Luigi Di Maio, chef de file du Mouvement Cinq Etoiles (antisystème), qui a imposé à la Ligue (extrême droite) le principe d'une renégociation du Lyon-Turin dans leur programme commun, entend signifier à Paris que cette ligne ferroviaire "ne sert à rien".
Samedi, plusieurs milliers de personnes, dont des militants du Mouvement Cinq Etoiles, ont manifesté dans la Vallée de Suze (Alpes italiennes) contre ce projet d'un coût de 8,6 milliards d'euros - financé à environ 40% par l'UE - qui doit être achevé en 2030.
Le "contrat de gouvernement" entre le M5S et la Ligue, publié vendredi et actuellement soumis au vote des sympathisants, "bloque une oeuvre qui ne sert à rien", a estimé samedi M. Di Maio, de passage à Ivrea, dans la région de Turin.
le Lyon-Turin pouvait valoir quelque chose il y a 30 ans, mais ne sert plus aujourd'hui
"Nous irons parler avec la France et nous lui dirons que le Lyon-Turin pouvait valoir quelque chose il y a 30 ans, mais ne sert plus aujourd'hui", a-t-il lancé.
Il prévoit de présenter lundi le programme au président Sergio Mattarella avec l'objectif de former dans la semaine le premier gouvernement antisystème dans un pays fondateur du projet européen.
Dans leur "contrat de gouvernement", M. Di Maio et le chef de la Ligue, Matteo Salvini, s'engagent à "suspendre les travaux d'exécution" de la ligne ferroviaire et à "rediscuter intégralement le projet".
Le M5S a enfoncé samedi le clou sur son blog en jugeant que le contrat était "la pierre tombale d'une oeuvre inutile et profondément néfaste pour le pays" et en dénonçant "le lobby du ciment".
Mais la Ligue a tenté jusqu'au bout de maintenir le projet et les propos récents de M. Salvini sont bien moins tranchés.
"Il me semble que sur la ligne à grande vitesse Lyon-Turin, une réflexion est en cours également de l'autre côté des Alpes (en France)", a-t-il déclaré jeudi. "Nous ne créons pas un gouvernement pour démonter ou pour endommager (...). S'il y a des considérations en cours en France, il me semble nécessaire que nous fassions de même".
Des propos qui divisent
Giorgia Meloni, présidente de Fratelli d'Italia (FdI), a estimé que les propos de M. Di Maio étaient "surréalistes".
"L'avenir de l'Italie n'est pas une politique de 'non' qui bloquent tout, mais une politique qui décide d'investir dans la croissance économique de la nation et dans les infrastructures stratégiques", s'est-elle offusquée samedi sur Facebook.
Fratelli d'Italia fait partie de la coalition de droite avec Forza Italia (FI), le parti de Silvio Berlusconi (droite) et la Ligue de M. Salvini. Mais comme le vieux milliardaire, elle s'oppose au rapprochement avec M5S.
Anna Maria Bernini, chef de file de FI au Sénat, a jugé samedi qu'un blocage du projet "serait une folie" qui porterait atteinte à "la crédibilité du pays".
A l'automne, le président français, Emmanuel Macron avait assuré que son pays et l'Italie restaient "pleinement engagés" dans la réalisation de la ligne.
Le projet prévoit en premier lieu un tunnel de 57 km entre la vallée de la Maurienne (Savoie) et le Val de Suse, qui doit à la fois accélérer les liaisons passagers et transférer le transport de fret de la route vers le rail. Le projet est contesté depuis de longues années, en particulier par les associations de défense de l'environnement.