Le Festival Livres dans la Boucle qui se tient à Besançon du 20 au 22 septembre met à l'honneur plusieurs bandes dessinées adaptées de classiques de la littérature. Une pratique en vogue.
C'est l'une des tendances du Festival Livres dans la Boucle qui se tient ce week-end, du 20 au 22 septembre à Besançon : les œuvres littéraires adaptées en bande-dessinées. Deux ateliers organisés par le festival et dédiés aux jeunes, traitent en effet de ce thème. Tout sauf un hasard, car la version bande dessinée d'un ouvrage permet de toucher un nouveau public.
La dessinatrice Emilie Plateau a adapté le roman "Noire, la vie méconnue de Claudette Colvin" écrit par Tania de Montaigne. Cette biographie raconte l'histoire de cette jeune noire américaine qui avait refusé de céder sa place à un blanc dans un bus à Montgomery en Alabama aux Etats-Unis en 1955 en pleine période de la ségrégation raciale. "Tania de Montaigne cherchait quelqu'un pour adapter son livre en BD. Elle voulait toucher un autre public", témoigne Emilie Plateau.
Très riche et documenté, le livre de Tania de Montaigne, couronné du prix Simone Veil 2015, peut sembler difficile d'accès pour un public jeune ou non averti. L'ambition de la dessinatrice Emilie Plateau était de fluidifier cette œuvre majeure en se concentrant sur le personnage de Claudette Colvin. "Il y a très peu de dialogues dans le livre de Tania. J'ai donc adapté beaucoup de faits en dialogues pour donner du rythme à la BD. J'ai aussi conservé des éléments de lecture. Dans son livre, Tania interpelle souvent le lecteur en le plongeant dans l'Alabama de l'époque tout en utilisant le "vous" pour s'adresser au lecteur. J'ai gardé ça en voix off dans la BD", poursuit Emilie Plateau.
La Princesse de Clèves pour parler d'amour aux lycéens
Claire Bouilhac a plongé dans une autre époque, le 16ème siècle, en adaptant La Princesse de Clèves, le roman de la comtesse de La Fayette. L'idée lui est venue avec la dessinatrice Catel, en écoutant la fille de cette dernière, âgée de 17 ans, rentrer du lycée et raconter ses histoires amoureuses qui évoquaient celles de la Princesse de Clèves, cette jeune noble imaginaire qui débarque à la cour du roi Henri II en 1558."À l'école, les professeurs parlent aux lycéens des aspects techniques et didactique du livre, mais on ne leur dit pas que l'héroïne de 16 ans de Madame La Fayette est confrontée au même sentiment qu'eux. Depuis on a marché sur la lune, mais on découvre toujours de la même manière l'amour", s'amuse Claire Bouilhac.
La dessinatrice s'était aussi rendue compte qu'il était difficile de commencer la lecture de cette oeuvre pour de nombreux lycéens. "Le week-end dernier j'étais à Nancy pour des dédicaces. Une élève qui rentrait en première m'a dit qu'elle avait essayé trois fois de rentrer dans le roman, sans jamais réussir. Elle était bloquée aux 20 premières pages. C'est après avoir lu la BD qu'elle a finalement réussi à lire le livre, ce qui m'a évidemment fait très plaisir", ajoute Claire Bouilhac.
Transmettre l'âme du texte dans le dessin
Tout en conservant l'âme du livre originel, le dessin permet de transmettre le message de l'écrivain d'une autre manière. "Dans mes précédentes BD, je dessinais en noir et blanc, dit Emilie Plateau. Mais en discutant avec Tania de Montaigne, on s'est dit que ce serait chouette de mettre de la couleur. Cela m'a permis de montrer comment Claudette Colvin est jugée par les blancs. Au début de l'histoire quand elle est au milieu de gens de sa communauté, elle apparaît sous une couleur neutre. Puis, quand elle se confronte aux regards de blancs, elle change de couleur en devenant marron pour bien montrer qu'elle est jugée pour sa couleur de peau". Dans la Princesse de Clèves, Claire Bouilhac dessine la jeune héroïne avec les cheveux détachées. "On savait que c'était quelque chose d'anachronique, car à la Renaissance les femmes n'avaient jamais les cheveux détachés. Mais on a voulu la différencier des autres personnages", confie la dessinatrice.