"C'est à nous de montrer l'exemple" : l'éthique des chercheurs face au réchauffement climatique

Voyages en avion, achat d'équipements, consommation d’énergie : ces facteurs pèsent sur notre écosystème. Face à l’urgence climatique, la recherche scientifique doit repenser ses pratiques pour concilier progrès et respect de l’environnement. Est-il temps de réinventer la recherche pour préserver la planète ?

L'essentiel du jour : notre sélection exclusive
Chaque jour, notre rédaction vous réserve le meilleur de l'info régionale. Une sélection rien que pour vous, pour rester en lien avec vos régions.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "L'essentiel du jour : notre sélection exclusive". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

" L’empreinte carbone d’un laboratoire de biologie ne va pas avoir les mêmes postes d’émission de carbone qu’un laboratoire qui fait de la modélisation ", explique Alban Planchat, climatologue. L'empreinte carbone des laboratoires varie selon les disciplines, avec des sources de pollution différentes. Les déplacements sur le terrain, les voyages en avion, l'achat d'équipements et la consommation énergétique des infrastructures sont les principaux contributeurs.

Ces enjeux soulèvent un vrai dilemme : faut-il réorienter les recherches pour limiter leur empreinte environnementale ? Peut-on continuer certaines pratiques quand elles vont à l’encontre des objectifs climatiques ? Ces questions, difficiles à aborder, sont cruciales pour faire évoluer la recherche vers des pratiques plus durables. " En France, je trouve qu’il y a une prise de conscience et une volonté d’évoluer ", souligne Alban Planchat.

Un collectif pour réduire l'empreinte carbone

Plus d’un tiers des laboratoires publics français ont rejoint l'initiative. Labos 1 point 5, lancé en mars 2019, est un collectif qui tire son nom de l’objectif international de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C. Il souhaite emmener la communauté de recherche française dans une démarche de transformation, axée sur la réduction de son empreinte environnementale, sans sacrifier le métier.

Avoir de l’engouement c’est une chose, mais voir concrètement l’empreinte carbone des laboratoires diminuer, c’est une étape supplémentaire.

Alban Planchat, climatologue et membre du collectif Labo 1points5

Labos 1point5 se concentre sur trois axes : produire des connaissances, répertorier et diffuser, et faire émerger des solutions. Une méthode inédite a été mise en place pour calculer les émissions de gaz à effet de serre, poste par poste, dans chaque laboratoire. Résultat : si les déplacements en avion sont souvent pointés du doigt, ce sont en réalité les " achats " (équipements de recherche) qui génèrent le plus d’émissions.

La plupart des laboratoires participants ont fixé des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 35 à 55 %, d’ici six ans par rapport aux niveaux de 1990. Le collectif mène également des discussions avec les institutions pour élargir ces initiatives à plus grande échelle.

Des organismes politico-médiatiques en action

En France, un nombre croissant de chercheurs passent à l’action. " Je suis en Suisse, par exemple, et on est bien en retard par rapport à la France ", souligne Alban. Des organismes politico-médiatiques comme Scientifiques en rébellion et Atécopol (ATelier d'ÉCOlogie POLitique) s’engagent activement pour provoquer un changement concret.

Scientifiques en rébellion, la branche française de " Scientist Rebellion ", réunit des chercheurs de toutes disciplines qui se mobilisent contre l’inaction face au dérèglement climatique et la perte de biodiversité. Né après l’Appel des 1000 scientifiques à la désobéissance civile paru dans le journal Le Monde en 2020, ce groupe organise des actions non-violentes comme des blocages, des occupations et intervient dans des procès.

De son côté, Atécopol, lancé en 2018 à Toulouse, rassemble des scientifiques qui réfléchissent aux bouleversements écologiques et à la façon de changer les fonctionnements socio-économiques actuels.

Le sport comme outil de recherche

Cette année, Alban Planchat a traversé les Alpes en 112 jours, alliant défi sportif et scientifique : 3 420 km, dont 128 km à la nage, avec un sac de 18 à 28 kg. De plus en plus de scientifiques cherchent à réduire leur empreinte à travers leurs recherches. Alban en est un exemple frappant. " Mon objectif était de retranscrire le défi climatique à travers une aventure ", explique-t-il.

Le jeune homme de 28 ans a contribué à une étude scientifique du laboratoire EDYTEM dans le cadre du projet européen Lake-Switch. Il a réalisé 138 prélèvements dans des lacs alpins, apportant des données précieuses pour l’étude de l’impact du changement climatique sur l’érosion des sols alpins. " On a pu montrer que l’Homme, par ses activités, est devenu plus fort que le climat sur l’érosion et la dégradation des sols depuis 3800 ans ", explique William Rapuc, paléoclimatologue au laboratoire EDYTEM.

J’étais dans une espèce de transcendance physique, je ne me rendais pas compte de l’intensité des efforts. J’étais tellement déterminé.

Alban Planchat, climatologue qui a réalisé un défi sportif et scientifique en 112 jours

Le défi a mis Alban à l’épreuve. "Je voulais donner l'exemple sur cette problématique d'observations, mais je sais qu'on ne peut pas demander à tout le monde de faire de ça ", explique Alban. En Italie, sous une chaleur intense, Alban a connu une période d’épuisement intense, " mon corps a lâché, il n’a pas tenu… ça m’a beaucoup impacté ", admet-il.

Un comportement exemplaire

Alban Planchat a pris la décision radicale, il y a deux ans et demi, de ne plus utiliser de voiture. Certains scientifiques ont choisi de changer leur comportement pour aligner leurs actions avec leurs convictions écologiques. " Je me rendais compte que ma manière de me comporter n’était pas en accord avec ce que je pensais. ", explique-t-il.

Pour ces chercheurs, il s’agit de montrer qu’un changement est possible. " En tant que chercheurs sur le climat, c’est à nous de montrer l’exemple ", précise Alban. Cet engagement se traduit dans des actions concrètes, comme prendre le train ou le bus plutôt que l’avion pour se rendre à des conférences. " J’essaie de pousser pour éviter qu’on fasse des conférences à droite à gauche. Prendre l’avion pour ces événements, surtout en Europe, ne sert à rien ", insiste-t-il.

Dans L'info en + Climat sur France 3 Auvergne-Rhône-Alpes, Ariane Combes a interviewé Alban Planchat pour parler de son aventure de 112 jours dans les Alpes. A voir et revoir sur France.tv

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information