Michel Barnier peut-il devenir le candidat officiel des Républicains à la présidentielle ? Les militants se prononceront le 4 décembre. Troisième dans les sondages, le Savoyard, qui entend "réconcilier les Français", croit en ses chances.
Troisième homme de la course ou "Joe Biden à la française"? Michel Barnier mise sur sa fidélité à LR pour tenter de devenir, à 70 ans, le candidat de la droite à la présidentielle.
Mercredi 6 octobre, devant les étudiants d'Assas, jeudi au salon de l'élevage de Cournon (Puy-de-Dôme), vendredi à la rencontre des militants LR de Saône-et-Loire, l'ancien négociateur de l'UE pour le Brexit porte un message immuable de "respect" et de "rassemblement". "Je veux être le président de la réconciliation des Français", répète-t-il, avec en ligne de mire le congrès LR du 4 décembre où les militants choisiront leur candidat.
Dans cette course, ses partisans assurent que Michel Barnier, que "personne n'a vu venir", pourrait créer la surprise. "Il y a un intérêt qui va tourner à l'engouement autour de sa candidature", assure Daniel Fasquelle, trésorier de LR et soutien de la première heure. Dans l'entourage du Savoyard, on date ce regain d'intérêt de la rentrée des jeunes LR, début septembre, puis des journées parlementaires de Nîmes. "On sent une montée en puissance chez les parlementaires", assure la députée de Paris Brigitte Kuster.
Une première liste de 52 parlementaires le soutenant a été dévoilée la semaine dernière. "C'est un grand monsieur", affirmait mi-septembre l'influent président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez, dont le soutien est précieux chez LR.
Mais dans les sondages, Michel Barnier fait toujours figure de "troisième homme", avec un sérieux retard : Harris interactive le créditait mercredi de 7% seulement au premier tour (dans l'hypothèse d'une candidature Zemmour), derrière Xavier Bertrand (13%) et Valérie Pécresse (11%). "J'ai des marges de progrès", reconnaît-il, "et je les remplis progressivement".
Il peut gagner grâce à sa fidélité
Il semble notamment avoir les faveurs des adhérents LR qui seront les seuls à choisir le candidat. On se félicite, dans son camp, d'un récent sondage Odoxa lui donnant dix points d'opinions favorables de plus chez les sympathisants de droite en deux mois. Comme il le répète à l'envi, Michel Barnier n'a jamais quitté LR - à l'inverse de Xavier Bertrand et de Valérie Pécresse. "Il peut gagner grâce à sa fidélité" affirme une députée. D'autant que "c'est tout sauf Bertrand dans les fédérations", ajoute un autre.
Au delà de la loyauté "il incarne beaucoup dans notre famille", du côté de la "droite sociale, européenne", explique un cadre de LR qui cite "la méthode empreinte de dialogue, de rigueur, de sobriété" de celui qui se décrit comme "patriote et européen".
Dans le camp Pécresse, on nuance le récit. Les militants "apprécient Barnier mais quand il s'agit de désigner le candidat pour aller cogner Macron ils se disent qu'il y a un petit décalage de personnalité et d'entrain", affirme un soutien. "Il a de la hauteur de vue, il est intelligent. Mais peut-il gagner face à Macron ?" s'interroge un élu pro-Bertrand, selon qui "le problème, c'est que c'est le moins bon candidat qui risque de sortir".
Car Michel Barnier a 70 ans et une longue carrière politique derrière lui, entamée comme élu en 1973. Certains le comparent au président américain Joe Biden, âgé de 78 ans. "Je peux me reconnaître dans sa persévérance et sa ténacité, cependant je suis beaucoup plus jeune que lui", réplique, impavide, l'ancien ministre. "Sa stature, sa sagesse, constituent en fait des atouts", assure Brigitte Kuster qui vante un "anti-Macron".
Dans cette course à l'investiture, Michel Barnier joue aussi de sa stature internationale, se déplaçant à l'étranger, émaillant ses interviews d'expressions en anglais et rappelant, livre de souvenirs à la main, son expérience réussie de négociateur du Brexit. D'où la stupéfaction suscitée par ses propositions de référendum sur l'immigration et de remise en cause de la Cour européenne de justice au nom de la "souveraineté juridique".
"Je n'ai aucune leçon d'engagement européen à recevoir", réplique l'ancien commissaire européen face au déluge de critiques en reniement. Car il en est convaincu : il faut écouter la "colère sociale" qui couve, et "si on ne change rien, il y aura d'autres Brexit".