En hiver, le système immunitaire est très sollicité et le manque de lumière peut jouer sur l'humeur. Voici les conseils d’un spécialiste en nutrition du CHU de Clermont-Ferrand pour renforcer nos défenses immunitaires et booster notre moral... grâce à l’alimentation.
L’hiver, la santé et le moral sont mis à rude épreuve : virus et microbes hivernaux menacent, et le manque de luminosité peut induire des changements d’humeur. Pourtant, quelques bonnes habitudes alimentaires et une activité physique régulière peuvent aider notre corps à faire face au changement de saison. Le professeur Stéphane Walrand, praticien hospitalier en nutrition clinique au CHU de Clermont-Ferrand, dresse le constat suivant : “L'hiver on a plusieurs problèmes. Le premier, c'est la disponibilité alimentaire qui n’est pas du tout la même que l'été, notamment au niveau des végétaux. On est sur des végétaux qui ont des profils nutritionnels différents, peut-être un peu moins intéressants d'ailleurs que l'été. Le deuxième point est qu’en hiver, évidemment, on a besoin de mieux se protéger contre les aléas infectieux inhérents à cette saison. Aussi, la plus faible luminosité peut favoriser une baisse de moral chez les personnes.”
Voici les recommandations du professeur Walrand pour aider notre corps à faire face.
Privilégier les aliments sous leur forme la plus complexe
Le professeur Walrand recommande de privilégier les aliments les plus proches possible de leur forme naturelle : “Une bonne alimentation, ça veut dire une alimentation équilibrée, ça veut dire manger la quantité d'aliments dont on a besoin, pas plus, pas moins. C’est aussi une alimentation diversifiée, c'est-à-dire de manger un peu de tout ce qui est à disposition. Le troisième secret d'une l'alimentation de qualité, celui qu'on ne nomme jamais et peut-être le plus important, c'est la complexité alimentaire. Cela veut dire manger des aliments le plus proche possible de leur forme naturelle.” Il détaille : “Par exemple, si on fait la comparaison entre une orange et un jus d'orange : si je mange une orange, je vais avoir un apport nutritionnel bien meilleur que si je bois un jus d'orange. Même si cette transformation est très faible, quand vous avez fait votre jus d'orange, vous avez chauffé un petit peu, vous avez mis votre orange à la lumière... Quand vous regardez votre orange, une fois que vous avez pressé votre jus, il va rester tout un tas de choses. Par exemple, le tégument, la petite peau blanche qui sépare les différents segments d'orange, contient tout un tas de nutriments très intéressants. Complexité alimentaire veut dire que j'ai gardé mon aliment le plus complexe possible, c'est à dire le plus proche possible de sa forme naturelle. Et c'est comme ça que je vais avoir une forte densité en nutriments. C’est important l’été, mais encore plus l'hiver.”
Manger de la soupe
Pas de preuves que la soupe fait grandir, en revanche, elle est très intéressante sur le plan nutritionnel, selon le spécialiste : “C'est facile à faire et, l'intérêt de la soupe, c'est qu'on va faire cuire nos légumes dans l'eau, évidemment pas trop longtemps pour éviter de détruire les vitamines, et ensuite on mixe dans l'eau et on boit l'eau de cuisson. Un légume, quand vous le faites cuire dans de l’eau, il va libérer des vitamines et des minéraux, c'est-à-dire des micronutriments intéressants pour nos systèmes de défense, notamment en hiver. Ils vont s'échapper dans l'eau. Si vous mettez l'eau à l'évier, vous perdez évidemment tous ces micronutriments intéressants, alors que la soupe, vous mangez tout.” Selon le professeur Walrand, ces micronutriments sont très importants pour nos défenses naturelles : “On sait que le système immunitaire, le système de défense, comme on l'appelle, est très tributaire des micronutriments. Si on a des déficiences en micronutriments, en zinc, en cuivre, en fer, en vitamine E... On sait que la réponse immunitaire est diminuée."
Consommer des aliments riches en Oméga 3
“On sait que dans la population, tout le monde a certaines déficiences nutritionnelles, par exemple, certains acides gras. Vous avez entendu parler des Omégas 3 par exemple, ces acides gras qu'on appelle polyinsaturés. Ils sont très importants aussi pour le système immunitaire. Or, toute la population est déficitaire en Oméga 3. Les Omégas 3 régulent l'inflammation, l'immunité et évidemment l'hiver on en a besoin”, constate le professeur Walrand. Voici les aliments qu’il conseille : “Les sources d'Oméga 3, ce sont les huiles végétales, surtout de l'huile de colza et l'huile de noix. Il y a aussi les poissons gras comme le saumon, le thon, le maquereau ou la sardine. Je recommande de manger une fois par semaine du poisson gras ou, dans les vinaigrettes, utiliser de l'huile de colza ou de noix pour renforcer ses statuts en Oméga 3."
Trouver des sources de vitamine D
Un autre élément important est la vitamine D. Vous avez sûrement entendu parler de cette vitamine du soleil. Selon le spécialiste, toute la population est déficitaire en vitamine D, “mais encore plus l'hiver”. Il explique : "'Le problème de la vitamine D, c'est que c’est la vitamine du soleil, c’est-à-dire qu’elle est fabriquée dans notre peau sous l’effet des rayonnements solaires. L'été, je sors en manche courte ou en short, je fais de la vitamine D sans problème mais l'hiver, toute la population est déficitaire en vitamine D. Or, la vitamine D régule le système immunitaire.” Mais alors, comment en trouver ? “Le problème de la vitamine D, c'est qu'on en a très peu dans les aliments. Il y en a beaucoup dans le foie de morue mais on n’en trouve plus trop dans les magasins. On a des produits laitiers qui sont enrichis en vitamine D également : des yaourts ou du lait. La troisième façon d'avoir sa vitamine D, c'est d'aller à la pharmacie et de prendre un complément alimentaire. On complète l'alimentation par quelque chose qu'on ne retrouve pas ou en trop faible dose dans notre alimentation.” La vitamine D agit non seulement sur le système immunitaire mais aussi sur le moral. Un bon apport en vitamine D peut permettre de pallier les baisses de moral liées au manque de luminosité.
Choisir des fruits et légumes colorés
Si en hiver, le choix de fruit et légumes est plus limité, pas question de s’en passer pour Stéphane Walrand : “Ce n'est pas parce qu'on est en hiver qu’il faut arrêter les 5 fruits et légumes par jour. Les fruits et légumes sont le support des micronutriments. C'est par ces aliments là qu'on apporte les micronutriments qui nous aident à réguler notre système immunitaire.” Les fruits et légumes estivaux, très colorés, apportent des pigments et notamment des caroténoïdes qui se transforment ensuite en vitamines dans l’organisme. “L'hiver, on a beaucoup moins de choix sur les couleurs de fruits et légumes, on a donc un éventail de caroténoïdes beaucoup moins intéressant, et ces caroténoïdes sont aussi des régulateurs de notre système immunitaire. Il faut varier les fruits et légumes. Pour être le plus efficace possible, je recommande de les choisir de couleurs différentes. Quand vous changez la couleur d'un fruit ou d'un légume, vous changez son profil en vitamine.”
Privilégier les surgelés aux conserves
Si vous n’arrivez pas à trouver votre bonheur dans les fruits et légumes frais de saison, le professeur Walrand recommande les surgelés : "Dans le classement de la qualité des fruits et légumes, je mets l'aliment frais au même niveau que l'aliment surgelé en termes de composition nutritionnelle. Les opérateurs industriels qui font le surgelé ont un cahier des charges très strict qui fait qu'ils vont cueillir l'aliment et, quelques heures plus tard, l'aliment est surgelé. C’est très intéressant. Il vaut mieux un bon aliment surgelé par rapport à des aliments en conserve. Le chauffage et la pression qu'on met sur les aliments pour faire une conserve peuvent provoquer la perte d'un certain nombre de vitamines. En revanche, il vaut toujours mieux que les gens mangent des légumes en conserve plutôt qu’aucun légume, évidemment.”
Manger des yaourts
Outre l’apport en calcium, les yaourts sont également les alliés du système immunitaire : “L'hiver, on mange du yaourt pratiquement à chaque repas pour garder son microbiote, c'est très important pour se défendre contre les aléas infectieux de l'hiver. Ce sont les bactéries qui sont dans nos intestins et à d'autres endroits de notre corps. Il faut qu'on ait un bon microbiote équilibré et les yaourts aident ce microbiote à nous protéger des bactéries ou des virus pathogènes de l’hiver”, indique le docteur.
Pratiquer une activité physique
Selon le professeur Walrand, “Pour être très préventif sur la baisse de moral ou la baisse d’immunité, l'activité physique marche vraiment très bien. Je recommande 30 min de marche par jour pour les gens qui ont le temps mais ça peut être 3 fois 10 min ou 6 fois 5 min : je me gare un peu plus loin que mon rendez-vous, je vais chercher ma salade à midi à pied... En plus de ça, une fois par semaine au moins, je conseille 40 à 45 min d'une activité physique un peu renforcée. Ça peut être de la course à pied, du vélo ou une marche rapide par exemple. Ce n’est pas parce qu'il fait froid dehors qu'il ne faut plus le faire, au contraire. C'est valable à tous les âges, c'est valable pour tout le monde.” En effet, selon lui, la pratique du sport est bonne pour le système immunitaire : “Les bienfaits de l'activité physique sur l'immunité sont compliqués à expliquer. Ils passent par le fait que l'activité physique va diminuer la composante inflammatoire et va renforcer les barrières de l'organisme, c'est à dire la barrière intestinale, la barrière pulmonaire... L’activité physique va aussi être positive pour le microbiote.” L’activité physique a également des bienfaits sur la santé mentale, selon le professeur : “Quand on fait du sport, on produit des hormones dans le cerveau, qu'on appelle les endorphines. Ce sont les hormones du bien-être. Et donc évidemment, c'est bon pour le moral !”
Il recommande en revanche de rester prudent et attentif aux symptômes : "Il n’y a pas de miracle. On ne va pas traiter une dépression ou une grippe avec l'alimentation. C'est très important de le dire parce qu'il y a des gens, quand on parle de super aliments par exemple, qui se disent : “Si je mange ça, je ne vais rien attraper”, voire même “Je vais être soigné”. Ce n’est pas vrai. Par contre, on peut essayer de prévenir au maximum en renforçant l’immunité, grâce à une bonne alimentation.” En cas de doute, consultez un médecin.