Une famille de Décines-Charpieu (Rhône) accuse l'entreprise Béton Lyonnais de polluer l'environnement, alors qu'elle est située au-dessus d'une zone de captage d'eau de la métropole de Lyon. Les autorités n'ont pas détecté de pollution de la nappe phréatique.
Dans le noir… En plein jour. Et depuis 7 mois. Dans leur maison, Mélissa Ghommam et sa famille sont privées de lumière, à cause de l'entreprise voisine, qui a obstrué une partie de leurs fenêtres en stockant des matériaux et en édifiant un mur juste devant les vitres. Une des facettes d'un conflit de voisinage qui s'envenime. Depuis plus de 3 ans, Mélissa Ghomman multiplie les procédures judiciaires contre l'entreprise. Elle l'accuse de nuisances multiples et la soupçonne de polluer l'environnement.
Mises en demeures à répétition
Entre les murs qui parcourent aussi le jardin des Ghommam, Mélissa observe ce que dévoilent des fissures : "Il y a plein de déchets de chantier : des tuyaux rouillés, des polystyrènes et des sacs qui se décomposent ou des bidons vides dont on ne connait pas la contenance". Or Béton Lyonnais se trouve en partie sur une zone de "protection rapprochée", à savoir une nappe phréatique, susceptible d'alimenter une partie du réseau d'eau potable de la métropole de Lyon.
La Mairie et la Métropole de Lyon ont également multiplié les signalements auprès des autorités pour dénoncer diverses infractions et suspicions de pollutions. Ensemble, elles ont saisi la DREAL (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement), et le procureur de la République, pour s'assurer que les sanctions déjà prises à l'encontre de l'entreprise soient appliquées.
La DREAL a en effet multiplié les contrôles depuis 2011, et mis en demeure l'entreprise à 4 reprises depuis 2019 pour des infractions constatées sur place, tels qu'un forage illégal, des rejets d'eaux non traitées, ou encore la présence illicite de déchets.
Pas de pollution avérée
L'entreprise n'a pas souhaité s'exprimer, mais son avocat, Christophe Neyret, prend la parole : il rappelle qu'il s'agit essentiellement d'un conflit de voisinage. Or pour lui, si la famille subit des nuisances, elle « connaissait l’environnement. Elle a acheté la parcelle alors que l’entreprise de béton était déjà présente depuis longtemps ». Surtout, il rappelle qu'aucune pollution n'a été constatée suite aux divers contrôles et relevés opérés par les autorités dans la nappe phréatique.
S'il reconnait les mises en demeure, il avance que certaines ont été contestées et qu'à ce jour "aucune décision définitive n'a été prononcée." D'autres ont mené à des travaux pour se mettre en conformité. "Ce matin [ndlr: jeudi 25 novembre] j’ai eu le bureau d'études qui nous accompagne et il nous confirme que tout est en règle" explique-t-il.
"Suite aux injonctions, il y a des mesures de contrôle tous les trimestres faîtes par l’entreprise. Toutes les mesures à l’heure actuelle n’ont jamais montré une pollution" explique Christophe Neyret.
Il avance également que son client s'est acquitté de toutes les amendes et les avenants qui lui ont été transmis.
Surveillance des autorités
Suite aux nouvelles plaintes déposée par la famille Ghommam en 2019, les autorités se sont saisies du dossier. Notamment la DREAL, dépendant de la préfecture.
Jean-Yves Durel, le chef de l'Unité du Rhône de la DREAL, confirme les propos de l'avocat de Béton Lyonnais : " il n’y a pas d’urgence environnementale majeure avérée et en particulier pour la nappe, il n’y a pas de pollution. Les derniers relevés faits par la métropole indiquent qu’il n’y pas de pollution à ce niveau-là."
Il poursuit : " A ce stade, les régularisations sont mises en œuvre par l’exploitant. Il reste encore un certain nombre de point à régulariser mais on est dans l’instruction normal des dossiers", explique-t-il. Et l'entreprise paiye bien ses amendes ainsi que ses astreintes.
Quant aux "déchets" que Melissa Ghommam dénonce, Jean-Yves Durel répond : " Après la dernière inspection (réactive à un complément de plainte), il s’est avéré que c'était des produits utilisés pour des adjuvants au béton. Dans le cas d’espèce, ils sont non polluants et en plus ils sont utilisés sur une dalle en béton ce qui fait qu’ils ne peuvent pas aller dans la nappe."
Changement de la Déclaration d'Utilité Publique
La DREAL rappelle par ailleurs qu'elle n'est compétente qu'en matière d'environnement et que visiblement dans ce dossier, de nombreuses facettes sont en jeu, notamment urbaine et donc de la compétence de la métropole.
La Métropole de Lyon affirme suivre cette affaire avec attention. Elle a également fait part de sa volonté de "changer sa Déclaration d'Utilité Publique (DUP)" car celle existante est trop ancienne, afin de "protéger au mieux" cette zone sensible.