Quarante-trois ans après l'assassinat du juge lyonnais François Renaud, cette affaire jamais élucidée doit être de nouveau évoquée lundi 17 décembre 2018 à Versailles lors d'un procès en diffamation intenté par l'ex-magistrat Georges Fenech contre Francis Renaud, le fils de la victime.
L'ancien juge d'instruction et ex-député LR du Rhône, Georges Fenech, qui avait rendu un non-lieu dans cette affaire en 1992 au terme de 17 années d'investigations stériles, a porté plainte en septembre 2015 contre Francis Renaud, estimant avoir été diffamé dans un documentaire diffusé sur France 3 intitulé "Le juge Renaud: un juge à abattre".
La responsable de la maison de production de ce documentaire, Mano a mano, son réalisateur et deux témoins de l'époque s'exprimant dans celui-ci doivent également comparaître devant le tribunal correctionnel de Versailles.
Dans ce documentaire diffusé en juillet 2015, il était notamment avancé par M. Renaud que dans cette affaire d'assassinat, "la raison d'Etat" avait "triomphé". Il est également reproché à un ex-magistrat du tribunal de Lyon, François Colcombet, de faire le lien entre les supposées accointances politiques à droite du juge Fenech et sa gestion du dossier Renaud.
Francis Renaud est en effet un tenant de la thèse de l'assassinat politique, explique son conseil Laurent Bayon à nos confrères de l'AFP: "De nombreux éléments de l'enquête" démontrent selon eux que le juge Renaud "s'intéressait au financement de l'UDR à travers certains hold-up imputés au "gang des Lyonnais" en lien avec le SAC", le Service d'action civique, considéré comme la police parallèle du pouvoir gaulliste.
Or, selon Me Bayon, "le non-lieu a été rendu sans que ce mobile politique de l'assassinat ait fait l'objet d'investigations sérieuses".
Georges Fenech reste, lui, "persuadé" que c'est "l'oeuvre du milieu lyonnais de l'époque", explique Gilles-William Goldnadel, son avocat, la thèse de l'assassinat politique restant pour lui "très fantasmagorique". "Georges Fenech a été profondément blessé" par ce documentaire, il s'est senti attaqué "dans son intégrité de juge d'instruction", poursuit Me Goldnadel, d'autant qu'"il avait des sentiments extrêmement positifs pour le juge Renaud". Surnommé le "shériff" par la presse de l'époque, François Renaud a été abattu par un commando armé le 3 juillet 1975 dans une rue de Lyon.
Les soupçons se sont rapidement portés sur trois malfrats qui auraient agi pour le compte d'un truand lyonnais lié au SAC.
Mais le juge Fenech, dernier des sept juges à instruire le dossier, a dû se rendre "à l'évidence" en 1992, après s'être pourtant "énormément attelé à la tâche", affirme Me Goldnadel: "On n'aurait jamais le fin mot de l'histoire".