Depuis le confinement, en face de mon nouveau bureau de France 3, chez moi, mon oeil vagabonde sur ma bibliothèque. En ces temps de Covid-19, je vous propose une exploration d'ouvrages les plus variés. Il y en aura pour tout le monde. On commence avec "Limonov" d'Emmanuel Carrère.
Le confinement c’est un peu un voyage immobile. C’est aussi pour moi l’occasion d’une exploration dans un tas de choses que l’on entasse. Notamment les livres. Je ne sais pas si c’est votre cas, mais quand on aime lire et que l’on entre dans une librairie pour acheter un titre, très souvent on ressort avec plusieurs ouvrages. Et ils finissent par s’entasser dans un coin. Lus ou pas quoiqu’il en soit ils se retrouvent alignés dans la bibliothèque et bien souvent un peu oubliés au fil des années.
J’étais un peu surpris du relais assez large de l’information sur le décès d’Edouard Limonov à 77 ans en Russie dans la journée, au milieu d’infos autrement plus essentielles sur l’épidémie du Covid-19 et du premier jour de confinement.Le personnage s’était fait connaitre notamment en France dans les années 80 comme écrivain sulfureux
Le personnage s’était fait connaitre notamment en France dans les années 80 comme écrivain sulfureux et en 2011 au travers d’un roman-enquête d’Emmanuel Carrère, prix Renaudot cette année-là, « Limonov », éditions P.O.L. Et voilà que je retrouve ce bon gros bouquin de presque 500 pages. J’aime beaucoup Emmanuel Carrère son style fleuretant sans cesse entre la réalité et le roman. Mais j’avoue que, comme beaucoup, je m’étais demandé ce qui l’avait poussé à s’intéresser à l’époque à ce personnage. Et c’est sans doute dans la réponse à cette question qu’allait se trouver la réponse à l’écho donné ce mardi à sa disparition.
Une vie romanesque, dangereuse, une vie qui a pris le risque de se mêler à l’histoireEn tant que journaliste, Emmanuel Carrère avait croisé Limonov une première fois au début des années quatre-vingt à Paris. C’était une sorte de dissident new wave coqueluche du petit monde littéraire parisien. Un punk écrivain usant de sa vie aventureuse comme matière première à ses livres. Emmanuel Carrère sera amené à le recroiser en 2006, 2007 lors d’une enquête en Russie sur l’assassinat de la journaliste Anna Politkovskaïa, opposante déclarée à Vladimir Poutine. Et sa curiosité va l’entrainer à essayer de cerner le personnage. Je lis très vite dans les premières pages de portrait qu’en donne Carrère : Limonov a été voyou en Ukraine ; idole de l’underground soviétique ; clochard, puis valet de chambre d’un milliardaire à Manhattan ; écrivain à la mode à Paris ; soldat perdu dans les Balkans ; et maintenant, dans l’immense bordel de l’après communisme, vieux chef charismatique d’un parti de jeunes desperados (…) c’est que sa vie romanesque et dangereuse racontait quelque chose. Pas seulement sur la Russie, mais sur notre histoire à tous depuis la fin de la seconde Guerre mondiale.
Et c’est parti pour la lecture d’une vie romanesque, dangereuse, une vie qui a pris le risque de se mêler à l’histoire. Un vrai personnage de roman qui vous fait passer une nuit blanche.
Faudrait pas que le confinement m’empêche de dormir ! Promis le prochain bouquin sera plus léger.
Limonov d'Emmanuel Carrère, éditions P.O.L
BON A SAVOIR
Il ne vous sera peut-être pas possible d'accéder tout de suite à ces livres mais vous pouvez les commander pour certains en version électronique. Pour les autres, c'est une bonne occasion de vous faire des listes de lectures à venir. Les libraires indépendants, nombreux dans la région, se feront un plaisir de vous retrouver après le confinement. Bruno Lemaire le ministre de l'économie et des finances n'exclut pas leur réouverture, comme commerces de nécessité. L'association des libraires de la région trouve la mesure prématurée.