Caution, frais de scolarité plus élevés, la loi immigration votée mardi 19 décembre inquiète le milieu universitaire. Entre la précarisation des étudiants étrangers et le risque de perdre des candidatures, les syndicats d'étudiants et les présidents d'universités tirent la sonnette d'alarme à Lyon.
À l'Université Lumière Lyon 2, parmi les 30 000 étudiants, 15 % viennent de l'étranger. Ils pourraient être moins nombreux à la rentrée prochaine : avec la loi immigration, votée mardi 19 décembre au soir, les frais de scolarité devraient être majorés pour les étrangers issus de pays extracommunautaires. À cela s'ajoute une caution de "retour au pays", dont la somme n'est pas encore définie.
✍️ Avec 43 nouveaux signataires du communiqué depuis hier, soit 61 au total, plus des deux tiers des chefs d’établissements des universités françaises s’opposent au projet de loi immigration voté le 19 décembre.
— Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (@SorbonneParis1) December 20, 2023
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"On va avoir une sélection financière"
"La précarité des étudiants étrangers et étudiantes étrangères va exploser avec cette loi, alerte Zazie Roques, secrétaire générale du syndicat étudiant UNEF Lyon. Les frais de scolarité des étudiants hors Union européenne vont s'élever par an à 2770 Euros pour une licence, et 3770 Euros pour un master. On va avoir une sélection financière de l'immigration".
Au-delà des syndicats, cette loi inquiète aussi la direction des universités, des présidents de facultés ont montré leur opposition dans un communiqué.
"On prive les universités d'une attractivité"
L'une des signataires, Nathalie Dompnier, présidente de l'Université Lumière Lyon 2, explique avoir écrit aux parlementaires de la région pour les alerter, avant même le vote de la loi. "Ça va à l'encontre des valeurs de l'Université, explique la présidente. On prive des jeunes qui voudraient étudier chez nous de venir et on prive les universités d'une attractivité que nous souhaitons renforcer. Une attractivité qu'on nous appelle à renforcer, avec la défense de la francophonie, le rayonnement de la France, la mise en place de "Bienvenue en France"..."
"Bienvenue en France" : un label lancé en 2018 pour "garantir les meilleures conditions d’accueil possibles pour les étudiants internationaux", indique sur son site l'agence française Campus France.
Avec cette loi, on sait qu'on affaiblit l'attractivité des universités françaises. Les étudiants iront dans d'autres pays.
Nathalie Dompnier, présidente de l'Université Lumière Lyon 2
"Le fait que nos universités puissent accueillir des étudiants du monde entier est une richesse et une force pour nos formations, comme pour nos activités de recherche. La pluralité des regards et les mobilités internationales sont un enrichissement", tient à souligner la présidente d'université.
"Ça n'a aucun sens d'ériger des murs"
À l’université Jean-Moulin Lyon 3, le président fait aussi partie des signataires. Ici, 20 % des étudiants sont étrangers, et un sur deux est en doctorat.
C'est un véritable bras d'honneur qui est fait aux étudiants internationaux et aux étudiants étrangers. C'est la double peine : ils vont devoir déposer une caution et on va leur appliquer des droits différenciés, plus chers.
Eric Carpano, président de l'Université Jean-Moulin Lyon 3.
"Avec ce système, Marie Curie on l'aurait laissé aux portes de nos facultés, tance Eric Carpano. L'université est un système mondial, les étudiants, les enseignants se déplacent, ça n'a aucun sens d'ériger des murs. On doit déjà faire face à la fuite des cerveaux, nos meilleurs chercheurs partent à l'étranger."
À Lyon, d’autres établissements s’opposent à cette loi immigration : l’École Normale Supérieure (ENS) ou encore l’Université Claude-Bernard Lyon 1.