 31 mai et les élections avaient eu lieu le 24 juin. Ce qui est inédit, c'est qu'il n'y a que 3 semaines entre deux élections. C'est la grande inconnue", réagit le politologue Mathias Bernard.
Pour l'expert, le résultat de ces prochaines élections législatives pourrait être calqué sur celui des élections européennes 2024. "On voit mal comment en 3 semaines, le verdict des urnes changerait complètement. Il peut y avoir des évolutions, parce que ce n'est pas la même élection ou parce que dans les législatives, il y a le poids des personnalités notamment des députés sortants qui peut jouer", estime-t-il.
On peut imaginer que les députés sortants auront une prime malgré tout. La campagne est courte, il n'y aura pas beaucoup de candidatures qui vont pouvoir émerger.
Mathias BernardPolitologue
Compte-tenu des résultats de 9 juin, où la liste “La France Revient !” du Rassemblement national, menée par Jordan Bardella, est arrivée largement en tête des élections européennes de 31,3% des voix, le parti est "en position de force" pour les législatives, estime Mathias Bernard. "Le RN est organisé nationalement, il est en capacité de fournir des candidats qui n'ont pas d'expérience politique antérieure. Pour les électeurs du RN, ce vote signifie un rejet de l'offre politique telle quelle est présentée par les partis gouvernementaux. Le fait que les candidats n'aient pas ou peu d'expérience politique, ce n'est pas forcément un handicap pour les électeurs. Cela peut même quelque part confirmer leur choix."
En Auvergne, territoire suivi de près par le politologue clermontois, le Rassemblement national est arrivé en tête dans les 4 départements. "Probablement que le RN ne va pas remporter toutes les circonscriptions lors des législatives mais, quand même, il aura sans doute plusieurs élus. Aujourd'hui, il n'a qu'un seul élu issu de 2022 sur la circonscription de Commentry-Montluçon dans l'Allier", rappelle Mathias Bernard.
"L'Auvergne n'a pas échappé à la déferlante RN"
Les résultats des élections européennes de ce 9 juin révèlent des scores élevés en Haute -Loire (37,7%) et dans l'Allier (36,7%) pour le Rassemblement national. "L'Auvergne n'a pas échapé à la déferlante du Rassemblement national. Dans le Cantal, qui était a priori moins favorable, il obtient quand même 34%. Dans le Puy-de-Dôme, qui a longtemps été une terre de mission pour le RN, Jordan Bardella obtient un score proche de sa moyenne nationale, en étant en tête à Clermont-Ferrand. Cela montre que le vote RN a gagné de nouvelles catégories socio-professionnelles. Les 20% à Clermont, cela veut dire que dans un vote urbain, des agents fonction publique ou des diplomés par exemple, une partie de ces électeurs a voté RN."
Pour Mathias Bernard, la hauteur du résultat est "surprenante" en Auvergne. "C'est plus de 10 points de progression par rapport à 2019. Dans une élection de 38 listes, le vote aurait pu se disperser un peu plus. D'autant qu'il y avait d'autres listes qui auraient pu capter un lectorat contestaire comme celle de Marion Maréchal ou de celle de Jean Lassalle, qui a d'ailleurs fait un score élevé dans le Cantal (5,6%). Cela montre que dans les campagnes, dans le monde rural éloigné des grandes métropoles, c'est quasiment un vote identitaire. Dans ces élections, tous les partis ont perdu, certains plus que d'autres, sauf le RN."