Le mercredi 25 septembre est la Journée nationale d’hommage aux harkis. A cette occasion, Mohand Hamoumou, docteur en sociologie et maire de Volvic, dans le Puy-de-Dôme, revient sur la nécessité du devoir de mémoire.
Depuis 2003, la Journée nationale d’hommage aux harkis se tient le 25 septembre. Cinquante-sept ans après la fin de la guerre d’Algérie, leur sort reste encore une plaie à vif. Mohand Hamoumou, docteur en sociologie, professeur à Grenoble Ecole de Management et maire de Volvic, dans le Puy-de-Dôme, a écrit plusieurs ouvrages à ce sujet. Il a ainsi fondé l’association AJIR, Association Justice, Information, Réparation. Il souligne l’importance de la notion de reconnaissance et cite Dominique Schnapper, qui a préfacé l'un de ses ouvrages : « L’épisode des harkis constitue une page honteuse de l’histoire de France, comme le statut des juifs ou la rafle du Vél d’Hiv".
Par harkis, le sociologue désigne les anciens harkis, intégrés dans les unités militaires, précieux pour leur connaissance du terrain, mais aussi les anciens notables (caids, bachaghas,) qui servaient l’administration française, les administratifs menacés par le FLN et les militaires de carrière. Ce sont là « tous les gens de souche arabo-berbère menacés par le FLN pour leur engagement avec ou pour la France. Il faut savoir aussi que la population était prise en étau, avec d’un côté la violence terroriste du FLN, et de l’autre la guerre subversive menée par l’armée française. Pris entre deux feux, certains sont devenus harkis pour protéger leur famille » explique Mohand Hamoumou. "Les « harkis » regroupent donc une population hétérogène. C’est l’histoire qui en fait une communauté de destin ".
Il ajoute « Quelles que soient les raisons, ils ont rempli leur part du contrat, de défendre la population, de servir l’armée française. Le nœud du problème est que l’Etat n’a pas rempli sa part du contrat. Les Accords d’Evian prévoyaient que personne ne serait inquiété, que les biens et les personnes seraient protégés. L’armée présente jusqu’en 1964 n’a pas fait respecter les accords d’Evian. On a laissé des gens se faire massacrer. Le rapatriement des anciens harkis n’était ni prévu, ni voulu. Cet abandon a longtemps été caché ». Le maire de Volvic rappelle qu’il a fallu attendre Jacques Chirac pour qu’un président français reconnaisse que « La France n’a pas su sauver ses enfants ». Depuis, chaque président a apporté sa pierre au travail de vérité. Ainsi, Nicolas Sarkozy a reconnu la responsabilité du gouvernement français dans l’abandon d’une partie des harkis et François Hollande a admis la responsabilité du gouvernement français.
On a laissé des gens se faire massacrer
Cette communauté attend désormais des décisions fortes de la part du président Emmanuel Macron, qui, en tant que candidat a dit qu’il ouvrirait le dossier. Le maire de Volvic rappelle que "Geneviève Darrieussecq, Secrétaire d’Etat auprès de la ministre des Armées, a dit dans son discours du 25 septembre 2019 que le président entend poursuivre le travail de reconnaissance et de réparation ». Mohand Hamoumou souligne que la reconnaissance et la réparation sont essentielles. Il rappelle : « Par reconnaissance, il faut témoigner de la gratitude à l'égard des gens qui ont pris des risques, qui ont souvent payé de leur vie ou qui ont été parqués dans des camps. Il faut une reconnaissance des fautes commises et ensuite passer à la réparation, et donc préalablement évaluer les préjudices subis». Pour le sociologue, la réparation est une question délicate. Il indique : « Il y a des choses qui ne se réparent pas, comme la perte d’un enfant mort de froid, il y en a eu 11 à Bourg Lastic, comme les massacres en Algérie, comme les vies gâchées parce qu’on a été enfermé 13 ans dans un camp. Le processus de réparation doit commencer par l’évaluation des préjudices subis, matériels et moraux. Il faut mettre en place une commission d’évaluation avec des hauts magistrats, des assureurs. La réparation est aussi symbolique ».Poursuivre le travail de reconnaissance et de réparation