Une action collective d'usagers est engagée contre les sociétés d'autoroutes afin de contester les tarifs élevés des péages sur cinq portions construites depuis des décennies, annonce vendredi l'avocate et ex-ministre Corinne Lepage dans Le Parisien. L'A6 qui traverse la Bourgogne est concernée.
"Nous nous basons notamment sur un rapport de la Cour des comptes de juillet 2013 qui déplorait des hausses de tarifs nettement supérieures à l'inflation et évoquait
un rapport de force plus favorable aux concessionnaires qu'aux pouvoirs publics", explique Mme Lepage, qui coordonne cette action. "Mais ces sociétés n'en tiennent pas compte. Ces pratiques sont toujours à l'oeuvre, cela engendre une surfacturation pour l'usager". "Je me suis rapprochée d'un site de juristes, Actioncivile.com, pour monter une action collective", déclare Mme Lepage.
"Le but est d'exiger des sociétés d'autoroutes le juste prix du ticket de péage", a-t-elle ajouté, estimant que "le tarif actuel est d'au moins 20% supérieur à ce qu'il devrait être." Le ministre des Finances Michel Sapin a qualifié vendredi de "bonne idée" cette initiative. Les usagers de ces autoroutes peuvent, à partir de vendredi et jusqu'en juin prochain, remplir un formulaire sur le site et demander un remboursement de 20%. Peu après 09H00 vendredi, l'action comptait 1.675 plaignants.
L'ancienne ministre souligne que ces autoroutes ont été choisies car ce sont les plus anciennes: "elles ont été construites sous le général de Gaulle dans les années
1960-1970, et leur coût de construction est amorti depuis longtemps", dit-elle, espérant rassembler plusieurs dizaines de milliers de demandes, peut-être jusqu'à 50. 000. Qui est concerné ? Toute personne ayant utilisé l'A6, l'A1, l'A7, l'A9 et l'A13 lors des 5 dernières années et jusqu'en juin prochain.
Intervenants :
- Corinne Lepage, avocate - fondatrice du Rassemblement Citoyen
- des automobilistes
- Pierre Du Fou, président du Bourgogne Franche-Comté Automobile Club Association
L'Association des sociétés françaises d'autoroutes (Asfa) a réagi vendredi matin par un communiqué de presse, estimant que "le dossier publié dans Le Parisien ne repose sur aucune réalité juridique ou économique". L'Asfa précise par ailleurs "qu'il n'existe aucune autoroute comptablement amortie. En effet, les péages perçus sur les autoroutes les plus anciennes, à fort trafic, permettent d'asseoir le financement des autoroutes plus récentes à moindre trafic, grâce à une péréquation financière interne à chaque concession. C'est en vertu de ce système qu'a été construit près de 90% du réseau autoroutier français".
"Depuis la privatisation (en 2006, les sociétés d'autoroutes) ont investi 15 milliards d'euros pour l'extension et l'amélioration du réseau autoroutier, qui viennent s'ajouter aux sommes indiquées ci-dessus. Les péages sont ainsi la contrepartie de l'ensemble des engagements financiers pris par les sociétés pour le compte de l'État", déclare encore l'Asfa. Les initiateurs de cette action prévoient de faire une demande de médiation avec les sociétés. Mais si elle n'aboutit pas dans un délai d'un mois, des recours seront déposés auprès des tribunaux d'instance.
Cette action collective ouvre un nouveau front pour les sociétés d'autoroutes, engagées dans un bras de fer avec l'Etat depuis plusieurs mois. Elles ont déposé
un recours devant le Conseil d'Etat après la décision du gouvernement de suspendre la hausse des tarifs des péages. Le gouvernement a également mis en place un groupe de travail sur l'avenir des concessions d'autoroutes. Les sociétés concessionnaires - pour la plupart des filiales des géants français du BTP Eiffage et Vinci et de l'espagnol Abertis - exploitent 9.048 kilomètres d'autoroutes françaises, sur les 11.882 existants.