Témoignages. 10 ans après la loi du mariage pour tous : "Se dire qu’on est allées à la mairie, c’est magique"

Publié le Écrit par Mélanie Philips

Déjà 10 ans que la France a été divisée par un sujet qui ne semble, aujourd’hui, plus faire débat. Il y a 10 ans, François Hollande faisait de l’ouverture du mariage homosexuel, sa promesse de campagne. Après des débats houleux à l’Assemblée et dans la rue, la loi a finalement été adoptée le 23 avril 2013. Une décennie plus tard, France 3 Franche-Comté a recueilli deux témoignages.

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Bérangère a 42 ans. Il y a sept ans, elle rencontre sa femme. Le mariage est prévu au lendemain du confinement. Crise sanitaire oblige, il est repoussé un an et demi plus tard. Si Bérangère a pu se marier avec celle qu’elle aime en août 2021, c’est grâce à une lutte de plusieurs mois menée entre 2012 et 2013. "Ma femme voulait se marier, c’était une concrétisation du couple, de notre amour. C’était important pour elle, un rêve de jeune fille et c’est simplement du bonheur."

Un grand pas en avant

Pour autant, derrière cette joie, la jeune femme trouve ça "dommage" d’être "obligé d’avoir une loi pour aimer la personne que l’on aime, alors que c’est un choix de s’unir". Mais elle est "heureuse" que la loi ait été promulguée : "on ne se voit pas différemment des autres et ce sont ces petites avancées qui font qu’on se met à la page. La France est un peu dans l’ancien temps. On a décidé de se marier entre autre parce qu’on veut un enfant. Cette loi nous permet de se marier et d’avoir un enfant avec reconnaissance anticipée", explique-t-elle.

Julia et Ornella, désormais mamans

Parce que oui, la réalité, c'est que, pour un couple homosexuel, le parent dit "social" (conjoint(e) du parent biologique) doit être marié pour pouvoir adopter son enfant. Dans les couples lesbiens, dont l’enfant a été conçu grâce à un géniteur ou a un don anonyme à l’étranger, l’enfant n’a qu’un seul parent légal. C’est pour cela que l’adoption est demandée par la mère d’intention.

Ornella, 35 ans, s’est mariée à sa femme, pour leur fille, aujourd’hui âgée de 14 mois. Ornella et Julie se sont rencontrées en 2018. Il y a un an et demi, elles décident de s’unir, car elle est enceinte.

On avait le projet de se marier, mais la grossesse a un petit peu précipité les choses. Je voulais que s’il m’arrive quelque chose, ma femme soit le parent légal

Ornella

"Même si les droits ne sont pas encore tout à fait les mêmes pour les couples homosexuels, c’est un grand pas en avant. Se dire qu’on est allées à la mairie, c’est magique", se remémore-t-elle, "Il ne faut pas oublier d’où on vient. Quand j’avais 15-16 ans, je ne pensais pas qu’un jour en France, un couple homo pourrait se marier".

Changer les mentalités

Quand Ornella repense à cette période de manifestations, l’incompréhension l’envahit. "Je ne comprends pas comment on peut perdre son temps à aller dans la rue pour quelque chose qui ne nous concerne pas. On ne leur demande pas d’assister à notre mariage.

Je n’ai pas compris cette haine gratuite et comment on a pu atteindre un tel niveau de violence

Ornella

Ce sentiment, Bérangère le partage. "J’ai regretté de voir des enfants dans ces manifs, alors que ce n'est peut-être pas leur vision. C’est dommage de leur instaurer ça, la haine va être transmise si les enfants ne sont pas ouverts et tolérants", dit-elle, attristée par cette réalité qu’elle a vue. 

Au-delà de cette avancée, la jeune maman pense que la loi du mariage a "débloqué les mentalités". S’il y a 10 ans, la priorité d’Ornella n’était pas de se marier, elle était tout de même investie dans le débat. "J’avais des amis qui attendaient que ça, que la loi passe. J’ai évidemment soutenu le projet, mais je n’y pensais pas pour moi". Pourtant, une fois acceptée et 10 ans plus tard, Ornella se demande encore : "pourquoi on ne pouvait pas se marier ? Comment c’est possible ?"

Le combat continue

Un combat qui a été mené à bien, mais pas le dernier. "On doit se battre pour tout", lâche Bérangère. Depuis août 2021, avec sa femme, elles ont entamé un parcours PMA en France. Ornella et Julie, elles, ont opté pour la Belgique. "Pour que ma femme puisse être reconnue comme la deuxième maman, on a dû payer un notaire, c’est une honte !", raconte Ornella. Même si elle voit encore des progrès. Une nouvelle loi a été promulguée pour plafonner les frais de notaire dans le cadre de la reconnaissance de l’enfant.

10 ans après, une grande avancée, même si le chemin semble encore long pour avoir les mêmes droits que les couples hétérosexuels.

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