Le quartier de la Guillotière, situé dans les 7e et 3e arrondissements de Lyon est tristement sous le feu des projecteurs pour incivilités, bagarres, vols et insécurité. Mais ce quartier s'est construit au gré des vagues successives d'immigration. C’est un quartier où récemment, fêtards, familles et personnes âgées se croisaient aisément à toute heure et sans heurts.
La Guillotière est aujourd'hui un petit quartier à cheval sur le 3e et le 7e arrondissement de Lyon. Jadis, c'était un grand territoire qui allait de Tête d'Or à Gerland, en passant par Montchat. Les terrains étaient inondables et agricoles. Aux XIIIe et XIVe siècle, le bourg de la Guillotière dépendait de l'archevêque de Vienne. A la révolution, la Guillotière a été rattachée à l'Isère avant d'entrer dans le Rhône en 1797. En 1852, ce grand village est rattaché à Lyon et en devient son faubourg, et aujourd'hui se trouve à un pont de la Place Bellecour.
Le Pont de la Guillotière
''L'ancien pont, qui date du XIIe siècle, a été détruit au début des années 50 par Edouard Herriot, explique l'historien Jean-Luc Chavent. Herriot a estimé qu'il était trop étroit et qu'il y a avait beaucoup de voitures. Il a donc fait construire un nouveau pont, celui que l'on connaît actuellement. Sur l'ancien pont se trouvait un péage. Il fallait payer pour entrer sur la presqu'ile, via la rue de la Barre qui tient son nom du fait qu'il y avait une barre qui se levait et se baissait. La Guillotière, elle, se trouvait dans un endroit marécageux, toujours envahi par les eaux du Rhône. Puis une digue a été construite, ce qui a mis un terme aux inondations. Mais comme c'était marécageux, ce sont les petites gens qui y vivaient. Tous les étrangers passaient par la Guillotière. Les mauvais garçons s'y trouvaient bien avant le XIVe siècle".
Migrations et immigrations
Voyageurs, pèlerins, rois...la Guillotière a vu du monde. La Guillotière a toujours été une terre d'accueil, de transit. Les Ardéchois et les paysans limousins s'y sont installés pour travailler sur les chantiers. Des habitants de Savoie ou Dauphiné, aussi. Puis les vagues d'immigration se sont succédé. La fin du XIXe siècle, sous la IIIe République, voit l'arrivée des Italiens. C'est à la Guillotière que se trouvent les emplois industriels. C'est là aussi que se trouvent des loyers abordables qui attirent également des habitants qui quittent la presqu'île devenue chère.
A l'entre-deux-guerres Grecs, Arméniens, Juifs ashkénazes, Maghrébins et Espagnols s'y installent. Entre 1945 et 1975, lors des ''Trente Glorieuse'', davantage de Maghrébins déposent leurs valises dans le quartier de la Guillotière.
Dans les années 1980 et 1990, arrivent des réfugiés d’Asie du Sud-Est, des Turcs et des Africains subsahariens.
Un quartier populaire
Philippe Auguste, Richard Cœur de Lion et Conrad de Bavière ont logé Grande rue de la Guillotière en 1190, Saint Louis en 1294 et Louis XI en 1476. Mais au XIXe siècle, Guillotière est un quartier plutôt populaire. Il l'est resté. C'est même devenu l'un des rares quartiers populaires en ''centre-ville'', contrairement à la Croix-Rousse, aux Pentes de la Croix-Rousse, au Vieux-Lyon qui se ''boboïsent". En 2018, un collectif d'habitants s'est créé. Il craint la gentrification du quartier. Depuis 2020, d'autres collectifs se sont créés pour dénoncer l'insécurité croissante.
A la Guillotière, différentes populations se sont côtoyées et se côtoient toujours. Aux côtés des enseignes traditionnelles, l'on y trouve aussi des commerces arabes, asiatiques, africains ou encore indiens.
Hier quelques ''Chibanis'', entendez par là des retraités maghrébins, vendaient quelques bric-à-brac pour arrondir leur fin de mois.
Aujourd'hui, l'on croise des vendeurs de cigarettes à la sauvette et toujours des vendeurs de bric-à-brac plus jeunes et souvent des roumains.