Depuis toujours, elle leur voue une passion. Claire Mock, scientifique exerçant au parc Vulcania, connaît bien les volcans. Elle les présente et les explique régulièrement au public. Cette auvergnate d'adoption a accepté de transmettre une partie de ses connaissances sur le plateau de "Vous êtes fomidables", sur France 3
Non, la lave qui s’échappe d’un volcan en éruption ne remonte pas du centre de la Terre… « C’est ce que l’on pensait un moment donné. Au centre de la Terre, on a du métal. Une boule de fer et de nickel, d’à peu près la taille de la lune. Ce magma – qui est le terme plus exact – un mélange de roches fondues et de gaz, qui s’écoule hors des volcans, se forme à l’intérieur de notre planète, entre 30 et 200 kilomètres de profondeur, au maximum » rectifie d’emblée Claire Mock.
Les images les plus impressionnantes correspondent plutôt à des éruptions dites effusives… et donc très chaudes. « La lave va monter à des températures allant jusqu’à 1200 degrés. Elle est fluide et le gaz s’échappe facilement. Lorsque les bulles de gaz éclatent, cela provoque des projections de lambeaux de lave. Ce qui donne des éruptions spectaculaires. »
Claire est géologue. Depuis 2012, elle exerce sa profession au cœur de la chaîne des Puys, au parc Vulcania, basé non loin de Clermont-Ferrand, en Auvergne. Le décor est idéal. « En Auvergne, on plusieurs massifs volcaniques. Si l’on prend l’exemple du Cantal, il est relativement ancien. Il s’est formé entre treize et trois millions d’années. Il n’y a pas eu d’éruption depuis », décrit la spécialiste. « En revanche, si l’on considère la chaîne des Puys, on est sur un volcanisme plus récent. Le plus ancien a moins de 100 000 ans. Et seulement 8400 ans pour les puys de la Vache et de Lassolas, considérés comme les plus jeunes volcans de la chaîne des Puys. »
Toujours dans la région, le plus jeune volcan... de France métropolitaine se trouve un peu plus loin. « Au sud du massif des Monts d’Or se trouve l’ensemble du lac Pavin. Un très joli lieu. Et sa dernière éruption date cette fois d’un peu moins de 7000 ans », confirme Claire.
Si on prend le cas de la chaîne des Puys, l’ensemble est toujours considéré comme actif.
A propos de volcans, une question nous brûle (…) les lèvres. Peuvent-ils un jour se réveiller ? « Dans le langage de géologue, ce que l’on considère comme volcan actif, c’est un volcan qui a connu une éruption il y a moins de 10 000 ans. Au-delà, on considère qu’il n’est plus actif, comme une sorte de date de péremption. » Mais cela n’a pas forcément une signification définitive quant à une éventuelle éruption. « Si on prend le cas de la chaîne des Puys, l’ensemble est toujours considéré comme actif. Chaque volcan de cette chaîne s’est construit en une seule éruption, durant quelques semaines, voire quelques mois. On pense aujourd’hui que, s’il devait y avoir une nouvelle éruption dans cette zone, elle donnerait plutôt naissance à un nouveau volcan, et pas à réveiller un volcan existant », précise la volcanologue.
Les touristes qui cheminent régulièrement sur les cratères auvergnats sont désormais prévenus : un réveil est toujours possible. « C’est loin d’être impossible. La dernière éruption –il y a 8400 ans- c’était vraiment hier. Mais pas de panique. En général, quand une nouvelle éruption se prépare, il y a des signes annonciateurs. Des gonflements du sol, des gaz qui s’échappent. Aujourd’hui on a aucun des signes…», nous rassure-t-elle.
Dans cette chaîne des Puys, on ne trouve que des petits volcans. « Le plus gros d’entre eux, c’est le Puy-de-Dôme, qui culmine à 1460 mètres d’altitude », confirme Claire Mocq. « Mais il ne faut pas oublier qu’ils sont implantés sur le plateau des Dômes. Il s’agit, en quelque sorte, des restes d’une ancienne chaîne de montagnes qui, elle, date de 300 millions d’années. C’est sur ce plateau de granit, à déjà quasiment 1000 mètres d’altitude, qu’ont émergés ces tout jeunes volcans. Finalement, la hauteur réelle du Puy-de-Dôme n’est même pas de 500 mètres… »
Mais petits ou pas, les volcans d’Auvergne ont tout de même de l’intérêt, notamment en ce qui concerne la qualité des eaux minérales. « Lors des dernières éruptions, la projection de la lave a formé une roche que l’on appelle la Pouzzolane. Elle sert, d’ailleurs, à plein de choses différentes. Elle est en fait constituée de multiples petits fragments de lave refroidie. Lorsqu’il pleut, cela va agir comme un filtre naturel. L’eau s’infiltre et s’accumuler, une fois purifiée, dans une réserve. » La bonne réputation des eaux auvergnates n’est donc pas une simple légende publicitaire.
Sur ce sujet, Claire a l’habitude de répondre à toutes les interrogations. Elle fait partie des nombreux scientifiques qui accueillent régulièrement les visiteurs du Parc Vulcania. Originaire de Strasbourg, elle a choisi de rejoindre Clermont-Ferrand pour faire son doctorat en 1994. « Les sujets de recherche qui y étaient proposés m’intéressaient davantage », se souvient-elle.
Elle n’est cependant pas devenue géologue par vocation. « C’est un peu les hasards de la vie. Même si, comme beaucoup de gens de ma génération, j’ai été bercée par Maurice et Katia Krafft – un couple de volcanologues alsaciens, qui a trouvé la mort au Japon le 3 juin 1991 dans un volcan », raconte Claire. « J’avais eu la chance de les voir en conférence, mais moi j’ai toujours voulu devenir vétérinaire. C’était mon rêve d’enfant. Mais je n’ai pas été acceptée en école vétérinaire. Pour passer une année, je m’étais inscrite à la fac de Strasbourg en biologie. Le jour de la rentrée universitaire, et arrivé un homme. Le professeur Hubert Whitechurch ouvrait une nouvelle filière en géologie. Je trouvais sa façon de présenter les choses vraiment intéressante. J’ai donc quitté la biologie pour la géologie. »
Son parcours l’amènera à voyager dans de nombreux pays, dont l’Ethiopie, où elle fera des prélèvements pour tenter de déterminer comment les roches se sont refroidies, à quelle époque et quelle vitesse, c’était même le sujet de sa thèse. Elle fera également des recherches en laboratoire à Grenoble durant deux ans.
L’idée de départ prévoyait de créer une sorte d’ascenseur à l’intérieur du Puy de Dôme, pour explorer l’intérieur d’un volcan
En 2002, elle participe à l’ouverture du parc dédié aux volcans, dont la construction tient très à cœur à l’ancien Président de la République, et l’Auvergne, Valéry Giscard d’Estaing. « A l’époque, c’était, peut-être, davantage un musée. L’idée de départ prévoyait de créer une sorte d’ascenseur à l’intérieur du Puy de Dôme, pour explorer l’intérieur d’un volcan. Cela a suscité un tollé général, le Puy-de-Dôme étant un peu sacré… Le projet a été ensuite retravaillé par le Conseil régional, qui en a fait Vulcania. Premières réflexions en 1992 et ouverture… dix ans plus tard. »
Claire y évolue depuis 20 ans et a vu toutes les évolutions du site. « Aujourd’hui, nous sommes plutôt sur un parc d’exploration des volcans et de la planète-Terre. L’idée, c’est d’apprendre en s’amusant. On propose aussi des nocturnes l’été, à base de spectacles. » Le public est très varié, et comprend en particulier des scolaires toute l’année.
Mais si l’équipe du parc comprend de nombreux scientifiques, ce n’est pas par hasard. « Nous ne sommes pas un centre de recherche, mais on a pour objectif de vulgariser ce que les chercheurs découvrent. En lien assez étroit avec le laboratoire « Magma et volcans » de Clermont-Ferrand, nous sommes porteurs de ces découvertes, en organisant ces animations pédagogiques. »
Au parc, Claire Mock est plus particulièrement chargée de coordonner l’action menée en faveur de la protection de l’environnement. Un sujet très actuel. L’occasion de l’interroger sur un éventuel impact du climat sur l’état de nos volcans. « Je ne dirais pas que les volcans sont menacés. Mais il est vrai que la Parc naturel régional des Volcans d’Auvergne mène des actions de prévention pour limiter l’érosion. Ce qui menace le plus étant la fréquentation, l’érosion des sentiers. Et il est important de rappeler aux visiteurs qu’il faut éviter de quitter ces sentiers… », souligne avec un sourire notre interlocutrice passionnée.
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