Et s'il y avait des livres jeunesse pour guérir avec douceur toutes les petites peines du quotidien ? Voici trois albums pour parler de maladie, de dépression ou de misère avec les plus-petits.
Chronique du 14 octobre 2022
cui-cui le petit chien d’Antonin Louchard
Seuil Jeunesse
Ce chien tire son drôle de nom de son étonnante affection : il ne sait pas aboyer. Quand il veut effrayer les passants et protéger sa maison, il n’arrive à faire sortir de sa gorge qu’un faible « Cui-Cui ».
Avouez que c’est gênant pour un chien de garde !
Ses maîtres décident de l’emmener chez l’orthophoniste. Dans la salle d’attente, aussi incroyable que cela puisse paraître, Cui-cui le petit chien croise une dizaine d’animaux atteints de maux similaires, notamment un chat qui cancane et une oie qui miaule. Quelques exercices d’orthophonie suffisent finalement pour surmonter cette difficulté et retrouver ses capacités de communication.
Cet album est une belle leçon de vie pour les tout-petits dès 3 ans. Le souci choisi, en apparence anodin, permet de parler, en creux, de tous les handicaps, maladies ou différences qui peuvent affecter les enfants. Des difficultés que l’on surmonte si on demande un peu d’aide.
Ce petit album est un bijou de Antonin Louchard, un auteur jeunesse qui réjouit les enfants avec des dizaines de livres depuis les années 90.
Il a d’ailleurs été Prix sorcières en 2000 pour Tout un monde écrit avec Kathy Couprie, publié par les éditions Thierry Magnier. Le duo a ensuite été distingué au plus grand salon professionnel de littérature jeunesse d’Europe à Bologne, en Italie, en 2004 pour son livre Au jardin publié par le même éditeur.
Le Petit cafard de Maman de John Lavoignat et Sophie Jackson
L’Etagère du Bas
Le Petit cafard de Maman est un titre un peu énigmatique. Qu’est-ce que ce petit cafard ? Le héros n’en sait rien. Son papa lui a seulement dit que sa maman était fatiguée à cause d’un petit cafard.
Comme il doit être sage, il ne pose pas de questions mais son imagination s’emballe. Il envisage toutes les méthodes pour lutter contre l’insecte : piège collant, déguisement effrayant, adoption d’un prédateur.
Cet album, qui aurait pu être aussi triste que son sujet et que cette maman, est étonnement léger et doux. Inventif et coloré, il s'inspire de l'imagerie populaire.
Je le conseille à tous ceux qui sont confrontés à cette situation d’un proche atteint de dépression.
Les mots sont choisis avec soin, adaptés aux jeunes lecteurs dès 5 ans.
Sans détour de Stéphanie Demasse-Pottier et Tom Haugomat
L’Etagère du Bas
Sans détour est l’histoire d’une petite fille qui, chaque jour, en allant à l’école, croise une maman et son bébé, sur le trottoir. La misère lui saute au visage.
Elle ne comprend pas pourquoi elle ne peut pas ramener cette famille chez elle, pourquoi sa mère ne fait rien, pourquoi cette situation existe. Chaque jour, cette vision cause une blessure. Elle finit par trouver, au fond d’elle, le moyen d’agir. Elle donne un jouet, un peu de temps, un sourire.
Ce très bel album parle simplement de la question des sans-abris et de notre incapacité collective à prendre en charge ce problème. Il y aurait 42.000 enfants SDF en France.
Ce mal-être ressenti par tous devant cette situation inhumaine l’est aussi très frontalement par nos enfants et laisse souvent les parents démunis face à leurs questions.
Stéphanie Delmasse-Pottier, dont l'écriture est toujours très poétique, trouve encore une fois les mots justes. L'illustrateur Tom Haugomat, qui n'a pas son pareil pour varier les angles de vue, nous amène à regarder la réalité à hauteur d'enfant. De quoi donner envie de se replonger dans le roman graphique A travers.