Fatigués par la route et déchirés d'avoir fui leur pays, 48 réfugiés ukrainiens ont été accueillis à Saint-Pierre de Chandieu dans le Rhône. Applaudis à leur sortie du bus, les mères et leurs enfants vont à présent être répartis dans différentes familles.
Ils ont parcouru 2 000 km de routes depuis Lviv dans l'ouest de l'Ukraine. A leur descente du bus, les enfants sont comme groggy.
Ils ne découvrent pas les lieux, depuis des années l'association "Les joyeux petits souliers " organise une tournée en France où les enfants, chanteurs et danseurs se produisent. Pourtant ce matin, bien que rassurés d'être entourés de visages connus et bienveillants, ils ont le cœur lourd.
Entre soulagement et détresse
Le bonnet enfoncé jusqu'aux oreilles, un air à la fois juvénile et inquiet, l'un des passagers explique dans un anglais hésitant :" Je vais bien mais je me sens triste parce que mon pays est détruit et je suis aussi triste parce que mon père heureusement n’a pas été tué mais il me manque."
Les hommes sont restés en Ukraine pour défendre leur pays.
Une douleur que comprend Pauline, cette saint-pierrarde héberge pour la première fois 3 personnes. Malgré une attitude qui se veut joyeuse, l'émotion la saisit :" C’est très émouvant, ça me semblait normal de les accueillir, Tatiana et Zachary (et leur maman) chez nous pour que la vie soit un peu moins dure." Sa gorge se serre au moment de reprendre sa phrase, "On fera de notre mieux. Voilà, on est vraiment très émus et très contents".
Le périple a duré deux jours, ils ont traversé la Pologne, la Tchéquie, l'Allemagne et une bonne partie de la France. Une traversée de l'Europe éprouvante.
Zachary peine à masquer son chagrin, le visage plus tout à fait poupon mais pas encore adulte, esquisse un sourire "Je suis triste mais l'ambiance ici est sympathique."
Une solidarité évidente
La présidente de l'antenne lyonnaise de l'association, Anne-Marie Galayda, descendante d'Ukrainiens ayant fui la grande famine des années 1930, habite à Saint-Pierre-de-Chandieu. Elle a organisé une grande collecte de vêtements chauds et a rapidement proposé aux membres de l'école de danse folklorique de venir en France.
Au sol, près du bus, sont disposés des sacs noirs étiquetés aux noms des réfugiés. Maigres baluchons emportés à la hâte.
Des amitiés solides
Bernard charge sa voiture d'une valise, il a la possibilité d'héberger chez lui 7 personnes. Une aubaine, 7 personnes déracinées pourront partager leur quotidien. Elles pourront aussi compter sur son soutien sans faille.
Il les connaît bien, dynamique, ils les enlacent chaleureusement, échangent quelques mots avec chacun sans difficultés. "Tous ceux qui sont là, c’est des petits danseurs, des mamans de danseurs, qui depuis des années, viennent chez nous, qu’on voit dans les spectacles etc. C’est comme si c’était la famille." Au sourire que lui adressent les enfants, on le croit. Sa sincérité vaut tous les discours.
Olena Semehyshyn, 34 ans, pianiste et professeur de musique, venue avec ses 4 enfants est très reconnaissante de cet accueil.
Le maire Raphaël Ibanez serre dans ses bras une petite fille.
"On a eu une réunion de crise samedi, on a été horrifiés par ces évènements. Lundi, explique-t-il, on a lancé un appel aux dons, et depuis on en a reçu des flots!".
La collecte continue
Denrées alimentaires non-périssables, vêtements, médicaments: le sous-sol de la
mairie déborde et un camion venu d'Ukraine pour livrer une entreprise lyonnaise est attendu pour récupérer tous ces produits et les distribuer aux habitants de Lviv.
Avant de prendre place dans les voitures de leur famille d'accueil, tous se regroupent
devant le bus et entonnent l'hymne ukrainien, la main sur le cœur.
Une nouvelle étape dans la vie commence pour ses réfugiés.
Ils sont en sécurité, ils le savent et sont reconnaissants.
Mais laisser une partie de sa famille et son pays, en pleine guerre, ouvre une blessure qui mettra du temps à cicatriser.