Démystifier le don de moëlle osseuse pour sauver des vies

Le don de moelle osseuse inquiète les donneurs potentiels. Pourtant, le don proprement dit ne dure pas bien plus longtemps qu'un don du sang. Il se déroule dans les locaux de l'Établissement Français du Sang, mais dépend de l'Agence de biomédecine auprès de laquelle on peut s'inscrire.

Avec son regard déterminé, Joris est comme tous les enfants de son âge, les yeux rivés sur sa cible, tirant à qui mieux mieux avec son arc des petites flèches qui heurtent la paroi vitrée de sa chambre d'hôpital. Joris, qui passe quatre jours dans sa chambrette au Centre Léon Bérard pour son traitement à raison de trois transfusions de sang par semaine souffre d'une grave maladie du sang : l'aplasie médullaire.

Le garçonnet suit depuis peu un nouveau traitement  qui lui permettra peut-être de guérir. Pour savoir si cela est suffisant pour le sauver, il faut compter de quatre à six mois. Si ce n'est pas le cas, la seule solution passe par la greffe. Problème, les chances de trouver un donneur sont rares, "une chance sur un million de trouver un donneur compatible en dehors de la famille", rappelle le docteur Alain Lefèbvre, responsable du site de prélèvement du don du sang de Saint-Etienne. 

C'est dur à vivre pour toute la famille. On se demande quand on touchera le fond

Charlotte,

la maman de Joris

Ce premier traitement à base de sérum anti-lymphocytaire vise la destruction en totalité de son système immunitaire. Car ce dernier, c'est le propre de sa maladie, se bat contre sa moelle osseuse. Un deuxième traitement doit permettre à sa moelle de retrouver ses fonctionnalités normales. Mais ce protocole n'est pas garanti, "Le plus dur, c'est que c'est sans assurance sur le résultat, précise Charlotte, sa maman. Avec son traitement immunodépresseur, Joris a deux chances sur trois que ça fonctionne. Ça ne vaut pas la greffe, mais il y a de l'espoir." 

Si ça ne marche pas ? Il faudra se tourner vers la greffe. Un long cheminement pour trouver le donneur le plus compatible avec Joris. Un combat qui parfois éreinte la famille, car cela ressemble à un parcours du combattant. Aujourd'hui, les chances de trouver un greffon compatible sont rares. "Ce n'est pas une question de groupe sanguin, c'est une question de compatibilité. Or, ni mon mari, ni moi, ni ses trois sœurs ne le sommes", explique Charlotte. C'est pourquoi Joris est inscrit sur les listes de demandeurs de greffe nationale et internationale.

Le don de moelle osseuse fait peur, souvent par méconnaissance

Donner sa moelle osseuse n'est aujourd'hui pas très compliqué : il suffit de s'inscrire sur le site "dondemoelleosseuse.fr". Le donneur s'inscrit. Il est contacté le jour J s'il est compatible avec un malade. Et bien-entendu, plus il y a de donneurs, plus il existe de chances pour les patients. Le petit Joris pourrait lui aussi, un jour, en profiter.

Mais le don de moelle osseuse effraie. À tort. Les gens ont tendance à se faire une fausse idée sur ce don, le confondant souvent avec le don de moelle épinière qui s'effectue via une aiguille enfoncée dans la colonne vertébrale. Ici, il s'agit ni plus ni moins, dans 80 % des cas d'une simple prise de sang, mais qui dure plus longtemps, environ 4 heures.

"C'est identique, sinon que c'est un peu plus complexe", dit le docteur Lefèbvre. Les donneurs sont confortablement installés, le sang est prélevé dans les deux bras à la fois. Le plasma, les globules rouges ou les plaquettes sont naturellement dans le sang. "Les cellules souches qui servent aux transfusions se trouvent quant à elles dans la moelle osseuse. Mais comme ces cellules souches qui produisent les cellules du sang se trouvent en quantité insuffisante dans le sang, afin de les prélever, on procède à une "préparation" du donneur, détaille le médecin. La préparation se déroule quelques jours avant le don proprement dit. Il s'agit de "facteurs" qui vont booster la fabrication des cellules souches en nombre suffisant avant leur collecte."

Plus il y a de donneurs, mieux c'est

Aujourd'hui, il ne manque pas de donneurs en tant que tel, assure l'Agence de la biomédecine qui gère ces dons. Elle recherche en priorité des jeunes hommes (18-35 ans) si possible issus de la diversité. Les inscriptions se font uniquement sur "dondemoelleosseuse.fr". Le don de moelle osseuse est un acte altruiste, volontaire, gratuit et totalement anonyme qui permet de sauver la vie de personnes souffrant de maladies graves du sang. L’inscription comme donneur de moelle osseuse est un engagement de long terme. Un volontaire s’inscrit aujourd’hui pour être appelé à faire ce don à un malade inconnu, peut-être dans un an, peut-être dans dix ans, peut-être jamais. La compatibilité est liée au profil génétique de chacun, lui-même lié au patrimoine génétique familial. Sur le site internet se trouvent toutes les informations nécessaires. 

À Saint-Etienne, l'an passé, on a enregistré 548 nouvelles inscriptions, en sachant que  2 000 patients sont en attente de greffe. 360 000 donneurs sont inscrits sur le registre national tandis qu'existent 73 registres internationaux dont une forte provenance depuis l'Allemagne où ces dons sont plus répandus que dans le reste de l'Europe.