5 questions à Jean-Pascal Maujard, monteur à France 3

  • En quoi consiste le métier de monteur à France 3 ?

Le montage, au départ, ça a l'air simple. Cela consiste à récupérer les "rushes" (les images et sons bruts fournis par l'équipe de reportage), à tronçonner l'ensemble et à fabriquer le sujet qui sera diffusé. Parfois, de plusieurs heures de tournage, on ne garde qu'une minute ou deux, à la grande frustration des équipes de reportage qui ont travaillé dur pour fournir des images et des sons qui souvent ne seront jamais diffusés.

Le monteur est le grand méchant qui fait du mal à ses collègues !


Mais derrière ce qui s'apparente juste à un Meccano, il y a en fait d'un métier très complet, à la fois technique et artistique. Nous utilisons divers logiciels performants qui permettent d'organiser les séquences, corriger les images et fabriquer divers effets spéciaux).
En effet, nous devons raconter une "histoire", semblable à un film, en nous appuyant sur les informations et le texte fournis par le journaliste. Il faut choisir conjointement les interviews et veiller à la cohérence de l'ensemble. Pas facile parfois de narrer en moins de deux minutes certains sujets complexes !

  • Le stress monte-t-il à l'heure où approche le journal ? 

Il faut, une fois les bases acquises, plusieurs années pour maîtriser le montage. En effet, pour un débutant, il est souvent complexe de gérer à la fois l'artistique et la technique, tout cela le plus rapidement possible ! Souvent les jeunes monteurs sont pris au dépourvu par un problème technique et perdent pied devant l'urgence et la diffusion imminente de leur sujet… en laissant de côté le contenu.

Petit à petit, on apprend à garder son sang-froid… la panique étant la pire ennemie du monteur. Car tout finit par se terminer dans les temps. C'est parfois un petit miracle.


  • Quelles qualités faut-il avoir pour faire ce métier, quelle formation faut-il suivre ?

Beaucoup de jeunes monteurs viennent des BTS audiovisuel, car la complexité technique du matériel moderne exige des connaissances pointues. Mais un très bon monteur aura en plus poussé les portes d'une école de cinéma. Au moins en sera-t-il passionné, et considèrera les salles obscures comme sa deuxième maison. Il vous parlera des heures du dernier film qu'il a aimé. Même si ce n'est pas à priori évident, la narration d'un long-métrage est globalement identique à celle d'un documentaire, et par extension d'un sujet du journal. Tout le secret réside dans la trame narrative, les bouleversements du rythme. Il n'y a rien de pire qu'un rythme linéaire, on s'y ennuie ferme. Rentre aussi en ligne de compte, le choix de la musique s'il y a lieu, les adaptations de l'image, on peut modifier les lumières, les couleurs, rajouter des effets de lentilles, de faux mouvements de caméra… le choix est quasi infini.

  • Le montage a évolué. Du film il y a 50 ans, au montage vidéo et virtuel. Est-ce plus facile aujourd'hui ?

Depuis une bonne dizaine d'années, le métier a connu un bouleversement essentiel : le passage au numérique. Finis les kilomètres de pellicule qu'il fallait manipuler à la main, les cassettes vidéo encombrantes et si peu fiables, dorénavant la matière est virtuelle. Enregistrée dans un ordinateur, elle est manipulable à l'envi, et surtout de manière quasiment instantanée. Il n'y a pas si longtemps, il fallait par exemple plusieurs jours pour fabriquer un simple fondu enchaîné entre deux plans : envoyer la pellicule au labo, attendre qu'une machine hyper complexe, lourde et onéreuse fabrique un simple mélange entre deux images et vous renvoie l'ensemble… par coursier ou par la Poste. Maintenant, en quelques clics de souris tout est réglé, et si le résultat n'est pas satisfaisant, une simple combinaison de touches suffit à tout annuler pour essayer autre chose.

  • Un souvenir d'un montage périlleux ? 

Lorsque j'étais monteur intermittent, j'ai travaillé pour l'AITV (l'Agence Internationale France Télévisions). A l'étranger, le monteur partait avec l'équipe de reportage. Sur un sommet de chefs d'Etat en Afrique par exemple. Ou sur un déplacement ministériel. En 2005, je me souviens d'une mission au Burkina Faso. Pendant quelques jours il a fait une chaleur épouvantable.

J'ai du monter mes images à l'hôtel avec mon matériel dans un frigo. Il faisait plus de 40 degrés. Le banc de montage n'aimait pas !


En 2000, nous étions au Tchad. A l'arrivée sur place, le camion militaire qui nous transportait a été attaqué par des rebelles. Les militaires ont répliqué. Grosse frayeur pour notre équipe qui arrivait alors dans le pays. 

  • Que sera le montage de demain à ton avis ?


Et plus tard ? La technologie a atteint une pleine phase de maturité.  Il y a fort à parier que les outils évolueront peu, hormis le passage à des images toujours plus grandes, en 3D, voire directement projetées sur la rétine. Des recherches dans ce domaine sont en cours et semblent prometteuses. Le son sera de plus en plus impressionnant et toujours plus en plus enveloppant. Par contre restera, comme depuis plus d'un siècle, la même façon de raconter une histoire. La même façon de capter l'attention d'un (télé)spectateur. Et le même plaisir à se voir féliciter pour son travail.

Car notre plus grande satisfaction, elle nous vient de vous. Lorsque vous avez aimé notre travail… nous savons pourquoi nous avons choisi d'être monteurs.





Comment devenir monteur à la télévision ?
Plusieurs BTS en France dispensent une formation niveau BAC + 2 
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