Côte-d'or : pourquoi les tarifs de certains EHPAD flambent-ils ?

Les résidents de onze EHPAD de Côte d'or ont découvert mi-mai que les tarifs augmentaient dès la fin du mois de 3 à 15%. A Is-sur-Tille, la facture s'alourdit de 250 euros par mois. Ni l'établissement, ni le conseil départemental ne veulent en porter la responsabilité.

Lorsque Eric Varin a découvert le courrier de l'EHPAD d'Is-sur-Tille le 18 mai dernier, les bras lui en sont tombés. La direction de l'établissement où réside son père de 81 ans l'informe que les prix changent à compter de la fin mai 2021. Le tarif d'hébergement pour une personne seule passe de 57.27 € à 65.72€ par jour.

En ajoutant les autres frais, Eric s'étonne : "Pour mai, la facture passe de 1880€ à 2137€. Vous vous rendez compte ? Cela fait une augmentation de 15% et nous sommes prévenus quinze jours avant sans savoir ce qui justifie une telle hausse."

Le courrier adressé aux familles par la directrice du centre hospitalier d'Is-sur-Tille, auquel est rattaché l'EHPAD, précise que cette augmentation des tarifs est liée à la crise du Covid : les travaux en cours ont pris du retard et l'épidémie a engendré des frais supplémentaires.

Jugeant cette explication sommaire, Eric a envoyé un courrier à l'établissement ainsi qu'au conseil départemental de Côte d'or, tous deux restés sans réponse.

Comme lui, une soixantaine de familles multiplie les démarches auprès de la direction, de l'ARS, du conseiller départemental et du maire d'Is-sur-Tille pour comprendre ce qui justifie une telle augmentation.

Jean-Claude et Nicole Baudot en font partie. Leur maman de 97 ans, Jeanne, devra désormais débourser 2200 euros par mois pour "sa chambre de 10m2 sans douche, juste avec un lavabo". 

"C'est du racket. Purement et simplement. Le coût de la vie n'a pas augmenté de 14%, les retraites non plus."

Jean-Claude Baudot, fils d'une résidente de l'EHPAD d'IS-sur-Tille

Sa soeur, Elisabeth Lacroix, nous a confiée être très choquée "autant par le fond que par la forme". "Qui peut payer une telle somme ? Je suis en colère car personne n'avait été prévenu " ajoute-t-elle. Les membres du Conseil de vie sociale de l'EHPAD n'ont pas été concertés. 

 

Un surcoût lié à la crise sanitaire

La directrice du centre hospitalier d'Is-sur-Tille, Stéphanie Rincourt, explique cette forte augmentation par la crise sanitaire. Les protections (masques, gants, produits d'hygiène) ont pesé dans le budget tout comme l'emploi d'un contractuel pour l'animation des résidents.

Mais le vrai problème est le retard pris par les travaux : "Ils devaient durer six mois et cela fait un an et demi qu'ils se poursuivent. L'opération se déroule en site occupé; elle a donc un impact important sur l'activité puisque une dizaine de lits sont condamnés. "

Cette vacance aurait lourdement impacté le budget de l'établissement mais Stéphanie Rincourt nous assure avoir demandé au Conseil départemental "une progessivité de l'augmentation", consciente que la charge financière serait lourde pour les familles. 

Par mail, le Conseil départemental de Côte d'or présente une autre version :  " Dans ses propositions budgétaires, la direction de l'établissement sollicitait un prix qui aurait conduit à une augmentation bien supérieure puisque le prix de journée aurait été facturé environ 77 € au résident.

Le Département s’est opposé à cette demande et a refusé ce tarif, jugeant l’impact de cette hausse beaucoup trop pénalisant pour les résidents et leurs familles. Au final, le prix de journée au sein de l’EHPAD d’Is-sur-Tille est fixé à 65,72 € à partir du 1er mai  (seuls trois autres EHPAD en Côte-d'Or présentent des augmentations de plus de 5 %)."

Quel que soit l'établissement, les tarifs sont fixés conjointement par les maisons de retraite et le conseil départemental de Côte d'or. Dans ce cas précis, personne ne veut assumer la décision.

 

 

 

 

 

 

Augmentation généralisée des tarifs

En 2021, le conseil départemental a acté des augmentations pour les 90 EHPAD et maisons de retraite qui sont habilités. Dans son courriel, la collectivité tient à relativiser : "Pour 2021, le taux d'évolution des prix de journée hébergement des EHPAD a été fixé à 1,2 % par le Département, et nous avons pris compte le contexte singulier de crise sanitaire, qui n’a pas épargné les EHPAD." Seuls onze établissements subiraient des hausses supérieures.

D'après les arrêtés pris le 13 avril 2021,  nous nous sommes livrés à quelques calculs.

La maison de retraite Auguste Arvier de Bligny-sur-Ouche augmente ses tarifs de manière différenciée selon ses prestations. Une personne de plus de 60ans, seule, logée dans l'ancienne aile devra débourser 59.77€ au lieu de 56.15€ tandis qu'une chambre dans la nouvelle aile du bâtiment lui coûtera 65.92€ au lieu de 61.25€  Les prestations augmentent donc de 6.4 à 7.6% en fonction du standing.

A l'EHPAD "Fontaine aux roses" de Mirebeau-sur-Bèze, les tarifs passent de 60.81 à 64.24€ soit 5.6% d'augmentation. 

Une symbolique douloureuse

En temps de crise économique, alors que les conditions de vie en EHPAD ont été très difficiles pendant un an et demi pour les résidents, les familles ressentent de l'amertume.

Eric Varin s'interroge sur le message envoyé aux personnes âgées.

"Vous avez survécu donc maintenant , il va falloir payer "

Eric Varin, fils d'un résident de l'EHPAD d'Is-sur-Tille

Jean-Claude renchérit : "Ils se disent les vieux n'iront pas manifester." Pourtant, l'idée est train de germer dans son esprit. 

La directrice de l'HEPAD d'IS-sur-Tille a promis la réunion d'un Conseil de vie sociale fin juin pour s'expliquer. Les familles et les résidents espèrent que des élus du conseil départemental de Côte d'or seront aussi là pour s'expliquer.

 

​​​​​​​Le reportage de Tiphaine Pfeiffer et Sophie Hémar
Intervenants :

  • Jean-Claude Baudot, fils d'une résidente de l'EHPAD d'Is-sur-Tille
  • Eric Varin, fils d'un résident de l'EHPAD d'Is-sur-Tille

 

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