Une enquête nationale fait apparaître une dégradation des conditions de travail des personnels d’encadrement des collèges et lycées. La Bourgogne n’échappe pas à ce constat. Explications.
En France, l'éducation nationale compte près de 13.400 personnels d’encadrement, proviseurs, principaux, chefs et adjoints des collèges et lycées publics. Les chefs d’établissements sont stressés c’est ce qui ressort d’une enquête nationale
Des personnels à bout de souffle
Une enquête réalisée par Georges Fotinos, ancien inspecteur général de l’éducation nationale, auprès de 4.400 personnels de direction (33 % des effectifs) intitulée “les personnels de direction à bout de souffle, en demande d’avenirs”, fait apparaître des indicateurs alarmants sur la perte de confiance et les risques psychosociaux des chefs d’établissements.
Des résultats nationaux qui ne surprennent pas l'un des syndicats nationaux des personnels d'enacadrement. “Depuis plusieurs années, nous alertons avec loyauté notre hiérarchie sur la dégradation continue de nos conditions de travail”, précise le SNPDEN-UNSA, syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale.
Notre santé est en jeu et on le sent auprès de nos collègues qui nous le disent.
Retraité de l’encadrement, il témoigne
Le témoignage d’un chef d’établissement à la retraite, illustre l’épuisement de certains personnels d’encadrement de l’éducation nationale. “J’ai une longue carrière dans l’éducation nationale en tant que personnel de direction mais une mutation dans un grand lycée de Digoin en Saône-et-Loire m’a amené à faire un burn out”, explique Dominique Macrez, chef d’établissement à la retraite.
“J’étais submergé de travail”
En cause notamment l’absence de moyens humains et le cumul des charges de travail. “Deux adjoints étaient en formation et donc absents quasiment tout le temps”, précise-il. “J’étais submergé de travail (...). “Il y avait un collège, un lycée et un greta, on ne peut pas mener de front plusieurs établissements sans adjoints.”
Il s’arrête du jour au lendemain. “J’ai craqué, j’ai été absent pendant six mois”. Selon lui, faute d’accompagnement psychologique, il est arrêté plusieurs fois. “Même si la hiérarchie comprend le problème, derrière elle n’a pas de solutions à nous offrir”, conclut-il.
L’enquête qui vient de sortir au niveau national illustre ce témoignage.
Quelques chiffres issus de l’enquête
90 % des personnels de direction déplorent une dégradation récente de leurs conditions de travail sur les dernières années (et pas uniquement liée à la crise sanitaire).
84 % des personnels de direction déclarent se sentir dans l’incapacité d‘assumer correctement toutes leurs missions.
82 % des personnels de direction déclarent des troubles du sommeil et un stress perçu comme fréquent.
80 % des personnels de direction déclarent une perte de confiance dans leur hiérarchie et une dégradation de leurs relations avec elle.
56 % des personnels de direction déclarent avoir parfois, régulièrement ou fréquemment une mauvaise opinion de soi.
12,6 % des personnels de direction reconnaissent avoir parfois, régulièrement ou fréquemment des pensées suicidaires.
“Ces chiffres doivent interpeller le ministère sur les conditions de travail de ses cadres et amener une réaction urgente pour corriger et améliorer un système éducatif qui dysfonctionne et que les chefs d’établissement et adjoints ont de plus en plus de mal à compenser au détriment, souvent, de leur équilibre personnel et de leur santé”, précise Jérôme Naime, secrétaire académique du SNPDEN-UNSA.
Des chefs d’établissement isolés en milieu rural
L’académie de Dijon compte 375 personnels de direction. Une des particularités de l’académie c’est la ruralité. “Des collègues chefs d’établissements dans des établissements ruraux isolés ont du mal à pouvoir partager leurs problématiques avec d’autres collègues”. Un isolement qui peut accentuer leur fragilité. “L’équipe de direction est restreinte et la solidarité et le partage de difficultés est difficile et cela peut engendrer des problématiques particulières”, ajoute Jérôme Naime.
Rendez-vous avec la rectrice
Des chefs d’établissements ont rencontré ce lundi 15 novembre, la rectrice de l’académie de Dijon, Nathalie Albert-Moretti. “Nous avons des échanges constructifs avec la rectrice qui est à l’écoute de nos problématiques. Elle nous entend mais ne peut pas nous apporter de réponses”, explique Jérôme Naime.
Le mal être des personnels de l’encadrement est large selon le syndicat SNPDEN-UNSA. “On peut constater qu’il y a un mal être des cadres, dû à cette multiplication des tâches et cette faculté à tout de suite communiquer (de la part du gouvernement, ndlr) sans qu’il y ai de textes précis”, précise le secrétaire académique.
Des informations institutionnelles précises
Ils attendent des changements dans la transmission de l'information au plus haut niveau. "Nous voulons des informations institutionnelles précises qui nous permettent de répondre aux usagers, élèves et professeurs correctement”. Ils demandent également une réelle refondation de l’espace numérique professionnel et pouvoir recentrer leur missions sur leur cœur de métier qui est, “de faire réussir nos élèves”.
Piloter les équipes et accompagner les familles restant une priorité pour les personnels d’encadrement de l’éducation nationale.