Municipales - coronavirus à Lyon : d'une victoire annoncée des Verts à l'incertitude d'un second tour

Que va-il-se passer entre les deux tours des élections municipales à Lyon et dans la Métropole ? Pour les analystes, le vide juridique est total. Seule certitude : la vague verte l'emporterait au 1er tour.

Le second tour aura-t-il lieu, ou pas ? Que va annoncer le président de la République Emmanuel Macron ce soir à 20h ? 

En temps normal, juste après les résultats du premier tour des élections municipales, les candidats encore présents ont jusqu'au mardi 18h00, pour déposer leur liste en Préfecture, voire leurs alliances, pour le second tour.


Le parti  LREM a demandé à ses candidats de suspendre leur campagne. "Nous traversons une crise historique face à laquelle nous devons faire bloc, rester unis. Toute notre attention, toute notre énergie, doivent aujourd’hui être tournées vers la bataille contre ce virus", déclare Stanislas Guérini, délégué général du parti présidentiel.
 

La vague verte, l'échec de Collomb

Les Verts se sont hissés aux portes du pouvoir à Lyon en parvenant largement en tête du premier tour des municipales et des métropolitaines, mettant en grande difficulté les troupes LREM de Gérard Collomb, minées par les divisions.

L'écologiste Grégory Doucet, encore inconnu il y a quelques semaines, atteint la tête du premier tour des municipales avec un score sans précédent dans cette ville de 28,4%, devançant Etienne Blanc (LR, 17%) et le poulain de Gérard Collomb, l'ancien gymnaste Yann Cucherat (LREM), qui n'a pu dépasser les 14,9%.

L'actuel premier adjoint de Collomb en rupture avec lui, Georges Képénékian, arrive quatrième avec 11,9% des voix. Ce dernier s'était rallié avant le scrutin à David Kimelfeld, autre ancien proche de Collomb devenu son adversaire pour l'élection métropolitaine, dont le premier tour s'est tenu en même temps que les municipales.

"La division ne paie jamais. Quand on se divise, on en subit les conséquences et c'est ce qui se passe ce soir", a constaté sur notre antenne  un Gérard Collomb amer dimanche soir dans une très brève déclaration.

Pour le baron lyonnais, la déroute a été complète puisqu'il a même dû s'incliner face à la candidate EELV dans son fief du 9e arrondissement.

Pire : ses listes n'arrivent en tête dans aucune des 14 circonscriptions aux élections pour la métropole, dont il briguait pourtant la présidence.

"Nous ne nous étions pas trompés, Lyon est audacieuse et Lyon a l'âme écologique", a salué de son côté Grégory Doucet en conférence de presse. EELV n'avait recueilli que 8,9% des suffrages en 2014, mais avait déjà grimpé à 20,9% lors des Européennes l'année dernière.
 

"Il nous reste une semaine"

"Nous ne pouvons pas nous arrêter au milieu du gué. Il nous reste une semaine pour être pour de bon au rendez-vous de l'histoire", a exhorté l'écologiste lyonnais de 46 ans, dont la joie était contenue malgré la performance de ses listes, son parti ayant demandé dimanche le report du second tour pour cause de crise sanitaire majeure.

A noter que l'opposante historique de Gérard Collomb, Nathalie Perrin-Gilbert (soutenue par LFI), pourra aussi se mêler à la bataille du second tour après avoir glané 10,1% des suffrages lors de ce scrutin à très faible participation à Lyon (38,9%).

Le succès est total côté Verts puisque leurs listes parviennent également en tête dans 8 circonscriptions pour les métropolitaines, avec une moyenne de 22,5% des voix, devant les Républicains (en tête dans quatre).

"Nous sommes aujourd'hui dans une situation favorable, avec des scores qu'on n'a jamais atteint dans nos territoires. L'époque Collomb est plutôt révolue si j'en crois les résultats dont je dispose", déclarait en milieu de soirée le candidat EELV à la métropole Bruno Bernard.

Interrogé sur d'éventuelles alliances pour consolider sa victoire, Bruno Bernard a préféré mettre en avant la gravité de la situation sanitaire, ignorant - pour l'instant - les appels du pied de David Kimelfeld qui a appelé à l'union de "projets similaires". "Les questions de l'environnement doivent être au coeur d'un projet", a entonné en écho son lieutenant à la ville Georges Képénékian.

David Kimelfeld peut savourer un début de revanche après qu'En Marche lui a préféré Gérard Collomb pour mener le parti présidentiel aux métropolitaines, ses listes figurant en bonne place dans plusieurs circonscriptions de la métropole.
 

Le clap de fin de Gérard Collomb ?

Pour Romain Meltz, chercheur associé au laboratoire Triangle à l'ENS de Lyon, "la stratégie de Gérard Collomb de miser sur son nom pour porter une majorité avec de jeunes candidats n'a pas fonctionné. Pour les Verts, le pari risqué sur des candidats peu connus, effacés derrière le message écologique, a à l'inverse fonctionné alors que c'était risqué". 

L'extrême dispersion des voix lors de ces élections laisse la porte ouverte au second tour à des triangulaires, voire des quadrangulaires dans nombre de circonscriptions. Les candidats ont jusqu'à mardi pour éviter ce scénario en fusionnant leurs listes.

M. Meltz avance que ces résultats ouvrent la voie à un accord entre EELV et David Kimelfeld, mais il juge en revanche "compliqué" pour Collomb de s'entendre avec les Républicains vu la faiblesse des scores du maire sortant.

"C'est fini pour Collomb, la seule chose qui peut se passer en sa faveur c'est l'interruption du scrutin. Mais même là on voit mal comment il pourra récupérer tous les électeurs perdus", précise-t-il.
 

Vers un confinement total?

Un confinement total des Français est-il imminent, et les élections peuvent-elles être reportées ou annulées ? L'Elysée a démenti lundi 16 mars au matin, et la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a qualifié de "fake news" la rumeur qui courait dimanche soir d'un confinement immédiat à l'issue du scrutin.

Mais elle dit aussi que la situation sur le front de l'épidémie "se dégrade", le gouvernement prendra donc "toutes les mesures" qui permettront de "modifier en profondeur les comportements" des Français face au coronavirus. Car leur "prise de conscience" n'est pour l'heure "pas au rendez-vous", a-t-elle jugé, alors que les images de promeneurs dimanche sous un soleil radieux ont suscité de nombreuses critiques, à Lyon comme à Paris.
 

127 morts et 5.423 cas confirmés en France

La situation "est très inquiétante" et "se détériore très vite", a confirmé le directeur général de la Santé Jérôme Salomon, s'inquiétant d'une éventuelle "saturation" des hôpitaux.
Le dernier bilan dimanche soir fait état de 127 morts et 5.423 cas confirmés en France.
 

La grande incertitude à Lyon

Face à l'épidémie galopante, les politiques lyonnais sont plongés dans l'incertitude la plus totale.

Pour notre analyste politique Daniel Navrot (groupe Analyste-Prospective), cela doit provoquer un stress énorme chez les politiques, surtout les vainqueurs. Et les jeux d'alliances ou de division pourraient être compromis : "La situation est aujourd'hui très acrobatique. S'il y a un deuxième tour ou non, ça change tout. Le jeu d'alliance ne sera pas le même. Il faut attendre ce soir. Et encore on ne saura peut-être pas tout."


- Avec un deuxième tour décalé, est-ce que les listes des candidats seront identiques ?

"Si on reporte uniquement le deuxième tour, on vote quand ? Dans 1 mois, dans 6 mois ? Est-ce que l'offre électorale sera la même ? Le jeu des alliances risque d'être très différent. Certains pourraient finalement s'allier avec d'autres, ou se dissocier. On a trop de cas de figure différents. Imaginez les politiques, c'est très frustrant pour eux, surtout pour les vainqueurs ! Ils peuvent espérer les mêmes scores, mais rien n'est sûr. Imaginez que Macron se verdisse totalement. A la fin de son discours de jeudi, il a laissé entendre une nouvelle inflexion de sa politique. LREM pourrait avoir une attitude très différente avec les écologistes. Et si on doit voter dans 6 mois, qui sera encore présent ? Gérard Collomb se représenterait-il encore ? Donc tout le monde attend."


- Est-il possible juridiquement de reporter ou d'annuler l'élection? 

"On a un vide juridique total. Les juristes et les constitutionalistes sont en train de se déchirer et de s'écharper sur la question. La base, c'est en théorie l'unicité de l'élection."
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