À une dizaine de jours du 1er tour des élections législatives, en dehors des grandes villes également, on parle beaucoup politique. C'est un sujet de conversation qui alimente toutes les discussions. Immersion à Venarey-les-Laumes en Côte-d'Or.
Fin de matinée, à Venarey-les Laumes, certaines rues ont des commerces fermés... Peu de piétons et d'activité. C'est en se rapprochant du centre-ville que l'activité se concentre autour du supermarché, dans le quartier de la gare. Dans le périmètre, quelques commerces de bouche.
Le vote RN au premier tour : "je ne suis pas inquiet !"
Attablés en terrasse du snack "La Fringale", à l'attente de leur commande, 3 jeunes hommes. Ils travaillent dans le ferroviaire. Vénarey-les-Laumes est historiquement un bassin d'emploi cheminot, avec l'ancien Paris-Lyon-Marseille qui avait fait de la plaine des Laumes un important centre ferroviaire. De nos jours, c'est un atelier de maintenance du matériel de signalisation électromécanique et électronique ferroviaire qui fonctionne sur Venarey, avec parfois des chantiers mobiles.
Parler politique peut être "un sujet qui fâche" mais Mika*(prénom d'emprunt) se jette à l'eau bien volontiers. En lui posant la question, au sujet d'une éventuelle inquiétude ressentie par certains candidats ou citoyens, lui "n'est pas inquiet". Il en veut pour preuve "un dernier sondage qui donne plus de 30% au RN", et il tranche : "on verra bien avec eux !"
Son collègue Nicolas* (prénom d'emprunt) se dit également "prêt à tenter l'expérience, ça peut pas être pire !" dit-il en souriant, mais ajoute "ça pourrait l'être, après tout !"
Même si l'élection qui approche est une élection désignant des élus locaux à la représentation nationale, les discussions demeurent politisées, mais à l'échelle du pays. Par exemple, un autre client attablé non loin entend notre conversation et me confie : " j'aime bien Gauthier le Bret sur Cnews. Il est franc et il 'envoie' sur les politiques !"
Les petits commerçants résignés
Est-ce la réalité du moment ou bien cela est-ce lié aux conversations qui rapportent les mêmes difficultés, le patron de "la Fringale", Sébastien, fait le constat : "Mes clients me disent, c'est le sujet de conversation, ils ne vont pas changer leur vote, qu'ils soient ouvriers, retraités, les petits jeunes... ils en ont tous marre !"
Le restaurateur se demande : "je pense que c'est presque une obligation de passer par là pour faire bouger, peut-être que je me trompe, je ne sais pas !"
La vie chère, Sébastien est lui-même impacté directement dans son activité, à commencer par la hausse du coût de l'énergie (fourneaux, réfrigérateurs, congélateurs...) : "Avec la flambée du prix de l'électricité, on devait avoir un tarif bloqué à 190€ du Mégawatt/heure, là on est à 290 ! On devait avoir des aides pour couvrir ce qui dépasse, on n'a rien du tout qui tombe ! On ne peut pas ! On n'arrive pas à vivre de ce qu'on gagne. On n'aide pas assez les artisans, les petites PME, on est toujours en train d'aider les gros !"
Pouvoir d'achat et fin de mois
C'est bien autour du pouvoir d'achat que les choses se cristallisent, les commerçants le voient et le vivent, comme Philippe, qui tient le bar-PMU à une centaine de mètres plus loin, à proximité de la gare : "déjà au 15 du mois, on a des clients qui nous demandent de faire crédit, et durant la dernière semaine du mois, on n'a plus personne, je pourrais presque fermer tellement il n'y a personne ! Les gens n'ont plus d'argent !"
Même remarque pour Sébastien :"J'ai des clients qui venaient toutes les semaines, maintenant on les voit une fois dans le mois. Une sortie en famille et c'est 50-60 euros à dépenser, c'est beaucoup !"
Pour Bernard Lépy, qui tient un commerce multiservices à proximité, l'époque n'est pas formidable : "On est quand même assez inquiets, les affaires sont de plus en plus compliquées, ça se ressent terriblement."
"Dans notre activité, on est très inquiets car l'incertitude, c'est toujours mauvais." Bernard Lépy, qui travaille toujours à 79 ans, ne jure que par une vertu : "quand on commencé très jeune à 14 ans comme moi, on sait qu'il n'y a que le travail qui peut nous sauver."
La vérité des urnes
Alors que les 3 jeunes hommes de "la Fringale" repartent travailler, à l'intérieur, le patron achève les dernières commandes. Il se demande sur l'issue du scrutin : "Est-ce que les gens vont aller jusqu'au bout et faire comme aux élections européennes ? En tous cas, ils vont aller voter ! Est-ce que le peuple va suivre ? Moi je pense que oui !"
Tout en rangeant quelques ustensiles, il ajoute : "Les gens vont exprimer leur colère au premier tour c'est sûr, est-ce que au deuxième tour, cela sera maintenu ?"
La commune de Vénarey-les-Laumes, à l'occasion des élections européennes 2024 a voté :
- Jordan BARDELLA (Rassemblement national - groupe Identité et Démocratie) à 47,15 %
- Valérie HAYER (Renaissance, MoDem, Horizon - groupe Renew Europe) à 8,96 %
- Raphaël GLUCKSMANN (Parti socialiste, Place publique - groupe Socialistes et Démocrates) à 7,97 %