Des analyses de l'eau révèlent la présence d'éléments radioactifs dans les eaux portables de certaines communes françaises, émis par les centrales nucléaires. "Vous pouvez continuer de boire l'eau du robinet, même si le risque n'est pas nul", rassure la Criirad.
Tritium. C'est le nom d'un atome au centre de nombreuses discussions en ce moment. Selon une enquête publiée par Mediapart cette molécule radioactive se retrouverait dans nos verres d'eau.
Le média d'investigation en ligne a publié une enquête en association avec la Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité (Criirad). En compilant les données des Agences Régionales de Santé, Mediapart et la Criirad sont arrivés à la conclusion que plus de 660 communes boivent de l'eau qui contient des atomes radioactifs. Cela concerne près de 10 millions de Français. Les résultats commune par commune sont disponibles grâce à un moteur de recherche.
"Quand une valeur dépasse les 2 Bq/L, on est face à une pollution des centrales nucléaires car en fonctionnement normal, elles vont produire du tritium" qu'elles vont rejeter dans les cours d'eau, précise Julien Syren, co-directeur de la Criirad, sur Ici Matin.
- Dans le Rhône, 45 communes sont concernées, avec une valeur maximale de 9 Bq/L.
- En Ardèche, 43 communes ont été identifiées, dans le nord du département. La valeur maximale relevée est de 6 Bq/L.
- Dans la Drôme, la seule commune de Pierrelatte est concernée, avec une valeur de 10 Bq/L.
- Le tritium est présent dans 14 communes de la Loire, qui se concentrent pour la majorité autour de Saint-Étienne.
- Le département de l'Ain n'est quant à lui pas concerné.
"Dans la région lyonnaise, c'est en aval de la centrale nucléaire du Bugey. Pour la vallée du Rhône, on a les rejets de nombreuses centrales : Bugey, Saint-Alban, Cruas, Tricastin. Cela fait un cumul de tritium dans l'eau du fleuve Rhône. Les communes qui vont fabriquer de l'eau potable à partir de l'eau du Rhône ou de sa nappe alluviale vont retrouver ce tritium dans les eaux du robinet", précise Brunon Chareyron, conseiller scientifique à la Criirad.
Lancer l'alerte
L'OMS fixe la norme à 10 000 Bq/L. "On est vraiment dans le domaine des faibles doses. Vous pouvez continuer de boire l'eau du robinet, même si le risque n'est pas nul", précise Julien Syren. Le risque à terme d'exposition à tous les polluants radioactifs est "d'augmenter le taux de cancers dans la population exposée", ajoute-t-il, insistant sur les "faibles proportions" des taux mesurés.
Pour l'association, cette étude est surtout un moyen de lancer l'alerte. "Ce n'est pas normal qu'un atome radioactif produit dans le cœur des centrales nucléaires se retrouve dans l'eau du robinet et donc dans l'organisme. Il y a beaucoup d'incertitudes scientifiques sur les effets des très faibles doses de tritium qui pénètre dans le corps. S'il y a moyen de faire en sorte qu'il n'y ait plus de tritium dans l'eau du robinet, il ne faut pas hésiter à le faire", affirme Brunon Chareyron; conseiller scientifique à la Criirad.
Cette étude montre aussi qu'"en cas d'accident grave, une grande quantité de ressources en eau d'irrigation, en eau potable, va être impactée", conclut-il.