Depuis l'ouverture du procès de B. Preynat le 13 janvier, un public nombreux se presse au tribunal correctionnel de Lyon. Chaque jour, les anonymes remplissent la salle d'audience. Qui sont-ils ? Et pourquoi un tel intérêt pour cette affaire ?
Dans la foule, des anonymes, des étudiants en droit. Mais surtout d'anciens scouts, des habitants de Sainte-Foy-lès-Lyon. Et des parents de victime potentielle. Tous les matins, une longue file d'attente se forme aux portes du tribunal correctionnel de Lyon pour assister à l'audience. Avec ou sans lien avec B. Preynat, le procès ne laisse guère indifférent.
A la recherche de ses propres réponses
Nous croisons une habitante de Sainte-Foy-lès-Lyon qui nous précise qu'elle a deux enfants, scouts pendant 4 ans dans le groupe de Preynat au début des années 80. « L'un m’a dit qu’il ne s’était rien passé. Le plus grand, quand il avait 12 ans, il avait complètement changé d’attitude. Il ne voulait plus sortir de la maison, il n’allait plus dans la cour jouer avec les autres. Il n'était pas bien, mais il n'a jamais voulu en parler".
Cette paroissienne de Saint-Luc a découvert l'affaire Preynat en 2016. Assister au procès, pour elle, est une nécessité pour "essayer de comprendre", alors qu'elle dit ne toujours pas savoir "s’il s’est passé quelque chose ou pas" pour son fils aîné. "Je lui ai demandé s’il voulait venir avec moi, il n’a pas voulu assister à l'audience. Moi, je veux en savoir plus".Je ressens du dégoût
Quitte à ce que les déclarations de B. Preynat à la barre interrogent encore un peu plus. "Qu’il faisait ça dans les bus lors des camps de scouts alors que mon fils est allé en Corse. Qu'il y avait 4 ou 5 enfants à qui…" Impossible de finir la phrase. Sentiment de dégoût.
J'ai l'impression d'avoir été utilisée
Agnès, elle-aussi est là "pour comprendre". D'autant plus qu'elle a été scout, "cheftaine à Saint-Luc". Agnès a quitté le groupe au tout début des années 80, et elle a été "sidérée" de découvrir par la suite toutes les agressions. "En tant que cheftaine, je n’ai rien vu. Rien, rien." Le procès, les révélations génèrent chez Agnès "de la colère, et surtout une confiance trahie. J’étais jeune adulte, et j'étais cheftaine dans un esprit de service, avec de la bienveillance. Là, je me dis que ma présence a été utilisée et a servi à ce système mis en place par Preynat".
Le procès de B. Preynat pose également question pour un conciliateur de justice auprès de la Cour d'appel de Lyon. L'homme acquiesce à l'idée que l'audience ne laisse personne insensible : "j’ai été très éprouvé par les témoignages de ces personnes qui ont été victimes de ces actes sexuels."
Mais s'il a rejoint le public, c'est pour des raisons très personnelles. Il habitait le même quartier que le prévenu à Sainte-Foy-lès-Lyon. Et surtout : "J’ai connu Bernard Preynat à La Favorite, où ma fille était au catéchisme avec lui. Et je trouve lamentable ce qui s’est passé. Parfois, je me pose des questions avec mon épouse : de savoir ce que l’on aurait fait à la place des victimes, à la place de leurs parents."
Un procès qui ne laisse personne insensible
Bérengère est étudiante en droit, "à la fac catho de Lyon". Elle assiste au procès pour se documenter et en apprendre un peu plus sur le déroulement d'une procédure au cœur de l'actualité.
Pas de lien personnel avec le dossier. Ce qui n'empêche pas de ressentir des choses. "C’est très poignant. C'était assez intense d'écouter le témoignage des victimes. Il y a de l’émotion". Bérengère trouve le prévenu, "un peu spécial", le trouve "hésitant", essaye d’analyser son comportement. "Je trouve tout cela passionnant".
Cela fait deux jours que Bérengère assiste à l'audience. Parce qu'il y a là toute "une histoire dont elle aimerait connaître la fin".