Il y a un an, le nom de Samar Antoun a fait le tour du monde : la directrice d’école s’est interposée, une nuit d’émeutes faisant suite à la mort de Nahel à Nanterre, pour empêcher la détérioration d'un l'établissement scolaire.
“Ne touchez pas à l’école !”. Un cri qui a fait le tour du monde. Un cri qui a empêché les émeutiers de piller l'établissement. Un cri, un acte impulsif, auquel Samar Antoun “n’a pas réfléchi”. “Je vous avoue que j'ai inconsciemment réagi et je ne me rappelle pas du tout avoir traversé la rue et entrer dans cette zone... un peu électrique. C'est juste la vidéo qui me rappelle ce qu'il s'est passé”.
"Courageuse inconsciente"
La vidéo qui l’a immortalisée dure sept secondes. Cette directrice d’une maternelle de Villeurbanne court, dans la nuit et les flammes, pour s’interposer face aux émeutiers qui menacent l'école élémentaire Grand Clément. Les jeunes sont en colère, deux jours après la mort du jeune Nahel sous la balle d’un policier, à Nanterre. “Pas l’école s’il vous plaît !”. La scène est filmée par un riverain de Villeurbanne et devient virale sur les réseaux sociaux.
Le lendemain, "des parents qui passent me disent bravo, félicitations, bravo, mais pour moi, c'était une panique complète et puis je vois aussi des médias qui arrivent”. Plutôt discrète, la franco-libanaise hésite à témoigner. Elle refuse la casquette d’héroïne. Elle préfère se décrire comme “une courageuse inconsciente ou une inconsciente courageuse”.
Courageuse et déterminée, la directrice n'est pas du genre à se laisser intimider. “J'ai très peu dormi cette nuit-là, vous vous imaginez bien... Mais le lendemain de ces émeutes, nous avions une représentation chorale devant les familles. On s'est dit non, on ne va pas céder, on va quand même la faire alors qu'on entendait encore des mortiers dans le quartier.”
Un message clair
Un an après, Samar Antoun est fidèle au poste. Dix classes et 190 élèves à gérer. À la rentrée, la directrice a eu “l’honneur de recevoir les Palmes académiques” de la part du ministre de l’Éducation, Gabriel Attal.
Aujourd’hui, alors que son devoir de réserve l’empêche de commenter l’actualité politique, elle affirme comprendre ces jeunes et ne pas leur en vouloir. “Je sais qu’ils sont mal, il y a un vrai mal-être et je sais que tout ça n’était pas dirigé contre moi. La seule question que je pose, parce qu’ils étaient très jeunes, c'est que faisaient-ils dehors à cette heure-là ?”.
L’été dernier, Samar Antoun est passée tous les jours devant son école, qui était restée ouverte pour travaux. Sa détermination reste intacte et son message, clair. “On ne touche pas aux écoles, c’est ce que j’ai crié ce jour-là et je le pense vraiment. Au Liban, même en temps de guerre, les écoles, elles étaient épargnées, c’est un sanctuaire, un endroit sacré”.