L'association écologiste "Legambiente" a dressé, mi-mars, un état des lieux de l'économie du ski en Italie. A l'heure du réchauffement climatique, elle a établi une cartographie des stations au futur incertain.
Entre les 150 nouveaux projets qui menacent des zones classées "Natura 2000", les 234 remontées mécaniques mises à l'arrêt (54 de plus que l'an dernier), et les 149 cas de stations maintenues en vie par "acharnement thérapeutique", le panorama de l'économie de "l'or blanc" transalpin a toutes les allures d'un grand malade. Du moins si l'on en croit l'association apolitique italienne "Legambiente".
A l'occasion de la "journée italienne des paysages", la première association écologiste italienne a choisi de diffuser les conclusions de son rapport 2022.
"Les projets de remontées tombent à gros flocons mais sans neige", s'étonne notamment les auteurs du rapport qui redoutent "des paysages prochainement soumis à de grosses modifications si l'on en croit le nombre de projets annoncés".
Des projets en basse altitude
D'après l'association au "cygne vert", comme l'appellent nos voisins, des projets de remontées mécaniques menacent directement des sites protégés "Natura 2000" par l'Europe. "En majeure partie, (il s'agit) des agrandissements de domaines skiables déjà existants", explique Vanda Bonardo, qui est aussi présidente de la branche italienne de CIPRA (Conférence internationale pour la protection des Alpes).
"Mais ce qui pose question, c'est le grand nombre de projets situés à des altitudes très basses : là où la neige se fait, d'année en année, toujours plus rare", s'inquiète-t-elle.
Des fonds européens posent question
"Ce qui complique tout, c'est l'arrivée imminente des fonds de relance européens", explique encore le rapport. En ligne de mire : des projets comme l'agrandissement d'un domaine skiable dans les Monti Sibillini, en Italie centrale. Plus de 65 millions d'euros d'investissements pour une station dont le sommet le plus haut dépasse difficilement les 2 000 mètres d'altitude.
Mais le nord italien, n'échappe pas à la chasse à la manne européenne. Au Col de Joux, par exemple, en vallée d'Aoste, le conseil communal vient de décider de remettre en marche des remontées à l'arrêt depuis plusieurs saisons faute de neige.
"Il faut absolument que les fonds du plan de relance européens soient adressés aux actions les plus innovantes et éco-compatibles", explique encore Vanda Bonardo. "Ce ne sera possible qu'en finançant des projets qui mettent l'environnement au premier plan. Il n'y a que de cette façon que l'on assurera un développement durable de nos montagnes".
149 stations en "acharnement thérapeutique" dont 15 dans le Piémont
Le cas de nos voisins piémontais est particulièrement révélateur. "Dans notre région, la montagne est trop souvent considérée par les politiques comme une aire de jeux pour le tourisme d'hiver de masse, explique pour sa part Giorgio Prino, le président régional de Legambiente. Tout l'argent public investi dans ce sens n'est qu'un acharnement, ni soutenable économiquement, ni du point de vue de l'environnement. Nous payons encore l'ivresse olympique des Jeux de 2006. Et il ne faudrait pas répéter les mêmes erreurs."
Bilan de l'année : 32 remontées fermées définitivement, 10 autres arrêtées temporairement, et 15 moribondes, en sursis grâce au soutien de fonds publics.
Le rapport propose, pour conclure, 10 cas "vertueux" reflétant des pistes valables de développement pour l'avenir. Des Dolomites à la Sicile et jusqu'à notre voisine : la Vallée d'Aoste. C'est là que l'association "Naturavalp", promeut un tourisme responsable sur les Alpes. Une démarche soutenue et récompensée par des organismes Onusiens comme la FAO (Organisation pour l'alimentation et l'agriculture), ou l'UNWTO (Organisation mondiale du Tourisme).
Des initiatives pour le ski et l'environnement
Autre initiative chez nos proches voisins : celle du Consortium touristique de la Vallée Maira dans le Piémont. Il offre aux touristes de toute l'Europe la possibilité de pratiquer ski de randonnée, ski alpinisme et ski de fond dans des lieux à haute valeur environnementale.
"Les effets du réchauffement climatique et de la pandémie nous enseignent que la protection de la nature est le seul moyen d'échapper à la roulette russe des catastrophes", conclut pour sa part Sebastiano Venneri, le responsable tourisme de "Legambiente". "Le bon usage de nos montagnes, basé sur le ski de fond, l'escalade, la marche, les structures d'accueil douces, montrent qu'une nouvelle approche est possible."