Témoignages : comment des réfugiés politiques installés à Clermont-Ferrand vivent la crise du Covid 19

Venus de Syrie, du Congo ou d’Érythrée, Rabab, Souzan, Merry et Pitshou ont fui la guerre et les persécutions. Réfugiés politiques ils se sont installés à Clermont-Ferrand pour construire une nouvelle vie. Ils nous livrent leurs témoignages sur la crise sans précédent que traverse notre pays.

A l'automne dernier nous avions rencontré Rabab, Souzan, Merry et Pitshou dans le cadre d'un magazine télévisé sur l'intégration en France des réfugiés politiques. Venus de Syrie, du Congo ou d’Érythrée, tous nous avaient racontés leurs parcours, leurs difficultés, le drame de l'exode mais aussi leurs espoirs et leur volonté de construire une nouvelle vie en France à Clermont-Ferrand. Une émission à revoir ici .
Quelques mois plus tard et alors que notre pays traverse une crise sans précédent nous avons voulu savoir comment ils vivaient cette période. Des témoignages réalisés au téléphone quelques jours après le début du déconfinement.

Être confinée avec l’électricité, internet et le chauffage, c'est confortable


Rabab Kheidar est née en 1972 en Syrie au sein de la communauté chrétienne. Depuis 2017, fuyant Alep en guerre elle vit à Clermont-Ferrand avec son fils étudiant. Professeure remplaçante d'anglais au lycée Massillon elle a continué pendant le confinement à assurer ses cours sur internet, appréciant de trouver ses élèves très motivés.
Appréciant aussi de pouvoir prendre enfin un peu de temps pour elle, les trois dernières années ayant été particulièrement compliquées, de la fuite des bombardements en Syrie à l'obtention du statut de réfugié politique. Un passé difficile qui lui fait relativiser la dureté du confinement.
« Quand on est confiné avec l'électricité, internet, le chauffage c'est confortable. L'hiver en Syrie sous les bombes et sans chauffage c'est beaucoup plus difficile. »
« En France vous avez, nous avons, de la chance, le chômage partiel, la sécurité sociale, tout ça n'existe pas en Syrie. Les gens doivent sortir pour aller travailler, sinon ils ne mangen
t pas. »

Le confinement comme une occasion de souffler


Souzan Adlo partage ce sentiment. Cette réfugiée syrienne d'origine kurde, maman d'une petite fille, a vécue le confinement comme un répit. Fuite de la Syrie pour la Turquie en 2014, naissance de son fils, arrivée en France, obtention du statut de réfugié, recherche d'un emploi, après cinq années de courses ininterrompues, le confinement a été l'occasion de souffler, de s'occuper de sa famille.
«Nous avons sans doute été moins traumatisés par le confinement que ceux qui n'ont pas déjà vécu comme nous des périodes vraiment difficiles. Nous pouvions rester à la maison, on avait tout, confort, nourriture. En Syrie c'était beaucoup plus difficile »

La guerre ce n'est pas ça


Comme Rabab, Souzan a trouvé très exagéré la phrase d'Emmanuel Macron, le fameux « nous sommes en guerre ». « Nous vivons une situation très compliqué » souligne Souzan. Rabab évoque « une crise qui paralyse le monde entier » mais toutes les deux l'affirment «  on ne peut pas appeler ça la guerre ».

Néanmoins souligne Souzan le confinement a fragilisé la situation de beaucoup de personnes, migrants, sans papiers, mineurs non accompagnés, la fermeture des frontières a bloqué les gens dans des camps. Tout en continuant a assurer à distance ses cours sur les migrations à l’Université Clermont Auvergne, la jeune femme s'est investi sur le portail collaboratif Refugiés.info mis en place en partenariat avec l'UNHCR, l'agence des nations unies pour les réfugiés. Souzan a par exemple assuré des traductions pour faciliter les démarches de la vie quotidienne.

J'ai travaillé tous les jours 


Pour Merry la vie n'a jamais été facile. Orpheline, la jeune réfugiée érythréenne, passée par le Soudan, les camps grecs et la jungle de Calais est d'abord arrivée à Pessat-Villeneuve dans l'Allier avant de s'installer à Clermont-Ferrand une fois son statut de réfugié politique obtenu. Quand nous l'avions rencontrée la jeune femme vivait avec son fils et son mari dans un minuscule appartement de la place du Mazet à Clermont-Ferrand. Depuis elle a déménagé dans un appartement plus grand du coté des Salins, et c'est là qu'elle a vécu le confinement, une période stressante pour la jeune maman.« Il y a des fois où j'étais pas bien, je n'avais pas le moral »
Merry travaille dans un foyer d'urgence de l'association CeCler. Elle fait le ménage et prépare les repas. Pour elle pas de télétravail possible. « J'ai pris le bus et j'ai travaillé normalement tous les jours. Il faut bien que les résidents mangent. On a fait très attention, on a mis des masques pour se protéger. »
Une période difficile qui en rendant les démarches administratives plus compliquées a aussi retardé la demande d'asile de son mari.

Tu penses à ta famille et c'est très dur


Le confinement a également retardé les démarches de Pitshou. Originaire du Congo Kinshasa, le jeune homme a du fuir son pays pour des raisons politiques. Arrivé un peu par hasard à Clermont-Ferrand et après pas mal de déboire il a obtenu le statut de réfugié. Il cherche depuis à obtenir un visa pour son épouse et ses cinq enfants. Et pour cela il lui faut un travail.
Nous l'avions rencontré alors qu'il suivait une formation en maintenance industrielle, il est désormais en stage dans une usine Michelin à Avallon, petite ville de Bourgogne. Un stage qui a commence une semaine avant le confinement et qui s'est donc très vite interrompu. Pitshou s'est retrouvé complètement isolé dans une ville où il ne connaissait personne.
« Des fois tu penses à ta famille et c'est très dur. En Afrique au début on pensait qu'il y aurait beaucoup de morts, ça me faisait très mal ».

Tu as quitté l'Afrique pour fuir les problèmes et les problèmes te poursuivent 


Pitshou poursuit : « Et si j'attrapais la maladie ? Tu as quitté l'Afrique pour fuir les problèmes et les problèmes te poursuivent »
Heureusement la famille de Pit shou va bien. Lui-même vient de reprendre le chemin de l'usine pour finir son stage. Il doit revenir à Clermont-Ferrand à la fin du mois de juin et il espère en profiter pour relancer les démarches afin de revoir enfin sa femme et ses enfants.





 
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