Réchauffement climatique : le ski d'été a-t-il encore un avenir dans les Alpes ?

Sites incontournables pour les amateurs de ski d’été, les glaciers de Tignes, en Savoie, et des Deux Alpes, en Isère, viennent de fermer avec trois semaines d’avance. A cause de la chaleur et de la fonte anticipée du manteau neigeux, "les conditions n’étaient plus réunies". Professionnels de la montagne et scientifiques font le même constat : le réchauffement climatique aura bientôt raison de cette pratique estivale.

Depuis le début du mois de juillet, les signaux d'alerte s’enchaînent dans les Alpes. Le premier jour du mois, la station de Tignes, en Savoie, annonçait la fermeture du glacier de la Grande Motte faute d’enneigement. Deux jours plus tard, le 3 juillet, un pan du glacier de la Marmolada s’effondre dans les Alpes italiennes, faisant au moins sept morts et de nombreux disparus. Le 6 juillet, c’est au tour du glacier des Deux Alpes de fermer son accès aux skieurs avec trois semaines d’avance.

Autant de signaux qui convergent tous vers la même cause : le réchauffement climatique.

"Pas de résistance ni d'acharnement"

Face à ces alertes rouges envoyées par la planète, les professionnels du secteur sont réalistes : le ski d’été n’en a plus pour longtemps. "C’est difficile de se projeter dans le temps, reconnaît Frédéric Bonnevie, le directeur de la régie des pistes de Tignes, où la saison de ski d’été n’a duré que deux semaines. Nous n’avons jamais fermé aussi tôt. Tant que le ski d’été sera possible, on le fera. Mais il n’y aura pas de résistance ou d’acharnement".

Après le site de la Grande Motte, le seul glacier d'été encore ouvert dans la région était celui des Deux Alpes. Mais l'arrêt brutal de la saison dès le 10 juillet, faute d'enneigement, laisse un goût amer à Fabrice Boutet, directeur général de SATA Group qui exploite les domaines de l'Alpe d'Huez, des Deux Alpes et de La Grave. "On ne se voile pas la face, d’ici 10 à 20 ans, on aura beaucoup de difficultés sur le ski d’été. La situation qu’on a connue dans les années 80, où on glissait jusqu’à fin août, on n'y reviendra jamais. C’est terminé, se désole-t-il. Il est clair que ce ski-là n’existera plus. Ça fait mal au cœur, surtout quand on voit que ce glacier a reculé de 30 à 40 mètres par rapport à quand j’étais jeune".

1,7 milliard de tonnes de glace disparaissent chaque année

Ce constat fait sur le terrain se vérifie aussi dans les chiffres. D’après les données d’une étude internationale publiée dans la revue scientifique Nature en avril 2021, les Alpes font partie des zones du monde où les glaciers fondent le plus rapidement.

A l’échelle de la planète, les glaciers perdent 267 milliards de tonnes de glace en moyenne par an. Pour la zone des Alpes, environ 1,7 milliard de tonnes de glace ont disparu en moyenne chaque année entre 2000 et 2019.

Un montage photo de la Mer de Glace, à Chamonix, illustre la vitesse à laquelle la situation se dégrade. Sur son compte Twitter, le géomorphologue Melaine Le Roy a publié deux images prises à douze ans d’intervalle. Et la fonte du glacier est largement visible à l’œil nu.

"Des collègues suisses ont montré qu’à la fin du siècle, on devrait perdre entre 85 et 95 % des surfaces glacières dans les Alpes, renchérit Ludovic Ravanel, géomorphologue au CNRS. Donc forcément, on ne va pas vers les bons jours pour le ski d’été".

Vers un ski de printemps ?

Selon le chercheur, la disparition de cette activité estivale se joue à court terme : "Pour continuer à pratiquer, il faudrait revenir à des hautes altitudes comme au Col du Midi, mais les glaciers là-haut sont très crevassés. Pour les sites actuels, il faut s’attendre à ce que la durée de skiabilité l’été soit de plus en plus courte".

Une saison d’été plus courte… pour une saison d’hiver plus longue ? Les professionnels de la montagne préfèrent voir le verre à moitié plein. "Le ski d’été disparaîtra peut-être mais on fera aussi des saisons plus longues jusqu’en mai", se console Fabrice Boutet. "Les conditions de ski sont excellentes en mai et en juin", conclut avec optimisme Frédéric Bonnevie, pour qui la saison du "ski de printemps" remplacera bientôt celle du ski d’été.

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