PAUVRETÉ. "On risque de dépasser les 20 millions de repas distribués", l'alerte des Restos du cœur d'Auvergne Rhône Alpes

Le nouveau plan du gouvernement pour lutter contre la pauvreté va être présenté ce lundi 19 septembre à Matignon. Ce pacte des solidarités est particulièrement attendu sachant qu'avec l'inflation, les associations font face à un afflux de demandes et souffrent de difficultés financières. Point de situation avec les Restos du cœur en Auvergne-Rhône-Alpes.

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En Auvergne Rhône-Alpes, les Restos du cœur pèsent lourd : ce sont 15 antennes qui sont animées par plus de 8500 bénévoles dans près de 200 centres, "douze associations départementales et trois associations spécifiques", explique Laurence Regnault, responsable régionale. Ces dernières sont dédiées à l'insertion, au logement d'urgence ou encore aux vacances. La 38ᵉ campagne s'achève fin octobre et le tableau n'est pas réjouissant : les besoins sont toujours plus importants face à une inflation qui a plombé le budget des foyers. 

Le poids de la population

"En volume de personnes aidées, c'est le département du Rhône qui se détache du lot. Cinq millions de repas par an sont distribués", précise la responsable. Viennent ensuite les départements qui sont dotés d'agglomérations importantes, soit l'Isère avec Grenoble ou encore la Loire avec Saint-Etienne, puis la Drôme avec Valence. Mais difficile de faire des généralités. Si l'importance de la population pèse, la pauvreté n'épargne aucun territoire.

"Il n'y a pas de département plus pauvre qu'un autre", assure Laurence Regnault. Contre toute attente, ce sont les zones péri-urbaines qui tirent un peu mieux leur épingle du jeu face à des zones rurales moins dotées en équipements, éloignées des grands centres urbains et dont la population est souvent vieillissante et moins mobile.

Les personnes en difficulté en zone rurale, on les voit moins.

Laurence Regnault

Responsable régionale des Restos du coeur

 
Face à ces problématiques, les Restos sont loin d'être à court d'idées : "on a lancé des centres itinérants pour ces zones blanches". En Auvergne-Rhône-Alpes, l'association en comptait 8 pour la 37ᵉ campagne (2011-2022).

Et l'initiative serait même plutôt bien accueillie par les communes aux dires de la responsable régionale. L'Ain ferait d'ailleurs figure de pionnier. S'ajoute à cette disponibilité géographique, une souplesse pour les bénévoles qui peuvent s'organiser et assurer des distributions dans plusieurs communes en une journée grâce à des camions-épicerie. L'initiative, rendue possible grâce à l'engagement de partenaires privés de la grande distribution, a aussi reçu le soutien de la Carsat qui a financé des camions. Bénéfices pour l'association : des charges fixes moins lourdes et surtout la possibilité d'aller au plus près des populations en difficulté qui ne peuvent se déplacer. "Le lien et la proximité, c'est important pour l'association", rappelle Laurence Regnault. 

Besoins croissants

"La hausse du nombre de bénéficiaires et de demandes d'aide nous a surpris. Depuis la crise Covid, ça n'a cessé d'augmenter, mais là ça a bondi. C'est pourquoi Patrice Douret a pris la parole", explique la responsable régionale. De saisons estivales en campagnes hivernales, les besoins des bénéficiaires et leur nombre croissent toujours plus : "plus 23% lors de la dernière campagne, plus 30% rien que pour la campagne d'été... Et ensuite, ce sera quoi ? Ce n'est plus possible !", s'alarme-t-elle.

Les pourcentages, loin de fléchir, poursuivent leur courbe ascendante, mais jamais comme cet été. Lors de la 37ᵉ campagne des Restos, 15 millions de repas ont été servis dans la région. Soit environ 10% du nombre total de repas distribués en France. "Avec 30% de hausse du nombre de personnes aidées, on risque de dépasser les 20 millions", s'alarme Laurence Regnault. Et elle souligne à titre d'exemple la situation de l'Isère, "c'est l'un des départements de la région qui explose avec 35% de besoins en plus lors de cette dernière campagne."

"Double peine"

La situation financière difficile des Restos du cœur n'est pas uniquement due à une hausse du nombre de bénéficiaires. Les achats de produits entrent aussi en ligne de compte. Outre les dons et les grandes collectes, un tiers des biens distribués sont achetés. Et les Restos ont la volonté de développer les achats auprès de producteurs locaux "pour améliorer la qualité de ce qu'on distribue". Mais cette politique qualitative a un coût. L'association a distribué en région pour 7 millions d'euros de denrées lors de la dernière campagne chiffrée. La note a grimpé : +3,5 millions d'euros pour la seule région Auvergne Rhône-Alpes.

Avec l'augmentation du nombre de bénéficiaires, il faut aussi des bras, des denrées, des locaux, des camions, des chambres froides...

Laurence Regnault

"C'est la double peine : les besoins augmentent et les prix augmentent aussi", résume la représentante régionale des Restos. Et pour preuve : les centres qui recevaient jusqu'à 800 familles il y a deux ans, en accueillent aujourd'hui un millier, selon elle. Une hausse qui soulève aussi des problèmes logistiques et d'organisation.

Locaux, toujours plus chers

Et difficile de trouver des locaux adaptés qui peuvent accueillir jusqu'à 1200 familles. Des réflexions sont menées pour ouvrir de nouveaux centres à Lyon ou Villeurbanne. Mais surtout des centres à taille humaine.

Aujourd'hui, l'association de Coluche se dit aussi victime de la pression immobilière et foncière. Les locaux sont de plus en plus difficiles à trouver ou sont récupérés par les propriétaires. "Lorsque l'on n'est pas relogé, on prend des baux commerciaux et ils sont chers", indique Laurence Regnault.

En résumé, pour la responsable régionale, les aides financières doivent augmenter, même si les récents gestes, spectaculaires et médiatisés, sont un coup de pouce appréciable. "Tout don est recevable : de la petite mamie qui donne 5 euros, à Monsieur Arnault (NB: le propriétaire de LVMH, numéro un du luxe) qui donne 10 millions aux Restos. Et pour le bénévolat, c'est la même chose, c'est l'engagement qui compte. On a besoin de dons, mais aussi de bénévoles", assure-t-elle.

Car la mission de l'association ne se limite pas à la distribution de denrées alimentaires. L'une d'elle, et non des moindres, est aussi l'insertion et l'accompagnement. "Patrice Douret a créé un électrochoc. Des décisions stratégiques ont été prises pour sauvegarder les finances et ne pas mettre la clef sous la porte, mais il a aussi voulu protéger les bénévoles", conclut la responsable régionale.

Début septembre, le président des Restos du cœur jetait un pavé dans la mare en annonçant 150 000 bénéficiaires potentiellement privés de distribution alimentaire cet hiver. La région serait fatalement impactée. L'avertissement a soulevé une vague d'émotion et d'inquiétude. À juste titre. Les Restos du cœur représentent aujourd'hui 35% de l'aide alimentaire en France. 

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