Portrait. A 22 ans, le coureur de la formation savoyarde AG2R La Mondiale Romain Bardet a découvert le Tour de France, samedi 29 juin. "Le Graal des cyclistes", c'est pour lui un émerveillement qu'il entend maîtriser pour pouvoir remplir au mieux son rôle d'équipier.
Dès jeudi, il a connu "la chair de poule" lors de la cérémonie de présentation des équipes. "Mais j'essaie de ne pas changer mon approche par rapport aux autres courses pour ne pas me laisser happer par la pression extérieure. Je suis presque moins stressé que sur mon premier Paris-Nice en début de saison", confie Romain Bardet.
Le jeune homme est entré dans le grand monde, le circuit WorldTour, depuis un peu plus d'un an et il a déjà à son actif quelques coups d'éclat, comme son échappée sur l'Amstel Gold Race (25e) et le Tour de Lombardie l'an dernier et sa 13e place sur Liège-Bastogne-Liège en avril. Il a senti venir sa sélection pour la Grande Boucle, l'annonce n'a été qu'une "demi-surprise".
"Il a beaucoup de talent, il est capable de grimper au haut niveau et d'être offensif", souligne son manager Vincent Lavenu qui l'a recruté en 2010 alors qu'il était courtisé, y compris à l'étranger. "Il est prévu pour rester le plus longtemps possible aux côtés de Péraud (son leader sur le Tour) dans la montagne et aussi de chercher les ouvertures".
Le grimpeur filiforme (1,84 m, 65 kg), fan dans son enfance de David Moncoutié "pour sa classe naturelle et son détachement", aime "faire la course à l'avant" et entend bien profiter du Tour. "Mais quand on n'est pas dans les cinq meilleurs grimpeurs, si on attend le final, il y a peu de chances de gagner. Il faudra que j'anticipe", détaille-t-il.
"Je n'ai fait aucun Grand Tour. Attaquer à 22 ans, directement par le Tour de France, c'est un gain de temps, je vais apprendre plus vite", estime le coureur issu de la génération de Thibaut Pinot, Nacer Bouhanni et Johan Le Bon.
Etudes de management
L'enfant de Brioude (Haute-Loire) aime apprendre. Après une licence de droit public, il suit actuellement à distance un Master de management. Il a validé sa première année la semaine dernière, à quelques jours des Championnats de France.
"J'ai besoin de ça, c'est une soupape de sécurité, explique-t-il. Ca permet de couper avec le monde du vélo. Je suis perfectionniste, toujours en quête d'optimisation de performance, de faire des recherches sur ce qui se fait aux Etats-Unis sur la diététique etc... et ce n'est pas bon au bout d'un moment".
"Sportif, c'est une vie spéciale et j'ai besoin de me sentir vivant socialement. Ça me permet aussi de me sentir éveillé intellectuellement, ça m'enrichit. Lors de ma première année pro, j'avais l'impression de beaucoup perdre, de vivre dans une bulle, de passer à côté de plein de choses de l'actualité", raconte-t-il.
Ce profil atypique, ajouté à un potentiel indéniable de grimpeur, attire l'attention des médias. "Mais je ne veux pas qu'on s'intéresse à moi parce que je suis le plus jeune Français du Tour ou parce que je fais des études à côté, prévient-il. J'aimerais que ce soit pour mes performances sportives, mes résultats. A moi de faire en sorte que ce soit pour ça".
Les cols pyrénéens seront son terrain d'expression, mais il sait que la concurrence sera rude. "Sur le Tour, les seconds couteaux, entre guillemets, qui jouent les victoires d'étape en baroudeur sont des champions: des Voeckler, des Jens Voigt, des Luis Leon Sanchez... Ce sera compliqué. Il ne faudra pas rater les opportunités parce que 21 étapes, je pense que ça passe très vite."