Le village de Bessenay dans le Rhône a dit au revoir à son médecin de village. Après 37 années de présence sur ce territoire rural, le Docteur Michel D'Autryve a rencontré ses derniers patients. Ce samedi 27 mai, il les avait conviés à un pot de départ sur la place du village. Il n'a pas de remplaçant.
Des ballons accrochés aux plafonds dans le cabinet, des confettis posés sur la table de la salle d'attente, une bouteille de vin dans le bureau. La surprise était de taille pour Michel. Ce médecin de campagne s'en va, après 37 ans passés dans le village.
Un air de fête
"Mes patients étaient devenus plus que des patients avec le temps" déclare-t-il, des trémolos dans la voix.
Certains d'entre eux ont donc décidé de lui réserver une surprise. Dans la nuit, ils ont décoré tout le cabinet. Des confettis pour les jeter sur le médecin "les enfants étaient contents". Des ballons pour donner un air de fête et une bouteille de vin "je devais boire un verre à chaque consultation, mais je ne l'ai pas fait, sinon j'allais mal terminer la journée", dit-il en souriant. Il suivait entre 1500 et 1700 personnes. Autant de dossiers qu'il faudra rendre à chacun.
Un grand regret
Car, le médecin part avec un sentiment d'abandon. Il n'a pas trouvé de remplaçant, malgré un appel qu'il avait lancé il y a quelques mois. Les amplitudes horaires et le travail administratif ne séduisent plus les nouveaux diplômés.
J'aime les films qui se terminent bien. Mais là, c'est un flop ! Je plante certains de mes patients qui ont encore besoin de soins.
Docteur Michel D'Autryve
"On va se débrouiller"
Sur la place du village, ce samedi midi, ils sont plus d'une centaine à avoir fait le déplacement. Ils ont répondu à son invitation, pour un verre d'au revoir. Françoise, habitante d'une commune voisine, raconte que leur relation a débuté par hasard. Puis, il est devenu le médecin de famille. "Maintenant, on attend notre nouveau médecin". Pour Jeanine : "on va se débrouiller, on a trouvé un petit jeune, un peu plus loin d'ici". Elle ajoute en expliquant que les médecins du secteur ne prennent plus de nouveaux patients. "J'ai dû en appeler 15 ou 20 avant d'en trouver un de disponible".
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"Ça compte dans une vie"
Le médecin feuillette une dernière fois son agenda, le stéthoscope est définitivement posé sur la table d'auscultation. "Quand tu prends la page et que tu la tournes : ce n'est pas simple ! 37 ans, ça compte dans une vie". Il nous montre le dessin d'une enfant de 6 ans "qui a essayé de me draguer avec tous ces cœurs dessinés" dit-il en riant. Il ne quittera pas le village, prêt à croiser ses anciens patients sur le marché pour échanger avec eux, entretenir d'autres liens. "Ici, dans le bureau, rien ne sortait".
Il se remémore des anecdotes, comme ceux qui se sont cassés une jambe le veille de leur mariage, ou cette vieille dame "un peu Tatie Danielle" qui râlait souvent, mais qui lui a avoué un jour "j'ai essayé d'autres médecins que vous, mais vous êtes le moins mauvais !".
Un peu plus loin, Marc, ancien patient, écrit un mot sur un coin de table. Triste de voir partir son médecin de famille depuis toujours. Triste et content pour lui "sa retraite est méritée. On sait qui on perd. Il va falloir trouver un nouveau médecin". Un nouveau confident. Une nouvelle oreille attentive.
