Des groupes identitaires lyonnais ont tenté de récupérer le combat des agriculteurs pour diffuser leur idéologie. Ces signaux reflètent une nouvelle approche de ces groupes, en lien avec les préoccupations d'actualité.

"Plus d'argent pour les paysans, moins pour les migrants !" En moins d'une semaine, l'ultradroite lyonnaise est parvenue à se saisir de la colère des agriculteurs et à mettre en avant ce slogan, ainsi que ses idéaux "enracinés".

Le groupe "Les Remparts" saisi l'actualité

En référence à la campagne "on marche sur la tête" des syndicats agricoles, dont les membres retournaient les panneaux communaux ces derniers mois, le logo du groupe identitaire des Remparts a été renversé sur les réseaux sociaux. Leurs comptes ont fait circuler le slogan "pas de pays sans paysan", puis les images d'une action menée dimanche, avec déploiement d'une banderole "les nôtres avant les autres" sur un pont.

Jusque-là, le groupuscule héritier de Génération identitaire (dissous en 2021) concentrait plutôt ses attaques sur l'immigration, "l'idéologie woke", l'ultragauche et "les racailles". Avec une première ouverture vers la campagne à l'automne, quand ses militants se sont mobilisés "en soutien" au jeune Thomas, tué au couteau dans la Drôme lors d'une fête de village, symbole, selon eux, de "l'ensauvagement de nos villes et de nos villages".

Activités diversifiées

Pour leurs activités officielles, Les Remparts s'appuient sur deux associations héritées de Génération identitaire : La Traboule, un bar associatif juché dans les pentes du Vieux Lyon et l'Agogé, un club de sports de combat, dans un local mitoyen. "Apéros enracinés", galettes pour l'Épiphanie et crêpes pour la Chandeleur, "soirées d'automne" pour célébrer à la fois "la nouvelle année celte" et "la Toussaint chrétienne": les identitaires Lyonnais aiment mettre en avant leur esprit de "camaraderie".

Sur les réseaux sociaux, le collectif qui revendiquait plus de 900 adhérents en 2022, assure s'appuyer sur "une communauté forte, dynamique et respectueuse des lois" et s'insurge contre les attaques de la mairie, dénonçant des "faits de violence fantasmée". Il a refusé de répondre aux questions de nos confrères de l'AFP.

Une nouvelle approche

Fief historique de la tradition catholique contre-révolutionnaire, Lyon a vu l'extrême droite et l'ultradroite se développer depuis le XIXe siècle, avec, ces dernières décennies, deux courants prépondérants. D'abord, les identitaires, représentés aujourd'hui par Les Remparts, ont "très clairement affirmé leur volonté de défendre la religion chrétienne. Ça leur a apporté, peut-être pas de la sympathie, mais de la tolérance d'une partie de la population lyonnaise", explique Alain Chevarin, auteur de "Lyon et ses extrêmes droites" (éd. La Lanterne, 2020). De l'autre, un mouvement nationaliste, davantage intéressé par la question ethnique, est porté actuellement par Lyon populaire. Depuis quelques années, des militants "moins idéologisés (...) se réunissent sur quelques fondamentaux" tels "le racisme anti-blanc" qui pour eux "découle de l'immigration", analyse la chercheuse spécialisée Marion Jacquet-Vaillant. Au fil des années, tous ont su élargir leur champ d'action leur permettant de gagner en audience et en sympathisants, comme les questions féminines, le sport ou l'écologie, ce qui les rend "plus proches des préoccupations sociales actuelles",selon M. Chevarin.

Plus discret que les Remparts, Lyon populaire organise régulièrement des conférences dans un local du centre-ville de Lyon. La prochaine, début mars, sera consacrée à "l'écologie intégrale" et abordera "la défense de la ruralité".

Des groupes qui renaissent

Bravant des interdictions de manifester, le collectif Les Remparts, considéré comme le principal groupuscule d'ultradroite à Lyon, avait été menacé d'une procédure de dissolution par le ministre de l'Intérieur, en même temps que d'autres groupes qui ont été dissous, comme la Citadelle et la Division Martel.

Le maire écologiste de Lyon, Grégory Doucet, milite depuis longtemps pour la dissolution des Remparts et a saisi à plusieurs reprises le gouvernement. Il y a eu depuis 2020 "une résurgence d'actes violents" visant manifestants féministes, LGBTQ+ ou pro palestiniens, sans oublier des heurts réguliers avec l'ultragauche, souligne la mairie, qui décompte 22 blessés lors d'agressions de l'ultradroite. "Il faut les priver de leurs moyens d'organisation", plaide l'adjoint à la sécurité Mohamed Chihi, qui les voit comme "la menace principale à l'ordre public".

"Pas si évident" de monter une procédure de dissolution, explique un fonctionnaire qui suit le dossier : "une fois qu'on a fait le lien entre des individus et des faits, il faut encore faire le lien entre ces individus et le groupuscule". Pour certaines actions, les militants se dissimulent derrière un prête-nom : "ils peuvent notamment converger dans le cadre du "Guignol Squad" (...) sorte de black bloc d'ultradroite", qui agit sous l'effigie de la célèbre marionnette lyonnaise, selon cet observateur qui ne souhaite pas être identifié.

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