Six paires de gants pour faire vingt visites à domicile. Ce dimanche 19 avril 2020, Mathieu Bacconnet a posté un appel au secours sur un réseau social. Comme beaucoup de libéraux, l'infirmier a du mal à trouver tout le matériel de protection contre le coronavirus. Explications.
Lorsque nous arrivons à nous joindre, Mathieu Bacconnet revient tout juste d'un tournée pour trouver du matériel de protection. "Ce matin, j'ai fini par mettre la main sur une boite de gants, ça devrait nous faire trois jours".
Cet infirmier libéral travaille en binôme dans un cabinet du 6e arrondissement de Lyon.
Son quotidien : une vingtaine de visites à domicile chez ces habituels patients. Mais également "une surveillance de plusieurs cas de Covid avérés ou suspects, à qui il faut rendre visite une fois par jour, voire deux".
Dans le meilleur des mondes, je porterais un équipement de protection de la tête au pied !
Mathieu Bacconnet me confit qu'au début de l'épidémie, lui et son collègue "ont eu très peur. Nous avions en charge l'une des premières malades du coronavirus. On mettait deux masques chirurgicaux l'un sur l'autre, puis des masques en tissu qu'il fallait laver. On a passé quinze jours, trois semaines, à se dire qu'on allait potentiellement contaminer tous nos autres patients et nos proches".
Depuis, l'approvisionnement en masques de protection s'est enclenché.
Des dotations hebdomadaires de l'Etat, mais uniquement de masques
Véronique Nouri est la présidente du Syndicat des pharmaciens du Rhône. Elle confirme que désormais, chaque vendredi elle reçoit comme 7 autres officines du département, un stock de masques distribués par l'Etat. Le 17 avril, 150 à 300 masques sont ainsi arrivés dans chacune des 8 pharmacies du Rhône qui font office de points de distribution aux soignants libéraux.La distribution est réglementée.
Pas question de venir chercher du matériel de protection tous les jours. Véronique Nouri explique que les médecins généralistes, les infirmiers de ville, les kinésithérapeutes et autres soignants libéraux ont droit à "une dotation par semaine. Entre 6 et 18 masques dont des FFP2", selon leur profession.
Pour les masques, cela va. En revanche, "il y a bien un manque concernant d'autres matériels de protection comme les blouses".
Certes, il y a aussi les kits distribués depuis début avril par la région Auvergne-Rhône-Alpes à travers le même réseau de pharmacies. Mathieu Baconnet vient d'ailleurs d'en ramener de sa tournée du matin. Il regarde à l'intérieur : "des masques chirurgicaux, trois FFP2 et un gros flacon de gel hydro-alcoolique". Mais toujours pas de gants.
La veille, cet infirmier libéral a lancé comme un appel au secours sur sa page Facebook, se demandant publiquement :
Allons nous devoir prendre en charge nos patients mains nues, sans protection adaptée ?
"Les pharmacies sont à court. Et les fournisseurs de matériel ne réservent pas de stock pour les soignants" explique Mathieu Bacconnet. Mais l'appel de l'infirmier libéral a été entendu par le président de l'Union Régionale des Professionnels de Santé libéraux. "Il va essayer de nous trouver du matériel supplémentaire, des surblouses, des visières de protection..."
De quoi retrouver le moral ? C'est vite dit...
Avant de retourner à ses patients, Mathieu Bacconnet dit se sentir un peu esseulé face à cette crise sanitaire. De son côté, la présidente du Syndicat des pharmaciens du Rhône fait également part d'une autre inquiétude : le retour d'une "agressivité de particuliers qui veulent acheter des masques alors que cette interdiction n'est pas levée".