Dans le Puy-de-Dôme, l’Agglomération des pays d’Issoire détient trois stations-essence. Un service dédié aux habitants qui vivent dans des zones isolées mais aussi aux touristes de passage.
Comment faire le plein d’essence quand on habite un territoire éloigné de tout ? C’est pour répondre à cette question que l’Agglomération des pays d’Issoire (API) a décidé de reprendre en main 3 stations-service, il y a un peu moins de 10 ans. Trois automates fonctionnent ainsi à Ardes-sur-Couze, Anzat-le-Luguet et au Vernet-Chaméane. Emmanuel Correia, maire (MoDem) d’Anzat-le-Luguet raconte : « La station-service a été mise en service une première fois en 2014. Mais elle a été fermée car il n’y avait pas de système de cartes. Elle a rouvert en automate en 24 heures sur 24 en 2018 ». Pour le maire, il est essentiel de maintenir ce service : « C’est une commune qui est assez éloignée, avec pas mal de personnes de passage. Il y en a qui sont contents de trouver une pompe pour faire le plein car ils ne s’attendent pas à avoir une zone avec aussi peu de pompes. Cela répond aussi aux attentes des gens qui sont sur place et qui ne veulent pas aller trop loin pour faire le plein. Il y a aussi des personnes qui ont des véhicules qui restent ici. Ils sont contents de trouver une station ici plutôt que de faire trop de kilomètres ».
Les habitants apprécient ce service
Le maire ajoute : « C’est un peu plus cher qu’en grande surface mais quand vous n’avez pas besoin de faire un déplacement, ça vaut largement la différence. Les habitants apprécient ce service. Ils y trouvent leur compte. Sinon la station la plus proche est à 17 km ». Pour l’approvisionnement des stations-service d’Ardes-sur-Couze et d’Anzat-le-Luguet, la collectivité passe par un marché public de carburant lancé en 2018. C’est un partenaire local indépendant, grossiste en carburant basé à Cournon-d’Auvergne, près de Clermont-Ferrand, qui vend et achemine l’essence tous les mois. De janvier à septembre 2021, on a relevé 620 transactions par mois à Ardes-sur-Couze contre 153 par mois à Anzat-le-Luguet. C’est la preuve qu’il existe une demande.
Ce sont des territoires qu’on essaie de développer et de redynamiser
Bertrand Barraud, président (LR) de l’Agglomération des pays d’Issoire, indique : « On essaie d’aller dans des territoires où malheureusement le privé n’arrive plus à trouver la fréquentation et la rentabilité suffisantes. Or il y a encore des gens qui y habitent. Ce sont des territoires qu’on essaie de développer et de redynamiser. Le fait de redescendre à chaque fois dans la vallée pour trouver de l’essence était vraiment un handicap pour les habitants de ce territoire, sur le secteur Haut Livradois ou sur le secteur du Cézallier. Sur le secteur du Cézallier, ça fait 10 ans qu’on a repris la gestion ».
Une opération blanche
L’Agglomération des pays d’Issoire ne fait pas de bénéfices en gérant ces stations-service, mais ne connaît pas de pertes pour autant. « Ce n’est pas une mauvaise opération pour nous. C’est une opération blanche. Ce que nous rapportent les recettes liées au carburant, soit 9 centimes par litre, couvre les frais que l’on a. Même si ce sont des automates, il faut bien sûr entretenir les pompes, acheter le carburant. L’opération est blanche mais nous permet d’assurer un service qui n’existerait plus sur ces territoires » souligne Bertrand Barraud. Le président de la collectivité tient à pérenniser ce service : « A partir du moment où cela ne nous coûte rien et que la consommation est au même niveau qu’actuellement, il n’y a pas de raison qu’on arrête. Le matériel est de bonne qualité, identique à celui qu’on peut trouver ailleurs. Il n’y a pas de dépense de personnel importante car tout est automatisé. On a la volonté de continuer à moins que l’Etat s’empare du sujet et propose des aides spécifiques pour l’implantation de services multiples ».
On doit être à 10 à 15 centimes le litre plus cher
Pour la gestion des stations-service, il y a une régie directe sur Ardes-sur-Couze et Anzat-le-Luguet et une délégation de service public avec un garage au Vernet-Chaméane. Même si les prix sont plus élevés que dans la grande distribution, les habitants y trouvent leur compte. Bertrand Barraud insiste : « L’essence est un petit peu plus coûteuse qu’elle ne l’est en vallée. On doit être à 10 à 15 centimes le litre plus cher. Cela permet d’éviter de tomber en panne car quand on est à Anzat-le-Luguet on est à une demi-heure d’une autre station. Il peut y avoir quelques étourdis qui ne font pas attention et qui sont bien contents de trouver de l’essence. On note une hausse de fréquentation l’été donc il y a aussi des touristes qui en bénéficient. Cela joue sur l’attractivité de ce territoire. Les habitants qui habitent ces zones éloignées font peut-être le plein dans la vallée car c’est moins cher. Ils doivent beaucoup rouler. En termes de pouvoir d’achat, je pense qu’ils essaient de prendre l’essence au maximum où c’est moins cher mais de temps en temps, à titre civique je dirais, pour continuer à avoir une pompe près de chez eux, ils prennent de l’essence dans nos stations. L’usage n’est pas prépondérant pour les gens mais c’est une solution de secours qui est vitale ».
La mission des collectivités
L’élu rappelle le rôle des collectivités envers les territoires : « Les collectivités sont là pour apporter le plus grand soutien aux habitants du territoire, et notamment à ceux qui sont les plus en difficulté, par l’éloignement de l’A75. Notre politique consiste à dire qu’on ne peut pas abandonner les territoires. Sur les hauteurs du Cézallier ou du Livradois, si on n’est pas là, il n’y aura personne. On est le dernier rempart pour qu’il y ait des services comme celui-ci ». Un autre sujet préoccupe Bertrand Barraud : « Dans les années à venir, on va avoir le même problème avec les distributeurs automatiques de billets (DAB). On se rend compte qu’il y a des territoires que les collectivités ne doivent pas laisser car plus aucune banque n’est volontaire pour y mettre des DAB ». Il conclut : « Il y a aussi le problème des bars et des commerces qui disparaissent. On n’a que 56 communes sur 88 où il y a encore un commerce. On ne trouve plus de lieux où il y a des échanges. L’Agglomération des pays d’Issoire est en train d’organiser un happy truck, un bus qu’on va équiper et qui amène des services. Cela fonctionnera début 2022 ». L’élu rappelle aussi la nécessité de maintenir une bonne couverture numérique, en fibre et en téléphonie, afin de n’oublier aucun territoire.