Chantal Gomez est une retraitée âgée de 64 ans, ancienne dessinatrice technique. Elle a déjà été plusieurs fois candidate à diverses élections, dont les dernières régionales en 2015. Elle sera à nouveau la tête de liste du parti "Lutte ouvrière" aux élections régionales prévues en juin 2021
"Faire entendre le camp des travailleurs", tel est le nom des listes qui représenteront Lutte ouvrière à ce scrutin. La tête de liste en Auvergne-Rhône-Alpes Chantal Gomez ne le cache pas. Elle ne s'imagine pas devenir la future présidente de la région. "Cette élection va surtout permettre à ceux qui se reconnaîtront dans notre discours de se compter. Dans ces élections, on vient surtout défendre nos idées. Je n'ai pas un programme spécial pour la région. Moi, je veux surtout m'adresser aux travailleurs et travailleuses." explique-t-elle d'emblée.
Mettre la crise sanitaire au premier plan
La candidate veut surtout mettre en avant ce qu'elle considère comme une priorité pour ses électeurs : la crise sanitaire, et économique "qui ne date, elle, pas d'aujourd'hui" précise-t-elle. "Ce que je veux surtout dénoncer au sujet de la crise sanitaire qui a débuté il y a un an c'est le fait que, si les travailleurs ont démontré qu'ils étaient indispensables, en allant au front, comme le dit Macron, dans cette guerre contre le virus -notamment les plus mal payés : soignants, caissières, aides à domicile, femmes de ménage- le gouvernement, lui, a fait la démonstration de son incurie. On a eu des décennies de coupe budgétaire. Les services hospitaliers sont toujours débordés par l'afflux des patients. La pandémie n'a absolument pas servi à renforcer les services hospitaliers. Rien n'a été fait."
Le marché et la gestion capitaliste, "un obstacle à la lutte contre la pandémie"
Le sujet dépasse de loin les compétences de la Région. Mais cela ne dérange pas notre candidate, qui souhaite aller plus loin : "Au-delà des gouvernements en général, on veut dénoncer cette économie capitaliste qui a montré qu'elle était incapable de répondre aux défis posés par un minuscule virus. Et ce, malgré les prouesses des scientifiques, qui ont pu découvrir des vaccins très rapidement. Le scandale, c'est l'insuffisance des doses de vaccin. Ils ne sont pas fabriqués par les laboratoires pharmaceutiques. Cela montre à quel point le marché, la loi du profit et la gestion capitaliste sont des obstacles à la lutte contre cette pandémie. Aucun dirigeant n'est prêt à demander des comptes à ces grands groupes pharmaceutiques qui font la pluie et le beau temps, en étant arrosés de milliards de subventions publiques. C'est le cas de Sanofi, qui est dans la région, et qui n'est même pas capable de sortir un vaccin." Et elle propose une solution : "Il faudrait, sous peine de réquisition, les contraindre à faire les investissements nécessaires, et à céder leurs brevets pour que d'autres produisent leurs vaccins. Bien sûr, tout cela sous le contrôle des travailleurs".
Cette Région est gérée comme le gouvernement. Vous pouvez y retrouver les mêmes tares.
Une introduction très claire... Mais qui n'a pas beaucoup de rapports avec les élections régionales. Ce que reconnaît volontiers Chantal Gomez, qui rétorque : "Nous, on veut parler de cette crise économique et sanitaire car c'est cela qui est important." Et, au passage, elle ne voit pas en quoi la Région diffère de l'action gouvernementale. "Cette Région est gérée comme le gouvernement. Vous pouvez y retrouver les mêmes tares. On découvre que Wauquiez vient de décider de verser 25 millions d'euros d'argent public à un fonds souverain, qu'il vient de créer avec le Medef pour aider les entreprises face à la crise. Je trouve cela scandaleux. Comme si tous les milliards que l'Etat a déjà donné ne suffisaient pas, il en rajoute un peu. Quand on connaît, dans notre région, les besoins en service public, les transports, les lycées, le logement etc... Ces 25 millions vont manquer à ce niveau-là. Donc c'est un vol de l'argent de la collectivité."
La lutte comme seul programme électoral
Alors comment aider les travailleurs dans notre région Auvergne-Rhône-Alpes ? Quelles sont, par exemple, les propositions de "Lutte ouvrière" pour venir en aide à un des secteurs les plus importants et les plus impactés par la crise : le secteur de la montagne ? "Moi, ma seule proposition, en tant que militante, c'est de leur dire que, de toute façon, on n'aura rien si on ne lutte pas. Plein de catégories sociales se sont fait entendre à juste titre, comme les restaurateurs, les commerçants... et cela sera pareil pour les travailleurs. Il va falloir exiger que, malgré cette crise, on ne touche pas à la paye, notre revenu, notre emploi. C'est en imposant notre droit au patron et au gouvernement que l'on peut y arriver." Ce qui ne répond pas spécifiquement à la question... Mais la candidate balaye cet argument "Tous ceux qui proposent un programme ne pourront pas, de toute façon, l'appliquer. D'abord parce qu'ils ne le veulent pas et aussi parce qu'ils se heurtent aux intérêts de tous ces patrons du tourisme, de l'hôtellerie. Ces derniers n'embaucheront pas. En plus, ils ont des aides de l'Etat en ce moment qui coulent à flot, donc il n'y a pas de raison. C'est aux travailleurs de se faire entendre."
Lycée : "Mobiliser les enseignants et parents d'élèves"
Autre compétence régionale : la gestion des lycées. Quelles seraient les idées de la liste "Lutte ouvrière" dans ce domaine ? "C'est la même chose. Il y a eu de nombreuses luttes des enseignants qui montrent à quel point, aujourd'hui, ils sont le parent pauvre de l'Etat. Une fois de plus, on ne pourra compter que sur la mobilisation des enseignants avec les parents d'élèves. Et puis cette dette, qui est en train de gonfler, à coups de milliards d'aide donnés aux capitalistes, il va falloir la payer. Donc on peut parier que, après cette année, on va commencer à se serrer la ceinture à tous les niveaux des services publics. Donc, tous ceux qui ont des beaux programmes au niveau de la Région ne pourront y faire. Les subventions de l'Etat vont diminuer pour payer les intérêts de la dette et les banques. On sait très bien que, que ce soit la gauche ou la droite, chacun a fait sa démonstration d'une incapacité à gérer la crise économique."
Pour réparer les maux, Chantal Gomez propose que "l'on embauche et que l'on répartisse le travail entre tous. Du bulot, il y en a plein les lycées, les transports, les hôpitaux. Donc il faudra embaucher sans toucher aux salaires, voire les augmenter. C'est le programme qu'on défendra pour les travailleurs dans cette campagne régionale", répète à nouveau la tête de liste.
Transports : embaucher pour renforcer les services
Quid des transports ? Certaines liaisons ferroviaires posent toujours des problèmes, notamment entre Clermont-Ferrand et Lyon, par exemple. "Lutte ouvrière" a peut-être des idées pour permettre aux travailleurs de voir ce service s'améliorer ? "Quand je vois qu'une ville comme Grenoble, qui se targue d'être écolo, avec un maire, Eric Piolle qui avait promis des transports moins chers et plus nombreux... fait le contraire, avec cette crise du Covid et diminue l'offre. Les gens sont entassés le matin pour aller travailler et attendent les correspondances. On connait aussi la situation à la SNCF, dans les TER... Il faut embaucher, renforcer tous ces services utiles à la population. Ce qui, encore une fois, passera par la lutte des travailleurs car on ne nous donnera rien. Il faudra l'imposer par le rapport de force, par les mobilisations, pour que les travailleurs ne soient pas les grands perdants de cette crise."
Une remise en cause complète du système avec un contrôle par les travailleurs
Inutile d'insister et de réclamer des propositions précises sur les dossiers qui incombent au pouvoir régional. Chantal Gomez ne s'en cache pas, elle ne sera certainement pas la future présidente : "Je reste réaliste, vus nos scores. Moi je veux défendre un programme de lutte pour montrer que, finalement, les travailleurs au pouvoir, au niveau régional, national ou mondial, ce serait beaucoup plus efficace. Aujourd'hui on fête le 150e anniversaire du début de la Commune de Paris. Quand vous voyez ce que les prolétaires à Paris en 1871 ont pu faire... aucun gouvernement aujourd'hui n'en est capable. On sait très bien que seuls ceux qui font tourner la société -les travailleurs- sont capables de gérer cette société. Il faudra donc qu'ils se posent la question du pouvoir. Ils doivent montrer leur indignation, défendre leurs droits, contrôler cette économie, imposer des contrôles aux patrons. C'est une remise en cause complète de ce système que l'on veut réclamer dans ces élections"