Lyon : quelles solutions pour contrer le phénomène des rodéos urbains ?

Depuis août 2018, le rodéo motorisé est un délit. Trois ans plus tard, une mission parlementaire évalue l'arsenal juridique mis en place pour contrer le phénomène. Dans la Métropole de Lyon, les maires de certaines communes fortement impactées veulent aller plus loin.

Au centre de supervision urbain de Rillieux-la-Pape, c'est l'heure du briefing. "Il y eu des rodéos ? Ce matin, non, mais ce week-end on en a eu pas mal avec des motocross qui faisaient des roues arrières à tout va. Tu les as suivies tout le long ? Ouais, ça changeait beaucoup de conducteurs. Masque avec foulard, cagoule, jamais un casque.  Vitesse excessive, trottoir, roue arrière, frôlement des piétons... Ils s'arrêtaient toujours dans le même quartier, au niveau du numéro 7." Les caméras de vidéo protection constituent l'arme principale de plusieurs maires de la Métropole de Lyon, face aux rodéos urbains. Invités en préfecture ce 29 juillet 2021, ils ont défendu l'idée d'un arsenal étoffé auprès de la mission d'évaluation de la loi créant ce délit routier.

Permettre à la police municipale la saisie et destruction des deux roues et véhicules impliqués ?

Les agents du centre de supervision urbain analysent 74 caméras disséminées dans les rues de Rillieux la Pape. Objectif : tenter d'identifier les auteurs de rodéos sauvages, faute de ne pouvoir aller directement au contact, sur le terrain pour des raisons de sécurité évidente.

Il faut garantir la sécurité de tous, des passants et des policiers. Si on va au contact, souvent cela finit en guet-apens. On veut éviter ça. Autant avoir des preuves par l'image pour la suite de la procédure.

Nabil Boussaïd, responsable adjoint du centre de supervision urbain de Rillieux-la-Pape


En scrutant les écrans, "on reste dans la discrétion, et cela permet de résoudre des affaires". Selon le maillage en caméras du territoire, il est possible de voir où sont remisés les deux roues. Dans un garage, une cave, ou encore dans une camionnette. "Les images et données de ce cheminement, voire une description des auteurs, cela peut aider les enquêteurs qui agissent sous réquisition judiciaire", raconte Nabil Boussaïd. Lui ne pourra pas en faire plus. Pas de saisie et de destruction possible, le maire et sa police municipale n'y sont pas habilités. Le rodéo est un délit routier, seul un officier de police judiciaire peut agir.

"Il faut que la peur change de camp"

Les maires de Rillieux-la-Pape, de Bron et du 2e arrondissement de Lyon étaient invités à échanger sur la nécessité d'amender la loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les rodéos motorisés. Il faut dire que les trois élus LR locaux sont régulièrement confrontés au phénomène. Alexandre Vincendet est l'un des plus virulents contre les auteurs de ces rodéos. Dans sa commune, il a d'ailleurs mis en place des "brigades moto spécialisées" pour faire face à cette délinquance. Mais il veut aller plus loin, "pour que la peur change de camp, pour que les auteurs de rodéo se disent en montant sur leur moto, je risque très gros car j'ai 9 chances sur 10 de me faire attraper. "

Des policiers aguerris en moto avec derrière, des visites de parties communes systématiques et le maillage en caméras de vidéo protection, cela peut être une des solutions.

Alexandre Vincendet, maire LR de Rillieux-la-Pape

Equiper toute la ville de Lyon de caméra de vidéo protection, ça c'est le crédo de Pierre Oliver. Le maire du 2e arrondissement milite en ce sens, a indiqué à la mission parlementaire en visite ce 29 juillet 2021 à Lyon : "ces phénomènes de rodéos continuent et perdurent. Et nous, ce que l'on attend, ce sont des réponses fermes et l'application de la loi". Et le maire de Bron d'enchainer : "l'arsenal juridique ne suffit pas". Pour Jérémie Bréaud "il faut responsabiliser les bailleurs sociaux sur les visites des parties communes. Concernant les caméras, c'est une question de volonté et de courage politique", a déclaré l'élu des Républicains.

Drone et sanction de la promotion des rodéos sur les réseaux sociaux parmi les pistes

"La loi devra apporter de nouveaux outils (...) notamment l'autorisation des drones. Nous cherchons aujourd'hui une rédaction législative qui permette d'utiliser ce moyen de surveillance par vidéo" afin d'identifier les conducteurs délictueux, a affirmé Robin Reda, co-rapporteur de la mission d'évaluation de la loi du 3 août 2018. Autre piste évoquée lors du passage à Lyon des deux députés en charge de cette mission d'évaluation : une sanction de la promotion sur les réseaux sociaux de ces rodéos motorisés. Sur ce sujet, "il faudra que nous ayons un débat à l'Assemblée nationale" a indiqué Robin Reda.

"Toutes les pistes sont à mettre en oeuvre, notamment dans le domaine de la prévention", a réagi de son côté Natalia Pouzyreff, en rapport avec l'organisation de séances de motocross encadrées par une association de Vaulx-en-Velin. Le programme doit "viser les jeunes avant qu'ils ne basculent dans la délinquance" a ajouté la députée LREM.

114 affaires de rodéos motorisés dans le Rhône depuis début 2021

Selon un bilan du parquet de Lyon, 32 enquêtes ont été ouvertes au premier trimestre de l'année 2021. Dix-huit auteurs ont été identifiés et onze majeurs ont été jugés en comparution immédiate. Certains ont été condamnés pour certains à de la prison ferme.

La loi du 3 août 2018 renforce les sanctions contre les rodéos motorisés. Elle prévoit une peine d'un an d'emprisonnement et 15.000 euros d'amende. Une sanction qui peut être portée jusqu'à cinq ans derrière les barreaux et 75.000 euros d'amende si l'auteur du délit a consommé de l'alcool ou des stupéfiants.

 

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