Les kinés se battent pour une revalorisation : "on en a marre de ramasser les miettes"

En négociation avec la Caisse nationale d'assurance maladie, les kinésithérapeutes demandent une revalorisation de la consultation, après des années de stagnation des tarifs. C'est un collectif en marge des syndicats qui mène la grogne.

Dans le sillage des médecins généralistes, les kinésithérapeutes montrent les dents pour obtenir une revalorisation de l'acte en ce début d'année 2023. Chez un praticien de secteur 1, une séance de base d'une durée de 30 minutes, comme la rééducation pour une entorse, coûte 16,13 euros. 

Les syndicats négocient actuellement avec la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) pour obtenir une revalorisation de ce tarif. Les kinés estiment que leurs revenus ont été largement rognés par l'inflation ces dernières années, alors que le tarif de la consultation n'a pas bougé depuis 10 ans. Mais un seul des trois syndicats représentatifs de la profession a, pour le moment, signé l'avenant de la CNAM, qui propose une revalorisation de 1,93 euro par consultation... étalonnée sur trois ans. En 2023, la hausse du tarif de la séance de base ne serait ainsi que de 1,29 euro.  

Une page Facebook réunit plus de 8 000 kinés 

Cette proposition de la CNAM divise les quelque 80 000 kinés qui exercent en France. Un syndicat, le FFMKR, a pour le moment signé cette feuille de route. Les deux autres organisations syndicales (Alizé et SNMKR) ont refusé. Sur la page Facebook du collectif "Négociations kiné : tous concernés !", qui a réussi le tour de force de rassembler 8 800 membres de la profession depuis sa création en octobre 2022, de nombreux praticiens dénoncent une revalorisation salariale largement insuffisante. 

"Notre collectif et les deux syndicats non-signataires disent que ce sont des miettes", témoigne une kiné installée dans un cabinet libéral en région lyonnaise. Elle préfère rester anonyme. "Cela fait 10 ans qu'on n'a pas eu de revalorisation. Nos patients croient qu'on est une profession aisée et qu'on gagne très bien notre vie. En réalité, les kinés qui essayent de bien travailler en recevant un patient par demi-heure ne vont bientôt plus y arriver. On en a marre de ramasser les miettes", poursuit-elle.

"Nous ce qui nous semble valable, c'est une séance à 20 euros"

Pierre-Antoine Toffanelli

Créateur de la page Facebook "Négociations kiné : tous concernés !"

Ce qu'exige le collectif "Négociations kiné : tous concernés !", c'est une revalorisation de la séance à un tarif minimum de 20 euros. "On demande une revalorisation significative de nos prestations pour apporter une qualité de soin pérenne à nos patients. Nous ce qui nous semble valable, c'est une séance à 20 euros", affirme Pierre-Antoine Toffanelli, le créateur de la page Facebook des kinés en colère. 

Ce kiné, qui exerce dans le Nord, explique avoir créé ce groupe Facebook pour sensibiliser la profession, qui est peu syndicalisée et n'avait pas forcément connaissance des négociations en cours. Pierre-Antoine Toffanelli reconnaît qu'il y a eu du "rififi" sur le groupe de discussion virtuel suite à la signature par le syndicat FFMKR de la feuille de route proposée par la CNAM. 

Le syndicat Alizé demande une hausse de 1,93 euro dès 2023

Certains kinés ne veulent pas valider les négociations en cours avec cette revalorisation jugée trop faible, quand d'autres estiment qu'un possible compromis n'est plus très éloigné. Référent de la région Auvergne-Rhône-Alpes du syndicat Alizé, qui n'a pas signé l'accord, Jérôme Alaphilippe affirme que sa centrale signera si l'augmentation de 1,93 euro n'est pas étalonnée sur trois ans, mais effective dès le mois de juin 2023, et que les frais de scolarité des étudiants en kinésithérapie soit alignés sur les tarifs des frais universitaires. En contrepartie, les jeunes diplômés devront travailler deux ans en hôpital ou dans des déserts médicaux en début de carrière.  

"Au départ, la CNAM nous avait proposé une augmentation de 43 centimes. L'enveloppe prévue au départ était de 180 millions d'euros, elle est passée à 530 millions d'euros", note ce syndicaliste, lui-même installé à Courchevel en Savoie. 

"Sur 40% du territoire, les kinés ne seront plus libres de s'installer là où ils veulent"

Véronique Morel-Lab

Déléguée du Rhône du syndicat SNMKR

Il n'y a pas que le montant de la revalorisation qui fait grincer des dents certains kinés. Véronique Morel-Lab, déléguée départementale du Rhône pour le syndicat SNMKR, est sur la même ligne que son homologue du syndicat Alizée concernant les contreparties exigées par la CNAM en échange d'une revalorisation. 

"Sur 40% du territoire, les kinés ne seront plus libres de s'installer là où ils veulent. Il y aura aussi l'obligation pour les jeunes diplômés de travailler deux ans en salariat à l'hôpital ou alors en cabinet dans une zone sous-dotée avant de pouvoir s'installer là où ils désirent. Il faut savoir que les salaires proposés à l'hôpital ne suffisent même pas aux jeunes diplômés pour rembourser les crédits contractés pour financer leurs études", dénonce Véronique Morel-Lab. 

Une date butoir le 16 janvier 2023

Les négociations avec la CNAM se clôtureront le 16 janvier 2023. Si deux syndicats s'opposent à l'accord, celui-ci ne sera pas signé et les kinés risquent de n'avoir aucune revalorisation. Face à cette voie sans issue, la majorité dit ne pas envisager de faire grève. "Les médecins ont du pouvoir, mais nous beaucoup moins. C'est dur de faire grève si on n'est pas écouté par le gouvernement", juge, un peu dépitée, Véronique Morel-Lab. 

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