Loi sur les PFAS adoptée en première lecture : les députés et collectifs de citoyens soulignent une avancée "en demi-teinte"

Après l’adoption en première lecture à l’Assemblée nationale du projet de loi sur les PFAS, députés et collectifs citoyens soulignent une première victoire, mais regrettent que le texte n’aille pas plus loin.

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Un texte adopté à l’unanimité. Ce jeudi 4 avril, l’Assemblée nationale a voté en première lecture la proposition de loi sur les PFAS, visant à interdire la fabrication et vente de produits contenant des substances per- et polyfluoroalylés, que l’on appelle “polluants éternel”. Ils sont appelés ainsi du fait de leur composition chimique qui les rend extrêmement résistants et donc persistants dans l'environnement. Ces molécules de synthèse, que l’on dénombre à plus de 10 000, sont pour la plupart nocives et provoque de graves problèmes de santé.

"C’est une victoire historique. C’est la première fois en France que l’on se dote d’une législation aussi ambitieuse dans la lutte contre les PFAS” a déclaré à la fin de vote Nicolas Thierry, le député écologiste rapporteur de la loi. L’élu a souligné la dimension collective de l’avancée : “c’est grâce aux activistes, aux collectifs citoyens, et des journalistes qui se battent depuis des années sur ces sujets. Il y a un an, personne ne parlait des PFAS. Et aujourd’hui la France est un des pays qui protègent le plus contre".

Le texte voté interdit, d'ici 2030, l’importation, la fabrication, l’exportation ainsi que la commercialisation ou la mise à disposition gratuite de produits contenant des substances perfluoroalkylés et polyfluoroalkylés (les PFAS) dans les secteurs du textile destiné à l’habillement, des cosmétiques, et des farts pour les skis.

Un texte "historique", mais des regrets

Nicolas Thierry a dit toutefois regretter le poids du lobbyisme industriel sur ce vote. L’entreprise SEB s’était par exemple vivement opposée au projet de loi. Elle utilise certains composants qui pourraient être interdits dans la fabrication du revêtement de ses poêles antiadhésive. Ainsi, les ustensiles de cuisine ont finalement été exclus du vote de jeudi.

La députée du Rhône Marie-Charlotte Garin conspue les députés de la majorité présidentielle sur ce point-là : "Le lobby qui devrait primer sur tous les autres lobbys, c’est celui de la santé publique et aujourd’hui des députés de la majorité, de la droite et de l’extrême droite ont cédé, notamment sur les ustensiles de cuisine. (...) La santé n’intéresse pas le gouvernement” a-t-elle déclaré jeudi soir, en soulignant que les PFAS représentaient “le plus grand scandale sanitaire du siècle".

L'élu du MoDem Cyrille Isaac-Sibille, auteur d’un rapport en février sur les PFAS, avait par ailleurs anticipé cette problématique en déposant un amendement suggérant de déclarer l’interdiction appliquée aux ustensiles de cuisine au 1er janvier 2030, dans une perspective de compromis avec les groupes industriels. "Je regrette qu’il n’y ait pas eu un avis favorable à cet amendement" a exprimé le député ce jeudi, tout en plaidant pour la création d’un fond PFAS afin de financer la dépollution des eaux du robinet. "Des centaines de milliers de nos concitoyens boivent une eau qui n’est pas forcément saine".

"On a raté une étape en n'interdisant pas immédiatement l’ensemble des PFAS"

À Lyon, les collectifs citoyens qui se mobilisent depuis plusieurs années pour lutter contre les PFAS ont suivi attentivement les discussions dans l’hémicycle. À l’instar de Jean-Paul Massonat et Edith Metzger, de l’association “Bien Vivre à Pierre-Bénite”. Ils avaient tous deux réalisé des analyses sanguines pour l'enquête de la journaliste Emilie Rosso, révélant la présence de PFAS dans le sang des riverains de la plateforme industrielle de cette commune lyonnaise.

Fixant sur son écran d'ordinateur la retransmission de la séance parlementaire du 4 avril, Jean-Paul s'exclame lorsque les députés applaudissent le vote : "Moi aussi, j’aurais applaudi, car c’est la première fois qu’il y a un trou dans la forteresse. Avant, le directeur de l’usine disait : "je suis dans les clous, je respecte les normes puisqu’il n’y en a pas". Mais maintenant, la loi va être un moyen d’agir un peu plus rapidement" explique-t-il. Le retraité se dit toutefois frustré du délai imparti pour mettre en place l’interdiction en 2026. "Ça fait quand même loin, il y a des gens qui vont mourir, qui vont continuer à s’infecter" soupire-t-il.

Édith, de son côté, ne peut cacher sa déception : "On a raté une étape n'interdisant pas immédiatement l’ensemble des PFAS. Là, c’est limité à un certain nombre, et ce n’est pas en en interdisant trois ou quatre qu’on va résoudre le problème".

Un constat partagé dans les rangs d'autres associations lyonnaises de défense de l'environnement, à l'instar de "Notre affaire à tous". Le collectif avait attaqué en justice Arkéma pour son utilisation des PFAS. Jeanne Fleury, juriste en droit de l’environnement, témoigne : "C'est une victoire en demi-teinte car plusieurs dispositions ont été écartées", mais elle se félicite du principe inscrit dans la loi de "pollueur-payeur".

Malgré un vote qualifié d'historique, le chemin de la future loi est encore long. Le texte devra ensuite être présenté devant le Sénat. Pour être adopté, il doit être voté dans des termes identiques par les deux chambres parlementaires.

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