Un nouveau report-le 4e- dans le procès des 2 policiers lyonnais accusés de passage à tabac en marge d'une manifestation. En décembre 2019, Arthur Naciri avait été plaqué au sol et roué de coups au visage. Une scène ultra-violente-filmée- qui avait suscité un vague d'indignation sur fond de violences policières présumées...
Cet après-midi, Arthur Naciri est à bout. Son audience prévue depuis 1 an devant le tribunal judiciaire de Lyon a dû être reportée car une autre audience pour des vols à main armé dans des Établissements Mac Donald qui allaient demander de longues heures de débat, était planifiée à la même heure dans la même salle d'audience. Plus de deux ans après avoir gravement blessé par un brigadier et un gardien de la paix qui doivent répondre de "violences volontaires" et après plusieurs reports, le jeune homme voit une nouvelle fois ses chances de procès s'éloigner...
Des menaces face caméras au sein du palais de justice
Le temps que les journalistes présents dans la salle des pas perdus se préparent pour leur interview, un homme qui fait partie du groupe des mis en cause s'approche très près du jeune homme et met un doigt sur sa bouche, une intimidation flagrante pour qu'il se taise. "C'est la honte ! J'espère que vous avez filmé ! Menacé ici au sein d'un palais de justice" L'assemblée est choquée par ce geste. La colère gronde.
"Le temps qu'ils ont pris à faire le report, nous, on aurait fait le procès"
Arthur Naciri se remet de la scène qu'il vient de vivre. Estomaqué. Mais le combat qui l'anime est plus fort. Il reprend vite ses esprits et se tourne vers les journalistes. "Moi, je veux pouvoir vivre moi aussi. Ça fait 4 fois qu'on vient. 4 fois qu'on prépare, qu'on travaille. On ne pense qu'à ça !"
La prochaine séance a été reportée en septembre. "Je vais passer tout mon été à penser à ça !" explique Arthur. L'incompréhension le gagne face au fait d'avoir calé deux audiences simultanément. "Ils sont nuls !" s'écrit-il en pointant du doigt la salle d'audience qu'il vient de quitter.
Le jeune homme est en pleine confusion face à l'inaction du système judiciaire. Pour lui, les images de la scène sont imparables, incontestables. "A chaque fois, ils mettent 2 heures à nos faire des reports. Nous, on est là, on, leur montre les images. En 30 minutes c'est réglé". Face à sa détresse, son père brandit la photo du visage de son fils en sang imprimée en grand format.
Le silence de la justice
Son avocat, même s'il explique en partie les événements par le manque d'effectifs de la justice, est tout aussi perplexe devant ce report. "Les 2 prévenus travaillent et partent en vacances visiblement. Ils ont une vie tout à fait normale. Par contre pour mon client, il y a l'attente, il y a l'espoir, la volonté que la justice éclate et de pouvoir parler" mais loin de lui l'idée de faire un pronostic sur la suite.
Arthur Naciri ne s'est toujours pas exprimé à part devant l'IGPN, sinon il n'a jamais pu prendre la parole, jamais pu entendre ce que disent les policiers et il se retrouve devant ce mur du silence. Il a besoin de parler
Maitre Thomas Fourrey, avocat de la partie civile
Dans l'attente du jugement, aucune indemnisation n'est lancée. Arthur doit tout financer, seul. Un sacré budget qui l'oblige à avoir deux emplois. Il a eu 9 dents cassées, une fracture de la mâchoire et la cloison nasale déviée. "J'ai encore des problèmes. Je vais encore voir le dentiste dans 10 jours. J'ai le droit d'en sortir non ? Tout ça c'est des frais, de la sueur, de la souffrance. J'ai encore mal aux dents, je n'en dors pas la nuit. Je ne pense qu'à ça".