"Vénissieux va bientôt ressembler aux quartiers nord de Marseille si ça continue", le ras-le-bol après une nouvelle fusillade

Trois personnes blessées par armes à feu en pleine rue, c'est le nouveau fait divers qui secoue le quartier des Minguettes, à Vénissieux, au sud de Lyon. Une fusillade de trop pour Mokrane Kessi, acteur associatif historique du quartier et président de "France des banlieues".

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Dans la nuit du 19 au 20 octobre, des coups de feu ont retenti sur l'avenue Maurice Thorez à Vénissieux, dans le quartier des Minguettes. Les policiers sont intervenus vers 1 h 40.  Trois personnes auraient été blessées. Le parquet de Lyon indique que deux personnes ont été interpellées et placées en garde à vue.

"On commence à en avoir l'habitude"

S'il est encore trop tôt pour savoir si cet épisode de violence est lié au trafic de drogue, il s'ajoute à d'autres coups de feu tirés Vénissieux. "Je ne l'ai pas vu passer sur les réseaux sociaux, s'étonne Mokrane Kessi. C'est terrible peut-être qu'on commence à banaliser cette violence, qu'on commence à en avoir l'habitude. "

"On ne se rappelle même plus quand ça s'est tiré dessus. On va bientôt être comme dans les quartiers nord de Marseille."

Mokrane Kessi, président de l'assocation "France des banlieues"

Cet héritier de la "Marche des Beurs", une marche dont l'idée est née aux Minguettes après un été de violences en 1983, a vu changer son quartier avec les années et disparaître le tissu associatif. "Après la marche, on a créé des associations, on a fait du soutien scolaire. Il y avait une effervescence, jusqu'à la fin des années 90, c'est ainsi qu'on a jugulé la délinquance. Les robinets ont été coupés, on n'arrive plus à avoir un local pour les associations, il n'y a plus de police de proximité, les adultes référents ont disparu."

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"C'est entré dans les mœurs de charbonner"

Pour lui, cet abandon des territoires a participé à favoriser l'entrée des jeunes dans les trafics. "Ils sont livrés à eux-mêmes et l'argent a pris le dessus : les gamins ont de belles bagnoles, des vêtements de marque ... " Cannabis, cocaïne, protoxyde d'azote, selon l'acteur associatif, des adolescents se trouvent pris dans les réseaux de trafic de stupéfiants dès 12 ans.

"C'est fini le jeune de quartier qui deal de façon artisanale pour se faire un peu de thune. Aujourd'hui, ce sont de vrais réseaux, des clans qui tiennent des portions de territoire, qui font monter des gamins de Vaulx-en-Velin à Paris et des gamins de Marseille à Vénissieux pour les faire travailler."

Mokrane Kessi

"Ça se banalise tellement que pour les adolescents, c'est juste un commerce. C'est entré dans les mœurs de tenir un hall, une colline, de charbonner... C'est aussi un amusement, il n'y a plus rien pour les jeunes dans le quartier", se désole Mokrane Kessi. 

"On est livré à nous-même"

Un climat de violence que subissent les habitants, "les enfants de sept ans sont exposés à cette violence". Selon l'acteur, la cohabitation continue, bon gré, mal gré.  "C'est hyper violent, entre eux, ils se tirent dessus, mais les jeunes continuent de respecter les tontons et les mamans. Cet été, des jeunes se sont implantés au pied de l'immeuble de ma mère. Ce sont les habitants qui sont allés les voir. Les jeunes se sont décalés, mais vous voyez, on est livré à nous-même." 

"Il n'y a plus de volonté politique de changer les choses dans les quartiers, il n'y a plus de plan, on est abandonné et pendant ce temps les gamins se tirent dessus dans le quartier."

Mokrane Kessi

Pour l'acteur associatif, un plan ambitieux doit être mis en place, "en impliquant les acteurs locaux, les jeunes et en favorisant la reformation du tissu associatif". Pour lui, la légalisation du cannabis serait aussi une solution, "c'est trop tard pour démanteler tous les réseaux. Je ne dis pas que ça va être facile, mais je ne vois pas d'autre solution, parce que pendant ce temps, nous, on vit dans des quartiers où ça tire". 

Une légalisation qui fait débat depuis plusieurs années. Le Conseil économique, social et environnemental s'est dit favorable à une légalisation encadrée en début d'année, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin y est opposé. Emmanuel Macron est passé d'une réflexion sur la légalisation en 2016, à un refus de changement. 

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