« Matin brun » est une nouvelle très courte qui dénonce le totalitarisme et la pensée unique. Franck Pavloff, son auteur, participait ce jeudi 10 décembre à la « quinzaine du vivre ensemble », organisée par les bibliothécaires du plateau Vivarais-Lignon.
« Matin brun » raconte un monde où tout doit être brun, les chiens, les chats, les journaux, les idées…
Le livre est paru aux éditions Cheyne du Chambon-sur-Lignon en 1998. Il a connu un énorme succès quatre plus tard, après l’élection présidentielle de 2002 marquée par la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour.
Aujourd’hui, « Matin brun » a été tiré à 2 millions d’exemplaires, traduit en 25 langues et a été adapté plusieurs fois au théâtre !
Rencontre avec son auteur, Franck Pavloff.
France 3 Auvergne : Ce matin, vous avez rencontré des collégiens de Tence pour leur parler de « Matin brun », quel message vouliez-vous leur faire passer ?
Franck Pavloff : Le message ? Ouvrez-vous, allez vers les autres ! Je ne veux pas me lancer dans une dénonciation, comme on pourrait le faire dans cet entre deux tours des Régionales, mais je veux leur dire qu’ils doivent être responsables de leur liberté, de ce qui va nous arriver.
Et la liberté, c’est d’aller vers les autres, empêcher de se laisser enfermer par des peurs, peur des étrangers, du chômage, des maladies transmissibles !
France 3 Auvergne : Il est important de s’adresser à des jeunes de cet âge là ?
FP : Avec les adultes, je baisse parfois un peu les bras ! Les jeunes, c’est important que dans un collège ou une bibliothèque on leur ouvre l’esprit, sans leur faire la morale. Ce livre, « Matin brun », il a du succès parce qu’il ne fait pas la morale, il fonctionne comme un miroir. Le mot « brun » désigne la couleur unique, la pensée unique, moi je me bats contre la pensée unique.
France 3 Auvergne : Deux millions d’exemplaires à ce jour, vous attendiez-vous à un tel succès ?
FP : Non ! Au départ, avec les éditions Cheyne, nous avions sorti 5000 exemplaires. Puis ça a explosé en 2002 au moment du duel Le Pen-Chirac. Les gens étaient désemparés face aux discours des hommes politiques et des analystes, ils se sont dit qu’ils avaient envie de réfléchir par eux-mêmes.
France 3 Auvergne : Aujourd’hui, ce livre il reste d’actualité évidemment dans le contexte des élections Régionales en cours qui voient la montée du Front national partout en France ?
FP : En ce moment,, les ventes de « Matin brun » montent et je reçois beaucoup de demandes d’associations, de bibliothèques, de librairies, d’établissements scolaires ou universitaires. Ces personnes me disent qu’elles n’ont n’a pas envie de se laisser enfermer comme Charlie et son ami dans le livre. Je ne fais pas de politique, mais j’ai envie que mes enfants vivent dans un pays ouvert. Les discours d’enfermement sont dangereux, et il y a des partis qui en jouent. Les dernières guerres viennent des enfermements des peuples. La liberté c’est l’ouverture, le livre parle de ça.
France 3 Auvergne : Etes-vous inquiet pour l’avenir ?
FP : Non, mais il faut être vigilant. Ce qui m’inquiète c’est que les gens se laissent endormir. On n’entend pas le bruit des bottes, on entend que le bruit de nos pantoufles ! J’aimerais qu’on soit un peu plus ouvert vers l’autre, la chance c’est qu’il y ait des autres qui ne nous ressemblent pas.
France 3 Auvergne : Avez-vous envie d’écrire la suite de « Matin brun » ?
FP : Ce sont les gens qui lisent le livre qui l’écrivent ! Il y a 2 millions de suites dans la tête des lecteurs ! La suite, c’est qu’on ne nous impose pas une pensée brune !