Cancer du sein: "avec l'escrime, je me bats contre un ennemi et j'ai repris confiance en moi"

Le Centre Ressource Lyon a ouvert ses portes en octobre 2019. Le lieu, géré par une association, est indépendant de tout établissement de santé et est animé par des bénévoles. L'une des activités proposées aux bénéficiaires : l'escrime. Des ateliers ont lieu chaque mercredi et sont plébiscités.

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"J'ai eu deux cancers, en 2007 et en 2019. Un cancer du sein. Je viens ici pour combattre mon cancer. En escrime, je me bats contre un ennemi.. J'ai repris confiance en moi", explique Martine derrière son masque. Le sourire est franc mais on perçoit encore de l'émotion dans sa voix. L'escrime a renforcé sa combativité et l'a apaisé aussi. "J'étais en colère contre mon corps, par rapport au cancer. L'escrime m'a permis de décharger ma colère et ma peur. Parce qu'en fait, on a peur du cancer. Le fait de le battre, c'est un ennemi que l'on visualise". 

Chaque mercredi, Laure Sibué, maître d'armes vient animer deux ateliers d'escrime au Centre Ressource Lyon hébergé dans le quartier de Vaise. Des séances en groupe. Le premier est composé de débutantes. L'autre, d'escrimeuses plus expérimentées. Pas plus de six personnes, respect de la distance, masques et protections obligatoires ... ici les gestes barrières sont largement respectés.

Martine est une fidèle de ces séances. Elles sont animées par Laure Sibué, jeune maître d'armes. Les séances débutent invariablement par de l'échauffement. Puis vient le moment, très attendu par les élèves, de revêtir les protections, les masques et surtout d'empoigner les sabres. La plupart des femmes présentes se remettent doucement d'un cancer du sein. Pour quelques-unes, l'opération est encore très proche. Certaines en conservent les séquelles, d'autres subissent encore de lourds traitements. Difficile d'imaginer ce que l'escrime peut leur procurer. Pourtant, ces femmes sont toutes unanimes, à l'image de Martine.

"Ça me défoule, ça me fait rire ... j'adore ça!". Pour Danièle, escrimeuse débutante, ce rendez-vous hebdomadaire est un instant de plaisir et de détente qui lui permet de "lâcher prise", de parler d'autre chose que la maladie. "Franchement j'adore!". Mêmes mots dans la bouche de Doris, qui n'aurait jamais imaginé pratiquer cette activité "avant". L'escrime a été une sorte de révélation pour les deux femmes. 

Une aide psychologique ... et la riposte face au cancer

Depuis 2011, sous l’impulsion du Dr Dominique Hornus-Dragne, anesthésiste et escrimeuse à Toulouse, la Fédération Française d’Escrime a développé un programme autour de la pratique post cancer du sein. Aujourd’hui 30 maîtres d’armes sont formés par an.
Parmi eux, Laure Sibué. La jeune femme a découvert cette formation lorsqu'elle passait son diplôme d'Etat. Et elle a immédiatement été conquise. "Ça a été la révélation. Quand on voit tout ce que l'escrime apporte sportivement et humainement, on ne peut pas ne pas le faire !" Côté psychologique, les bienfaits de ce sport de combat sont incontestables selon cette professionnelle. 

A l'escrime, quand on reçoit une attaque, on pare et on riposte. On peut faire le parallèle avec la maladie. La maladie, c'est l'attaque ! Non seulement on va parer - donc se soigner - mais en plus, on va riposter, on va aussi mettre la maladie K.O.

Laure Sibué, Maître d'armes

Pour les pratiquantes, l'escrime est aussi un "exutoire" lors des moments de stress, d'angoisse ou de colère. "Les touches vont être portées sur moi", explique Laure. "Certaines ne vont pas oser attaquer, vont rester sur la défensive. Mais au fur et à mesure des séances, elles vont évoluer".

Les bénéfices thérapeutiques 

Ce que l'on découvre avec la pratique de l'escrime, c'est qu'elle va au-delà du bénéfice psychologique et de l'image de soi. C'est aussi une aide thérapeutique, une précieuse aide à la guérison pour les femmes ayant subi une opération consécutive à un cancer du sein. La discipline permet notamment de faire travailler le côté opéré. Avec l'escrime, il est question de reconstruction physique après l’opération. Le maniement du sabre permet de retrouver de la mobilité d’épaule. Et notamment de l'épaule armée. 

"Après les premières séances d'escrime, l'épaule était douloureuse, elle n'était pas souple. Il y avait encore des  adhérences, après l'opération et les traitements. Et petit à petit, tout celà se délie, s'assouplit" confie Doris avec un grand sourire. Elle constate :" Je suis droitière mais je suis plus à l'aise avec le sabre du côté gauche (opéré), qu'avec ma main droite."

Les bienfaits thérapeutiques sont incontestables selon Laure Sibué.

Avec l'escrime, on travaille le bras. Les mouvements d'épaule sont compliqués. Avec la maladie, les femmes ont tendance à se recroqueviller sur elles-mêmes, à avoir des adhérences au niveau des cicatrices.

Pour ce public particulier, le Maître d'armes a choisi le sabre. Une arme qui va permettre de toucher son adversaire avec la lame - le tranchant - et non avec la pointe comme avec une épée ou un fleuret. "Avec le sabre, on va pouvoir faire des mouvements qui vont travailler l'amplitude au niveau des épaules. On va travailler aussi sur les adhérences et on va aussi ouvrir la position du buste grâce à la position de garde", explique-t-elle. La garde, position dʼouverture, permet en effet de corriger une attitude souvent fermée après la chirurgie et d'améliorer la posture, modifiée après ablation dʼun sein.

Cancer : ateliers et prise en charge globale des bénéficiaires

Le premier souvenir de Laure Sibué au Centre Ressource Lyon est encore bien présent  dans son esprit: "ce premier cours, j'en suis ressortie reboostée. Elles ont une énergie communicative, une volontée de vivre extraordinaire. En repartant, j'avais des frissons!". Les ateliers escrime au Centre Ressource Lyon sont devenus un rendez-vous incontournable, pour les bénéficiaires comme pour le Maître d'armes. "On a plaisir à se retrouver chaque semaine, on a plaisir à partager, c'est un vrai bonheur."

Le Centre Ressource Lyon est un centre de prise en charge "globale" des patients atteints de cancer, mais aussi de leurs proches. Les bénévoles proposent des ateliers de yoga, de réflexologie plantaire, de Qi Cong ou encore de la méditation. Des pratiques psycho-corporelles, ateliers nutrition ou encore des ateliers esthétiques pour travailler sur l'image de soi. La palette d'activités proposées étaient très large avant la crise sanitaire.

Mais en mars 2020, alors que le Centre Ressource Lyon gagnait peu à peu en notoriété, la crise covid et le premier confinement sont venus mettre un coup d'arrêt au travail des bénévoles. Un an après, les activités de groupe n'ont pas encore repris au Centre Ressource Lyon, à l'exception de l'escrime. 

durée de la vidéo : 00h02mn03s
©France 3 RA

 

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