À l'occasion de la journée mondiale de sensibilisation à l'autisme, ce dimanche 2 avril, Christine Garnier, vice-présidente d'Autisme France et présidente de l'association Respir Bourgogne, revient sur la nécessité de sensibiliser à ce trouble du développement.
Ils seraient plus de 700 000 à être atteints de troubles du spectre de l'autisme en France. Selon la Haute Autorité de Santé, jusqu'à 7 500 bébés autistes naîtraient même chaque année, soit environ 1% des nouveau-nés.
À l'occasion de la journée mondiale de sensibilisation à l'autisme, qui a lieu ce dimanche 2 avril, nous nous sommes entretenus avec Christine Garnier, vice-présidente d'Autisme France et présidente de Respir Bourgogne, association créée après le diagnostic de son propre frère.
France 3 Bourgogne : pourquoi cette journée de sensibilisation est-elle importante ?
Christine Garnier : Le but de nos associations, c’est de défendre la cause des personnes qui vivent avec ce trouble. À chaque fois qu’on fait une journée pour quelqu’un, c’est aussi pour qu’on puisse y penser et s’y intéresser. Car si la personne autiste n’est pas diagnostiquée assez tôt et n’est pas aidée, elle va avoir des difficultés à s’adapter à son environnement.
L'important, c'est de faire bouger les lignes de façon à ce qu'il y ait une reconnaissance de ce trouble par un maximum de personnes, notamment du grand public.
Ces difficultés peuvent aller jusqu’à des problèmes d’autonomie et de handicap. Pour nous, l’important en France, c’est de faire bouger les lignes de façon à ce qu’il y ait la reconnaissance de ce trouble par un maximum de personnes, notamment du grand public.
Car l'autisme n'est pas un handicap : c'est un trouble qui peut devenir handicapant s'il n'est pas pris en charge ?
C. G. : Exactement. L'autisme devient handicapant si il n’est pas pris en compte par l’environnement et si on ne met pas en place auprès des personnes qui en sont atteintes les bonnes pratiques.
Quand on est autiste, c'est comme si on était né sur une autre planète et qu’on ne comprenait pas les codes de là où on se trouve. À partir du moment où on n'a pas ces codes, on ne peut pas se référer à la façon dont agissent les autres. On fait tout de manière instinctive parce que le cerveau ne relie pas les choses de la manière que le cerveau de quelqu'un qui n'a pas ce trouble. Les enfants autistes ont souvent des réactions inadaptées et inappropriées, parce que leur cerveau n’analyse pas les choses de la même façon qu’une personne "neurotypique".
C’est pour ça qu’une fois que le problème est reconnu, il faut mettre en place très rapidement un accompagnement à l’éveil de ce qu’il y a autour. Comme il ne comprend pas, l’enfant a tendance à se balancer, ne pas regarder dans les yeux, ne pas aller vers les autres… et se replier sur lui.
Il y a un défaut de la reconnaissance de ce trouble en France ?
C. G. : En France, on a 30 ans de retard. On est encore dans cette idée que ce sont des personnes incapables alors que c'est faux. La France a beaucoup souffert de l'effet Bettelheim par exemple [Bruno Bettelheim, un psychothérapeute dont les travaux sur l'autisme sont aujourd'hui très contestés, ndlr], avec l'idée que c'était la faute de la mère si l'enfant ne se comportait pas normalement.
Dans le cas de mon frère par exemple, on le disait psychotique, schizophrène... Et finalement, il a été diagnostiqué autiste à 40 ans. Mais à cet âge, souvent, les adultes autistes sont toujours dans la famille avec des parents vieillissants.
Quelles sont les solutions ?
C. G. : Il faudrait que ces enfants restent au maximum en milieu ordinaire, et que le milieu ordinaire s’adapte à lui. Parce que c’est de côtoyer les autres qu’ils vont arriver à progresser. Mais encore faut-il le temps et les personnes pour le faire.
Quand on rencontre quelqu'un qui ne parle pas français, mais anglais, on parle anglais. C'est pareil avec les personnes atteintes d'autisme.
Les unités d'enseignement spécialisées à l'école par exemple, c'est très bien, mais ça n'accueille que 7 enfants en même temps et pour trois ans au maximum. Mais on parle de près de 10 000 naissances d'enfants autistes par an. Les autres font quoi, pendant ce temps ?
Ce qu'il faut, c'est vraiment de la sensibilisation pour que chacun puisse se dire, quand il est en présence d'une personne autiste, "je passe en 'mode autiste'". Comme quand on rencontre quelqu'un qui ne parle pas français, mais anglais. On parle anglais. Eh bien, c'est pareil avec les personnes atteintes d'autisme : il faut les comprendre, et parler "leur langue" avec eux.