Ses compétitions sont à l'arrêt, son Euro est décalé pour laisser la place aux messieurs et le foot féminin "disparaît de l'actualité": la pandémie de coronavirus a fragilisé l'écosystème vulnérable de la discipline, dont le seul espoir reste la fidélité des partenaires historiques.
Le foot féminin "manque de reconnaissance et de l'exposition qu'il mérite en général et là, par la force des choses, il disparaît de l'actualité", reconnaît Olivier Blanc, responsable de la section féminine de l'OL, quadruple championne d'Europe en titre.
Pas de besoin de crise sanitaire mondiale pour constater le gouffre abyssal qui sépare les deux mondes, tant médiatiquement que financièrement. Mais la pandémie actuelle est un bon révélateur, alors que le Mondial-2019 en France semblait avoir créé un élan.
Ainsi l'UEFA a-t-elle repoussé sans scrupule l'Euro-2021 des dames pour faire place à l'Euro-2020 des messieurs, reprogrammé à l'été 2021, sans prendre en compte l'avis des joueuses.
"Pas mises de côté"
Côté clubs, l'arrêt des compétitions dames est survenu à une période cruciale pour les locomotives françaises Lyon et Paris. Le leader du Championnat de France et son dauphin allaient s'affronter dans un choc décisif pour le titre, avant de disputer une demi-finale de Coupe de France et un quart de finale aller de Ligue des champions.La reprise est donc attendue avec impatience dans ces deux clubs.
La Fédération assure pour sa part que le foot féminin, dont elle a la responsabilité, restera une priorité.
"Les filles sont traitées comme les garçons, notamment d'un point de vue financier. S'il y a des avances à faire, on va le faire. Les clubs seront payés", avance le président Noël Le Graët. "Qu'il y ait des difficultés dans les mois qui viennent, je vous l'accorde". Mais, ajoute-t-il, "on n'a pas mis les filles de côté, bien au contraire".
"Sponsors fidèles"
L'économie du foot féminin sera quoi qu'il arrive durement touchée. La crainte que les clubs et les sponsors réduisent la voilure la saison prochaine est réelle, même si les acteurs refusent de dramatiser.A Lyon, on pense que les partenaires historiques de l'équipe féminine, la plus titrée d'Europe, ne quitteront pas le navire. "Nous avons des sponsors fidèles sur des contrats de longue durée", explique M. Blanc.
Il y a 50 ans, le foot français reconnaissait la pratique féminine
Le dimanche 29 mars 1970, la France du foot reconnaissait la pratique féminine: en 50 ans la discipline est passée de quelque 2.000 licenciées à plus de 200.000, selon la Fédération française.Il y a 50 ans, c'est lors d'un conseil Fédéral de la FFF, réuni à Cannes et présidé par Jacques Georges, que cette reconnaissance a été gravée dans le marbre, "ouvrant la porte des clubs aux licenciées", a souligné l'instance dans son texte.
Si les femmes n'ont pas attendu 1970 pour jouer au foot, le premier match 100% féminin en France remontant à 1917, elles ont en revanche dû batailler pour obtenir ce droit de jouer librement.
"Le Régime de Vichy avait par exemple décrété en 1941 la pratique du football nocive pour les femmes", rappelle la FFF.
Le 17 avril 1971, les Bleues disputaient leur premier match face aux Pays-Bas (victoire 4-0) à Hazebrouck (Nord) devant seulement une poignée de spectateurs. On est alors loin des 45.595 personnes réunies en juin dernier au Parc des Princes pour assister au quart de finale de Coupe du monde perdu (2-1) par les Françaises face aux Américaines.
Plusieurs étapes ont permis le développement de la discipline, comme l'instauration du championnat national (1974), la mise en place des compétitions européennes (1984) et internationale, avec le premier Mondial féminin en 1991, la structuration des clubs et "l'investissement conséquent de certains d'entre eux", comme Montpellier, Lyon et le PSG, explique la FFF.
Aujourd'hui la France compte 200.191 licenciés, dont 158.364 pratiquantes, selon le communiqué de la fédération.
"On était à 40.000 (licenciées) il y a six, sept ans. Le foot féminin de province, de district, de ville, progresse. A chaque fois qu'un club lance une section féminine, on a tout de suite de nombreuses inscriptions", affirme le président de la FFF Noël Le Graët.